Grand Magasin : Pascale Martin et François Hiffler, les rois de la pensée décalée, sont en visite au Québec
Scène

Grand Magasin : Pascale Martin et François Hiffler, les rois de la pensée décalée, sont en visite au Québec

Ils n’ont pas de formation théâtrale et ils ne sont pas virtuoses, mais ils en sont fiers. Les créateurs décalés de la compagnie française Grand Magasin sont en ville avec Les rois du suspense, une réinvention loufoque du langage et un regard unique sur les communications humaines.

«Nous avons une connaissance très limitée des techniques de jeu d’acteur», rigolent  Pascale Murtin et François Hiffler, les deux têtes pensantes de la compagnie Grand Magasin. C’est cette indépendance par rapport aux dicktats et aux conventions du théâtre institutionnalisé qui les rend si vifs et si inventifs. Avec eux, pas de soumission aux codes d’un certain théâtre engoncé dans la tradition. Pas de rigidité vocale ni physique. Pas de recherche de virtuosité. Mais à travers leur approche de la scène comme territoire de tous les possibles, ils arrivent à renouveler leur regard sur le monde et à le voir comme une chose inusitée et passionnante. Le théâtre, pour eux, c’est un prétexte à acquérir et remettre en question le savoir.

Dans Les rois du suspense, leur questionnement sur l’humanité prend le chemin d’une réflexion sur les codes du spectacle. Le suspense existe-t-il au théâtre? Comment apprivoiser cette forme spontanée, fragile, mais pourtant réglée au quart de tour? «C’est un spectacle dans lequel on s’amuse à prévenir les spectateurs de tout ce qui va se produire, dit François Hiffler. Mais tout à coup interviennent des décalages subtils, qui ne vont tout de même pas faire flancher le spectacle. La surprise vient du fait qu’on fait exactement ce qu’on a annoncé alors que le spectateur s’attend à être surpris. Pour nous, c’est une manière d’étudier, en toute simplicité et dans l’amusement, les mécanismes du cerveau, des réactions humaines, des interactions, de l’interconnectivité.»

Une forme de théâtre neurologique, pourrait-on dire. Ils sont en quelque sorte les «cobayes de leurs propres expériences». «On est comme des scientifiques dont l’objet d’étude serait eux-mêmes, précise Pascale Murtin. Et on s’observe toujours avec une certaine naïveté, sans se prendre au sérieux.»

Au fil du spectacle, c’est aussi une observation des mécanismes du langage qui se déploie, mais surtout de l’incommunicabilité inhérente aux interactions humaines malgré la sophistication du langage. «On est très préoccupés par le fait que personne n’arrive jamais à se comprendre parce que les mots sont toujours profondément ambigus même si leurs significations ne cessent de se préciser et d’évoluer.»

On en sortira sans doute grandi.

Les rois du suspense fait escale à l’Usine C, à Montréal, du 5 au 7 mars 

Ils sont ensuite de la programmation du Printemps des poètes, à Québec, le 13 mars au Musée national des Beaux-Arts