Eaux / Théâtre Les Gros Becs : Les yeux des tout-petits
Scène

Eaux / Théâtre Les Gros Becs : Les yeux des tout-petits

Audrey Marchand et Laurence Primeau Lafaille présentent aux Gros Becs le spectacle jeunesse Eaux. Éloge de l’étonnement, de la présence et du meilleur en nous.

Sous-titrée Poésie aquatique pour corps et contrebasse, la pièce pour tout-petits Eaux – pour les 1 an à la maternelle – met en scène une danseuse et un contrebassiste. Un match parfait, comme l’a confirmé une représentation dans un CPE. «On sentait vraiment une vibration forte chez ces enfants, entame Laurence Primeau Lafaille. Certains allaient jusqu’à chanter avec la contrebasse. […] Ils sont un terrain de recherche incroyable. Ce sont des spectateurs qui nous touchent, nous transportent, nous bouleversent, qui sont déroutants, étonnants.»

Mais des spectateurs exigeants, aussi. «Si t’es pas présent à chaque instant, ils le savent et décrochent. Il faut donc un maximum de présence, une cohérence dramaturgique et une construction rythmique qui soient solides, fortes et signifiantes.»

On pourrait disserter longtemps autour de la scénographie, des intentions artistiques de la pièce, mais le propos des deux Incomplètes nous fait pourtant voir à quel point toute la valeur du projet tient à la seule réaction des enfants. «Ils sont purs, enchaîne Audrey Marchand, l’autre codirectrice de la compagnie. Quand ils regardent, ils regardent vraiment. S’ils ont vécu une émotion, tu la vois en eux, tu vois qu’il s’est passé quelque chose et qu’ils ne sont plus les mêmes. Souvent, à la fin du spectacle, c’est comme si tu leur avais fait le plus beau cadeau.»

À la fin d’Édredon, leur précédente pièce dans laquelle elles jouaient l’une et l’autre, certains enfants venaient leur donner des becs, les coller; d’autres restaient devant elles sans un mot, béats d’admiration. Des parents leur ont confié qu’un an plus tard, leur petit continuait de jouer avec une plume qu’on leur avait donnée à la fin de la représentation. «Tu vois que quelque chose s’est déposé dans le corps des enfants. C’est pas du théâtre: pour eux, ce moment-là est réellement arrivé, ça fait partie de leur vie!»

«L’acteur, au même titre que les lumières, le son ou les images, les émotions condensées dans le spectacle, font partie d’un tout, poursuit Laurence Primeau Lafaille, redoublant l’enthousiasme de sa collègue. Et quand l’enfant te regarde avec cette espèce d’admiration, c’est toute cette traversée émotive que tu revois, qui s’est déposée sur son visage et dans son corps.»