Louis-Karl Tremblay / Les Atrides : Théâtre de la démesure
Scène

Louis-Karl Tremblay / Les Atrides : Théâtre de la démesure

Le Théâtre Point d’orgue convie la population à un spectacle-événement d’envergure avec Les Atrides, qui se déploie dans l’église Saint-Jean-Baptiste. Le metteur en scène de cette fresque humaine en six tableaux, Louis-Karl Tremblay, insiste sur le plaisir que procure cette expérience théâtrale inédite. 

La pièce Les Atrides s’inscrit dans la lignée d’expérimentations théâtrales qui ont pris la forme de happenings et de spectacles conçus dans des lieux inusités pour des distributions imposantes permettant la polyphonie chorale et les déplacements chorégraphiés, tels que Les Troyennes, joué en 2009 au Bain Saint-Michel. Le Théâtre Point d’orgue, fondé en 2008 par quatre finissants de l’École supérieure de théâtre de l’UQAM, privilégie une actualisation de textes fondateurs et une exploration des potentialités dramatiques de lieux et de situations insolites qui renouvellent les rapports avec le public. C’est donc en continuité avec cette réflexion sur la résonance actuelle des mythes que Louis-Karl Tremblay et Mathieu Leroux ont librement adapté les tragédies composant la saga familiale des Atrides, à savoir les descendants du roi d’Argos (Grèce), Atrée, qui ont déclenché et alimenté par une suite d’événements funestes la guerre de Troie. L’intérêt de faire revivre ces récits mythiques est qu’ils nous permettent d’interroger la mémoire collective en nous demandant: «Comment l’héritage nous transforme-t-il? Qu’est-ce qu’on veut perpétuer?» et de réfléchir à certains enjeux actuels. «Les problématiques de la violence, de la vengeance et de la justice prennent un nouveau sens en lien avec les cas de crimes perpétrés au nom de l’honneur ou de valeurs religieuses, selon Louis-Karl Tremblay. Qui détient le pouvoir de juger: les dirigeants? le peuple? Dieu?»

Le fait d’avoir choisi de créer ce spectacle dans une église sous la forme de six stations mettant en scène 26 comédiens donne de l’envergure et une portée symbolique à ce spectacle qui ne va pas sans rappeler les mystères et les chemins de croix. La musique, particulièrement l’orgue, dont joue en direct le musicien et compositeur d’expérience Michel Smith, ainsi que la scénographie (Karine Galarneau) épousant le mobilier et les différents espaces de l’église contribuent à faire de cette production une expérience inédite qui promet d’être marquante. L’occupation théâtrale d’un lieu sacré vient combler un vide tant dans l’espace social que dans le paysage théâtral en privilégiant un théâtre à grand déploiement; un théâtre festif et rassembleur. «Ce type de projets, qui n’ont pas d’allure de par leur démesure, n’existent presque plus», d’affirmer Tremblay qui se désole qu’«il y ait malheureusement beaucoup trop de structures pour trop peu de création et de plaisir», d’où sa volonté de renouer avec l’esprit des créations collectives, expérimentales et festives des années 1970.