Claude Poissant : La saison Poissant
Scène

Claude Poissant : La saison Poissant

Claude Poissant a surpris tout le monde en revenant cet automne à un texte romantique de Victor Hugo au Théâtre Denise-Pelletier. Mais l’hiver théâtral nous le montre de retour dans son élément: en train de mettre en lumière les meilleurs textes contemporains québécois.

Nommez un jeune auteur dramatique québécois dont l’écriture a été étonnante, inventive et lucide ces dernières années et demandez-vous si le metteur en scène Claude Poissant a contribué à le dévoiler. La réponse sera très certainement oui. Il a révélé l’écriture ciselée d’Étienne Lepage. Il avait été quelques années plus tôt l’accoucheur scénique d’une pièce de jeunesse de Fanny Britt, Honey pie, prélude d’une collaboration qui ne s’essouffle pas et dont on peut encore savourer les fruits dans Bienveillance, en tournée partout au Québec ces jours-ci. Pas étonnant que la mise en scène de Cinq visages pour Camille Brunelle, de Guillaume Corbeil, ait été aussi applaudie. Les ingrédients gagnants de la manière Poissant y sont tous réunis: un texte incisif et soigné, dans une mise en scène épurée mais réglée comme une horloge et traversée de traits ironiques. Et ce, avec une légère dose de symboles et une délicate mise en images, jamais placardées.

Peu de gens ont fait l’exercice de tisser des parallèles entre Bienveillance et Cinq visages pour Camille Brunelle, mais ceux qui profiteront de cette saison pour voir coup sur coup les deux spectacles remarqueront assurément des correspondances. Narcissisme, fausseté des interactions et identités incertaines sont au cœur des deux textes et témoignent en termes éloquents d’une humanité qui ne sait plus faire preuve de sincérité. Poissant est cohérent: son travail des dernières années tisse un chemin vers la compréhension et l’apprivoisement d’une identité morcelée, douloureuse, démultipliée.

Le thème est également au cœur du Dragonfly of Chicoutimi, de Larry Tremblay, qu’il a mis en scène en insistant sur l’universalité du texte. Il y a acculturation linguistique, certes, dans le Dragonfly, mais il y a surtout confusion identitaire et dépersonnalisation de soi. La pièce reprend l’affiche de l’Espace GO du 8 au 19 avril, au terme de ce qu’on pourrait appeler la saison Poissant: une saison de théâtre identitaire aux formes et aux résonnances multiples.