Florilège : Margie Gillis redanse des oeuvres de jeunesse
Scène

Florilège : Margie Gillis redanse des oeuvres de jeunesse

Margie Gillis a 60 ans. Pas question de s’arrêter de danser, mais la chorégraphe et soliste de renommée mondiale se prête volontiers à l’exercice de la rétrospective en revisitant des œuvres de jeunesse dans le spectacle Florilège, qui aligne cinq chorégraphies créées entre 1978 et 1997.

«Quand j’étais jeune, dit-elle, j’étais sauvage, j’avais plein d’énergie. Ma danse n’était pas raffinée, mais je l’assumais pleinement, j’adorais être dans une certaine brutalité. Plus tard je suis devenu plus sage, j’ai raffiné mes gestes, j’ai mieux compris les nuances de mes connections neuromusculaires. Mais c’est intéressant de revisiter aujourd’hui mes œuvres sauvages, alors que je considère avoir trouvé, à 60 ans, un certain équilibre énergétique.»

Non seulement la danse a traversé la vie et le corps de la danseuse, mais comme on peut le voir, elle est sensible à la mise en mots de son travail et à la réflexion sur les paysages du corps, tels qu’ils se meuvent et se transforment au fil du temps. Elle avait 27 ans en 1978 quand elle a créé Waltzing Matilda sur une musique de Tom Waits. C’est le premier des cinq solos offert aux spectateurs ces jours-ci à l’Agora de la danse dans le cadre de Montréal en lumière.

«À cette époque, se remémore-t-elle, Matilda c’était moi. Le personnage correspondait en tous points à mon histoire. Mais quand je l’ai réinterprétée plus tard, c’était comme si je me parlais à moi-même à quelques années d’intervalle et qu’il s’en dégageait une certaine sagesse. Je suis heureuse de revenir comme ça, à mes bases, de revenir au point de vue de ces personnages que j’ai créés dans la vingtaine et de leur offrir un corps plus âgé, de les entrevoir à travers le regard d’une femme plus expérimentée.»

Et comment le corps se remémore-t-il ces œuvres qu’il n’a pas dansé depuis fort longtemps? «C’est fascinant, dit-elle, mais tout me revient naturellement. Ça prouve ce que j’ai toujours su grâce à mon athlète de mère : la vie physique ne s’arrête pas à un certain âge et le corps doit demeurer au centre de nos vies même quand le corps change et que les niveaux d’énergie baissent. Ma tante et ma mère sont des jumelles, elles étaient dans la première équipe olympique de ski alpin du Canada, et elles ont fêté leurs 92 ans récemment, trois mois après avoir sauté en parachute pour la toute première fois de leurs vies.  Elles me donnent une formidable leçon de vie.

Dans Broken english, comme dans Little animal, Bloom et Voyage, Margie Gillis explore une gamme d’états de corps et de sentiments humains: elle a toujours été apte à traduire les nuances de la psyché humaine et à en révéler la puissance comme les lignes de faille. Puisant au plus profond d’elle-même pour ensuite créer des paysages mentaux et des séquences fortement imagées, elle irradie la scène d’une certaine douceur et porte une énergie sereine que les critiques, souvent, qualifient d’«envoûtement ».

L’occasion pour une nouvelle génération de découvrir une œuvre fondamentale de la danse contemporaine québécoise.