FTA / Xavier Leroy : Voir le sacre pour l'entendre
Scène

FTA / Xavier Leroy : Voir le sacre pour l’entendre

Pour le centième anniversaire de la création du Sacre du printemps, le FTA nous offre la version très originale du Français Xavier Le Roy et toute une soirée de projections.

Largué comme une bombe dans le paysage chorégraphique et musical du début du XXe siècle, Le Sacre du printemps a inspiré des dizaines de chorégraphes depuis la création de Vaslav Nijinski sur la partition d’Igor Stravinsky. Parmi ceux-ci, les grandes Pina Bausch et Marie Chouinard, dont le FTA montrera les versions intégrales filmées (au QG, le 29 mai, à 22h), Daniel Léveillé, qui tourne actuellement avec l’œuvre qu’il a créée en 1982 et remontée récemment, et José Navas qui produit sa version solo ce mois-ci à Bruges. C’est aussi en solo que Xavier Le Roy a choisi de s’attaquer à ce monument de l’histoire de l’art, en 2007.

«À l’époque, j’étais très intéressé par la façon dont le mouvement facilite l’écoute et la compréhension de la musique et, en regardant le film d’une répétition du Sacre du printemps par l’Orchestre philharmonique de Berlin, j’ai eu l’impression que le chef d’orchestre dansait sur la musique plus qu’il ne la dirigeait. De là est née l’idée de faire Le Sacre en m’inspirant de sa gestuelle. La réplique de mimiques ou de gestes de Sir Simon Rattle structure d’une certaine façon la chorégraphie; les autres mouvements sont produits à partir de mon écoute et de ma réception de la musique.»

Totalement détaché du livret original, Le Roy nous offre donc une incarnation de son interprétation personnelle de la musique, ne se gênant pas pour y injecter de l’humour. Seul en scène, il dirige le public comme s’il était l’orchestre. Et l’effet est d’autant plus saisissant qu’un dispositif sonore installé sous les sièges des spectateurs permet de séparer les partitions de chaque groupe d’instruments et de spatialiser la diffusion du son comme s’il émanait d’un véritable orchestre.

«Cette adresse du geste aux spectateurs, qui sont dans la lumière et qui me renvoient quelque chose, est un élément très important de la pièce. Or, l’exercice de diriger une musique préenregistrée est très difficile, même pour un musicien, explique le créateur quinquagénaire. Si je me trompe, la musique continue. Cette peur me rendait peut-être plus rigoureux au début. Maintenant, même si je fais encore des erreurs, je suis plus engagé dans cet échange avec les spectateurs.»

Au fil de quelque 70 représentations, Le Roy a noué un rapport de plus en plus intime avec ce Sacre qui, pourtant, continue de le surprendre. «Je l’ai écoutée un nombre incalculable de fois, j’ai l’impression de la connaître par cœur, et il y a encore des choses que je n’avais pas entendues. J’ai vu une autre version du Sacre du printemps après avoir créé la mienne et c’était presque une torture parce que je n’arrivais pas à regarder sans bouger. Il a fallu que je retourne voir la pièce parce que la première fois, j’étais trop pris par ce que cette musique me fait. C’est une mine d’or et je ne me lasse pas de l’écouter.» Telle est la force des grandes œuvres d’art. Et un montage d’extraits de diverses autres œuvres montrera aussi, le soir du 29, quelle diversité d’imaginaires elle a su stimuler.

Du 27 au 28 mai à l’Agora de la danse. Dans le cadre du Festival TransAmériques.