Entrevue avec Martin Faucher, nouveau directeur artistique du FTA : L'avenir est sauf
Scène

Entrevue avec Martin Faucher, nouveau directeur artistique du FTA : L’avenir est sauf

La nouvelle a fait grand bruit: Martin Faucher est le nouveau directeur artistique du Festival TransAmériques (FTA) et va se consacrer à faire grandir l’événement. Rencontre avec un homme comblé.

Il y eut de nombreuses candidatures et une quantité importante de postulants en provenance de l’étranger, mais le choix de Martin Faucher s’imposait comme une évidence. Celui qui seconde la fondatrice Marie-Hélène Falcon depuis plusieurs années était le candidat idéal en raison de sa connaissance intime du festival, mais aussi de son regard éclairé sur la scène internationale et de son réseau de contacts en Europe. Pour faire le pont entre les artistes d’ici et de ceux d’ailleurs, Martin Faucher n’aura pas son pareil.

Certes, il n’y aura pas de révolution. Le travail de Marie-Hélène Falcon, unanimement salué, doit être poursuivi: le FTA est en bonne santé artistique et c’est l’un des festivals les plus courageux en Amérique, qui ose prendre des risques et qui n’offre jamais de prémâché. Martin Faucher va continuer à labourer les terres défrichées par sa prédécesseure. Mais, dit-il, «contrairement à Marie-Hélène, je suis un praticien du théâtre, alors je vais être plus présent en salle de répétition pour accompagner les spectacles que le FTA va coproduire. J’ai envie d’être là pour questionner les projets, d’instaurer un dialogue actif avec les artistes. Le FTA, d’ailleurs, a besoin de davantage de moyens pour devenir un joueur important dans le réseau des coproductions internationales. Je vais militer activement pour que ce rêve devienne réalité».

Dialoguer avec les gouvernements et les organismes subventionnaires est d’ailleurs une habitude pour Martin Faucher, qui a longtemps présidé le Conseil québécois du théâtre. Il dit sentir de la part du gouvernement provincial une certaine ouverture et il ne tardera pas à solliciter une rencontre avec le ministère de la Culture et les conseils des arts.

«Je serai moins frontal que dans mon travail au CQT, confesse-t-il. Une approche trop agressive n’est pas toujours la meilleure manière d’être entendu. Le FTA est en santé, mais peu de gens le savent à Montréal et je veux surtout mettre le festival sur le radar, faire en sorte que les politiciens mesurent mieux son importance. Notre atelier artistique n’est pas assez pourvu et je vais leur faire savoir.»

Le FTA est notre porte ouverte sur le monde et l’une des rares occasions pour les Montréalais de tâter le pouls de la création internationale. Mais c’est un petit joueur quand on le compare à ses homologues européens. Faucher a pourtant l’intention d’accueillir, d’ici quelques années, certaines productions à grand déploiement que, trop souvent dans le passé, le festival a renoncé à inviter. Les œuvres récentes de Krzysztof Warlikowski, par exemple, ou le travail de Christoph Marthaler, que les Montréalais connaissent trop peu et qui est absolument incontournable. 

Mais le FTA n’a jamais été strictement eurocentriste et Faucher s’enthousiasme à l’idée d’aller explorer de nouvelles contrées. «Je veux, dit-il, fréquenter le Japon, la Corée du Sud, la Chine, où je suis persuadé que je vais découvrir des artistes inspirants. Je sais aussi qu’en danse, ça bouge beaucoup en Scandinavie. Il y a une très foisonnante scène de théâtre indépendant à Buenos Aires et je vais aussi fouiller davantage du côté des États-Unis, mais en dehors de New York, notamment sur la côte Ouest où il y a en ce moment des chorégraphes vraiment trippants.»

Étiquetté homme de théâtre, Martin Faucher sait que sa candidature va faire sourciller un peu le milieu de la danse, qui craint parfois d’être mal représenté au FTA. Mais ce serait mal connaître l’homme que de le considérer comme inapte à découvrir et accompagner les chorégraphes. Comme metteur en scène, même sans avoir intégré la danse à son travail, il dit avoir été de tout temps influencé par sa fréquentation assidue des créations chorégraphiques québécoises. «Tous mes chocs esthétiques sont en partie façonnés par la danse et il ne faudrait pas oublier que j’ai contribué à faire grandir la compagnie de Daniel Léveillé en présidant son conseil d’administration. Je me suis toujours inscrit dans le milieu de la danse en parallèle de mes activités au théâtre.»

L’autre grand défi? «Il faut indéniablement augmenter le nombre de spectateurs, répond Faucher. Je rêve aussi de créer, comme dans d’autres grands festivals, des mécanismes de dialogue plus soutenus avec le public. Une école du spectateur, par exemple, qui pourrait exister sous diverses formes, est une idée qui m’allume vraiment. Je veux plus de public, mais je veux un public critique et allumé.»