Serge Denoncourt / Cyrano de Bergerac : Si j'avais un tel nez!
Scène

Serge Denoncourt / Cyrano de Bergerac : Si j’avais un tel nez!

Cyrano de Bergerac, la pièce canonique d’Edmond Rostand, n’est à peu près jamais joué sur nos scènes. Voilà pourquoi Serge Denoncourt, qui redécouvre avec étonnement la puissance de ce texte, a décidé d’en faire une véritable fête théâtrale. 

Attention. Il y aura des costumes amples et un brin démesurés. Il y aura des scènes de combat avec cape et épée, sans retenue. Il y aura lyrisme, romance et alliage sans complexes de sublime et de grotesque. Aux yeux de Serge Denoncourt, Cyrano est une pièce totale qui commande une diversité de moyens scéniques et un climat festif et joueur. Pas question de dénaturer la pièce pour la tirer vers son penchant comique, peu importe que cette coproduction de Juste pour rire et du TNM prenne l’affiche au cœur chaud de l’été et de sa prétendue légèreté. Mais fête, il y aura. «En ce moment, en salle de répét’, dit le metteur en scène, on a 5 ans et demi. Patrice Robitaille est en liesse quand il prend les traits de Cyrano; il est comme un petit gars qui joue au chevalier. Moi, je suis comme un metteur en scène qui s’amuse avec des jouets: j’ai une grosse et belle distribution, j’essaie des effets pyrotechniques, on a du fun. Et ça va être un spectacle hyper-rassembleur.»

D’accord. Mais encore? Cyrano est un amoureux, un idéaliste. Et Denoncourt le suit au pas. «Rostand envoie un message très clair, dit-il. La vie ne suffit pas. L’art, comme supplément d’âme, est essentiel. Cyrano lutte pour une vie agrémentée de beauté, mais il lutte aussi contre l’ignorance. Je le trouve étonnamment proche de Blanche Dubois (Un tramway nommé désir), parce qu’il cherche à sublimer sa vie.» 

En préparant un grand spectacle populaire, le metteur en scène et sa distribution étoilée de 20 comédiens (notamment Magalie Lépine-Blondeau, Francois-Xavier Dufour, Éric Robidoux et Gabriel Sabourin) réfléchissent aussi à la laideur, sujet riche s’il en est un. Cyrano, avec son grand nez, n’aura peut-être jamais été aussi laid que ce que promet Denoncourt.

«On en fait quelqu’un de laid pour vrai. Une sorte d’oiseau indésirable, hideux. Certaines lectures font de Cyrano un homme qui se trouve laid sans vraiment l’être. Ce n’est pas mon parti pris: je voulais explorer à fond cette idée de la laideur profonde, que Roxane devra arriver à dépasser à la fin de la pièce. Les scènes d’amour en sont enrichies, et d’ailleurs je découvre que les scènes d’amour de Cyrano sont parmi les plus belles jamais écrites: je ne le savais pas. Honte à moi.»

La complicité entre Patrice Robitaille et Magalie Lépine-Blondeau, d’ailleurs, a mené la troupe à accentuer la romance et à faire pencher Cyrano du côté des grands récits d’amour plutôt que vers son style matamore, presque au rang de Roméo et Juliette. «Patrice et Magalie, c’est un grand choc pour moi, s’enthousiasme Denoncourt. Un couple électrique – quelque chose d’incroyable se passe entre eux  et pour cette raison, le couple Cyrano-Roxane prend dans cette mise en scène beaucoup plus d’importance que dans d’autres productions. C’est un grand texte romantique, à contre-courant du cynisme de notre époque, comme il était à contre-courant du naturalisme de son époque.»

Batailles à l’épée, numéros d’acteur, grandes scènes d’émotion, grandes scènes de romantisme et costumes majestueux évoluant vers de plus en plus de dépouillement: voilà qui promet de joyeux débordements.