FTA: Lemi Ponifasio / Skymirrors : Cérémonial pour la Terre
Scène

FTA: Lemi Ponifasio / Skymirrors : Cérémonial pour la Terre

Invité en 2011 par le FTA, le Néo-Zélandais Lemi Ponifasio s’était placé en tête de notre Top 5 de l’année. Il revient pour stimuler notre lien à la Terre avec l’aussi énigmatique que magnifique Birds with Skymirrors.

Une imposante colonne plantée en diagonale en plein cœur d’une scène plongée dans l’obscurité, des trouées de lumière où des personnages énigmatiques se livrent à d’étranges rituels, des paysages sonores qui nous transportent en des temps immémoriaux… L’esthétique de Birds with Skymirrors est la même que celle de Tempest: Without a Body qui s’était avéré la plus grande et belle surprise de la programmation danse du FTA en 2011. On y retrouve ces drôles de moines exécutant des danses inspirées de traditions des îles du Pacifique dont Lemi Ponifasio et les membres de MAU, sa compagnie, sont issus.

«Ce sont des langages anciens du Pacifique consacrés à l’instant et à la cérémonie, commente l’artiste dont la signature combine danse, théâtre et arts visuels. Ils sont utilisés pour essayer de favoriser une conscience cosmologique. Ça peut paraître bizarre, mais on s’adresse aux ancêtres, au ciel, aux arbres et aux étoiles pour activer l’espace. Alors, la communication ne se fait pas juste entre vous et moi, mais entre vous, moi, votre mère, vos arrière-arrière-arrière-grands-parents, le ciel, les arbres et tout le reste. L’idée est d’essayer de briser les barrières de la différence pour tenter de nous trouver une généalogie commune. C’est une manière de faire de la culture une affaire de communication et de communauté plutôt que le facteur de différenciation qu’elle est la plupart du temps.»

Ponifasio ne fait donc pas des spectacles. Il orchestre des cérémonies. Et il se défend de vouloir transmettre des messages, même si les éléments à l’origine de ses œuvres sont, d’une manière ou d’une autre, politiques. Dans cette œuvre pour 12 corps dans l’espace (on a du mal à nommer «performeurs» ces agents de liaison spirituelle), c’est notre lien à la Terre qu’il cherche à activer. Elle est inspirée par la vision d’oiseaux condamnés à la mort par les bandes magnétiques qu’ils viennent de pêcher dans The Great Pacific Garbage et par le fait qu’en polluant l’environnement, l’humanité scie la branche sur laquelle elle est assise. Comment, alors, se positionner relativement aux effets néfastes des nombreux déplacements en avion de la compagnie?

«Nous faisons partie du processus de la Terre qui a débuté bien avant l’humanité et qui continuera après, répond-il, et nous devons réaliser que notre rapport à ce processus de la nature est conflictuel: si vous voyez un rat dans votre cuisine, vous allez le tuer; ça fait partie de la vie. L’idée est de prendre conscience de notre relation à ce rat et des raisons pour lesquelles nous le tuons. Alors, si je me demande pourquoi je prends l’avion, c’est que je dois faire mon travail d’être humain. Nous devons nous relier et entamer le dialogue sur la conscience de ce que nous sommes et de ce que nous faisons ici. Si nous ne faisons rien, il ne se passe rien.»

Présenté dans le cadre du Festival TransAmériques