Jardin volcanique / Anne-Marie Olivier au MNBAQ : Poésie multicolore
Porter un regard tendre sur Alfred Pellan, son œuvre et l’homme qu’il était. Voilà la mission que s’octroie Anne-Marie Olivier avec Jardin volcanique, un circuit théâtral aux allures de chantier.
«On accepte de présenter quelque chose qui n’est pas abouti, un exercice exploratoire. Si le public est dans le même état d’esprit que nous, on va passer un bon moment.» Approchée par Catherine-Ève Gadoury et Patrick Caux du Musée national des beaux-arts du Québec pour la création d’un essai théâtral en écho à l’exposition vedette de l’été, Anne-Marie Olivier avoue toutefois ne pas avoir eu besoin de se faire tordre un bras pour accepter leur offre. C’est une idée qu’elle aurait aimé avoir, un sujet qui résonne en elle. «Pellan m’a donné envie d’être plus libre comme créatrice. Je pense aussi qu’il nous donne l’obligation d’être plus curieux vis-à-vis ce qui s’est fait ici avant.» Un grand maître trop peu connu que la masse gagnerait à connaître, toujours selon l’artiste ancrée à Québec. «Je ne sais pas pourquoi les profs ne prennent pas un après-midi pour parler de Pellan, ni pourquoi ça ne fait pas partie du cursus scolaire. C’est comme si on faisait un gros gâteau et qu’on ne le mangeait pas.»
La belle mort
Liberté, vie et mort. Trois mots, mais aussi trois thèmes chers à Alfred Pellan que la femme de théâtre se donne pour mandat d’explorer avec son laboratoire théâtral. Une œuvre collective que la désormais directrice artistique du Théâtre du Trident a été amenée à cuisiner aux côtés de ses complices Véronique Côté, Christian Michaud et Normand Bissonnette. «Ludique. C’est le mot qui revient toujours quand les gens parlent de Pellan. Mais il était plus que ça. Dans ses toiles, il était beaucoup question de la mort. Il y avait quelque chose de latin dans son vocabulaire, avec les têtes de mort et les fleurs.»
Noyau de la protopièce présentée à la mi-août entre les murs de l’institution muséale, l’amour au sens large occupera pour ainsi dire une place centrale dans ce festin de mots orchestré par celle que les théâtrophiles abonnés au Périscope connaissent aussi comme l’interprète et auteure d’Annette. Une tendresse éternelle exposée par le quatuor, notamment par le biais des correspondances entre Alfred et Madeleine, cette femme dont il était éperdument amoureux et a mariée, et qui a légué 1157 œuvres au MNBAQ à son décès en 2010. Mais le sens du verbe aimer allait au-delà de ce que peuvent ressentir un homme et une femme. Ça, Anne-Marie Olivier vous le dira.
Artiste multidisciplinaire, donc, Pellan n’avait pas que pinceau et spatule pour créer. C’était un homme de lettres qui comptait parmi ses amis nombre de poètes québécois parmi lesquels Roland Giguère et Éloi de Grandmont, dont les textes seront repris par Olivier et sa bande. «Il a aussi fait des décors et des costumes pour le théâtre, à l’ouverture du TNM pour la pièce La nuit des rois», ajoutera celle qui se décrit comme la chef cuisinière de cet ovni culturel pour adultes et adolescents.