FTA: Robyn Orlin / Beauty remained… : L’Afrique en partage
Le FTA ouvre son programme en danse avec Beauty remained just for a moment then returned gently to her starting position… Une œuvre truculente où la Sud-Africaine Robyn Orlin conjugue danse, musique, chant, texte, objet et vidéo pour interroger la notion de beauté.
Remarquée en 1999 aux Rencontres de danse contemporaine africaine de Tananarive, Robyn Orlin décrochait, l’année suivante, le prix Jan Fabre de l’œuvre la plus subversive aux Rencontres chorégraphiques internationales de Seine-Saint-Denis. Mais qu’on ne s’y trompe pas: plutôt que la provocation, elle a choisi la multidisciplinarité, le mélange des styles et l’humour pour dénoncer dans ses œuvres le racisme, la pauvreté, la dictature ou encore la hiérarchie des genres et celle des codes qui creusent le fossé entre Nord et Sud. Chorégraphe indépendante, cette créatrice quinquagénaire a pour principal centre d’intérêt l’Afrique du Sud, où elle est née d’un père lituanien et d’une mère polonaise.
«Bien qu’il m’arrive de travailler avec certaines failles graves des sociétés africaines, j’ai toujours voulu révéler ce qu’il y a de bon dans l’Afrique, tous ces éléments très positifs qu’il est important d’exploiter. Et bien que mes pièces soient toutes différentes, il y est toujours question du potentiel de puissance et de la proaction d’un « performeur » qui comprend qui il est dans le monde», explique celle à qui l’on avait confié la mission spécifique de transcender la vision occidentale du continent noir et d’en projeter une image positive dans Beauty remained…
Pour cette œuvre créée en 2012 avec les huit danseurs de la compagnie Moving into Dance Mophatong – fondée à Johannesburg en 1978 par Sylvia Magogo Glasser qui en est toujours la directrice artistique et principale chorégraphe –, Orlin a d’abord été inspirée par la capacité de certaines tribus nomades de se fabriquer des chapeaux et autres atours avec toutes sortes d’objets recyclés; d’où les fabuleux costumes de Marianne Fassler. De là, elle s’est concentrée sur l’identité contrastée de la capitale sud-africaine, cherchant à en débusquer et à en exalter la beauté cachée.
«La ligne d’horizon au coucher du soleil est une des beautés de Johannesburg qui m’a beaucoup marquée et qui me manque énormément», commente-t-elle, questionnée sur le fait que la course du soleil rythme le spectacle. «Mais ce n’est pas le propos. La beauté dont on parle est vraiment celle de l’esprit, de l’esthétique et de l’humour si particuliers qui caractérisent la ville.»
Si ce paysage lui manque tellement, c’est qu’elle vit depuis plus de 10 ans à Berlin. Dans cette période, elle a créé plusieurs de ses œuvres en France où elle fut invitée en résidence. «Souvent, quand les gens apprennent que je suis blanche, leur regard sur mes pièces change. Et l’une des raisons pour lesquelles je travaille davantage en Europe maintenant, c’est que je suis fatiguée d’être étiquetée comme la Blanche qui travaille en Afrique. Moi, je me vois comme une Africaine. C’est là que je suis née. Ma situation n’est pas différente de celle d’un Noir qui est né en France. Pourquoi n’aurais-je pas le droit de travailler avec ça?»
Présenté dans le cadre du Festival TransAmériques