Au Théâtre Beaumont-St-Michel : Adieu je reste : métissage comique sur fond d'adultère
Scène

Au Théâtre Beaumont-St-Michel : Adieu je reste : métissage comique sur fond d’adultère

Le Théâtre Beaumont-St-Michel, généralement plus enclin à produire des comédies québécoises que des textes étrangers, se commet cette année avec Adieu, je reste, une comédie à la parisienne d’Isabelle Mergault (qui a toutefois  été québécisée). Divertissement convenu, mais efficace.

Mélangeant les codes du vaudeville et du film de gangster, la pièce s’appuie aussi sur un certain plaisir à jouer avec les mots et rappelle parfois le ton des séries télé féminines. Cet assemblage d’éléments gagnants s’avère fort divertissant et tout à fait adapté aux polyvalentes comédiennes Danielle Proulx et Linda Sorgini (c’est toutefois moins le cas de leurs partenaires masculins André Lacoste et Normand Lévesque, qui manquent d’aplomb). Pas d’hilarité dans cette production rythmée, ponctuée comme il se doit d’allées et venues et de coups de feux, mais l’histoire rocambolesque de cette femme qui rate un assassinat parce qu’elle se lie d’amitié avec sa victime a tout pour susciter l’adhésion et les sourires complices des spectateurs venus là pour trouver une comédie sympathique et pas trop grossière. Et ce, malgré une finale un peu décalée par rapport au ton général de la pièce et étrangement située dans une autre temporalité, ce qui brise le huis clos et le rythme.

Est-ce un vaudeville? Oui, dans la mesure où cette tueuse inexpérimentée accepte de liquider la femme de son amant et qu’une fois cette première situation d’adultère révélée, les deux femmes comprendront dans quel réseau complexe d’adultère elles se trouvent impliquées. Femmes trompées, maris malicieux et cocufiés à leur tour, apparitions surprise du concierge de l’immeuble qui se mêlera à tous ces chassés-croisés amoureux: tout est là pour que s’enclenche la typique ronde de quiproquos amoureux et pour que claquent constamment les portes de l’appartement.

Est-ce une pièce de gangster? Un peu, dans la mesure où l’auteure s’amuse à faire du personnage de Gigi une apprentie-criminelle maladroite et gaffeuse, ce qui permet de multiplier les lazzis impliquant un revolver qui passe de mains en mains et dont les coups de feux retentissent à quelques reprises. Pas exactement dans la lignée d’un film noir, me direz-vous, mais parfois proche de certaines comédies de gangster sans envergure, telles que Le génie du crime, de George F. Walker.

Est-ce une comédie «féminine»? À certains égards, oui. À mesure que foire le plan de meurtre et que la fausse tueuse à gages improvisée se lie d’amitié avec la femme de son amant, elles compareront leurs expériences avec les hommes, se moqueront de celui qu’elles partageaient sans le savoir: bref, on n’est pas si loin de Sex and the city (en moins salace, toutefois). 

Est-ce une comédie intelligente qui fait honneur au verbe? À certains moments, oui. Le personnage interprété par Linda Sorgini, une écrivaine à succès en panne d’inspiration et au bord du désespoir, se trouve soudainement libérée du syndrôme de la page blanche alors qu’elle est menacée d’être tuée. Voilà que de sa bouche et de celle de son assaillante sortiront des phrases fleuries qui expriment leur situation en quelques mots bien alignés et avec une certaine répartie. Très français comme mécanisme d’écriture comique, mais fort appréciable, alors que nombre de nos théâtres d’été exposent plutôt une langue pauvre et décharnée.

Évidemment, ce n’est pas le spectacle à voir pour être surpris par sa narrativité ou son inventivité, mais dans son genre, le métissage comique fonctionne bien.  

Jusqu’au 31 août au Théâtre Beaumont-St-Michel, 51 route 132, St-Michel-de-Bellechasse.