Le gala des Cochons d’Or récompense le Théâtre de la Pire Espèce
C’était soir de fête hier aux Écuries. Cartes Prem1eres, le réseau regroupant les compagnies montréalaises de théâtre indépendant et les spectacles autoproduits, récompensait les artistes les plus méritants dans un Gala des Cochons d’Or bien plus sage qu’à l’habitude. Compte-rendu.
Jadis irrévérencieux et engagé, notamment lorsque les insolents Guillaume Girard et Francois Bernier étaient à sa barre, le Gala des Cochons d’Or s’est assagi cette année sous la gouverne de Mykalle Bielinski et Elkhanna Talbi. C’était une soirée à leur image, tout en rythmes électro et en prises de parole poétiques. Je suis de ceux qui applaudissaient très fort, jadis, l’irrévérence de ce gala. La soirée annuelle de Cartes Prem1eres a souvent permis l’expression d’une parole libre et d’une autocritique peu entendue dans le milieu théâtral. Dommage, quand même, de s’en être privé cette année. L’équipe du gala a voulu contrer une année d’austérité, notamment marquée par l’annulation de plusieurs spectacles, en optant pour un ton joyeux et solidaire. Ça se défend.
Les textes de Bielinski et Talbi, d’ailleurs, célébraient avec inventivité le travail de création théâtrale, avec une pointe d’humour bon enfant. Bonne idée également d’avoir invité le jury sur scène pour lui permettre de lire aux lauréats quelques mots élogieux au sujet de leur travail. Le moment le plus important de la soirée est d’ailleurs venu d’eux, alors qu’ils ont pris l’avant-scène d’assaut pour souligner la joie du milieu devant le renouvèlement de six directions artistiques à Montréal et Québec ces deux dernières années au sein de théâtres institutionnels importants. Applaudissant les nominations récentes de Sylvain Bélanger (Théâtre d’Aujourd’hui), Jasmine Catudal (Usine C), Anne-Marie Olivier (Trident), Geoffrey Gaquère (Espace Libre), Claude Poissant (Théâtre Denise-Pelletier) et Martin Faucher (Festival TransAmériques), les jurés ont pris soin de leur rappeler qu’il valait toutefois mieux ne pas considérer leurs nouveaux postes comme des positions à vie. Voilà qui était bien visé!
Petit bonhomme en papier carbone du Théâtre de la Pire Espèce s’est particulièrement distingué en raflant le Cochon d’or, le Cochon dramatique du meilleur texte (Francis Monty), le Cochon tapageur de la meilleure bande-son (Mathieu Doyon) et le Cochon plastique (Julie Vallée-Léger, récompensée pour ses deux créations scénographiques avec la Pire Espèce cette année, soit Petit bonhomme… et Villes).
Catherine Bourgeois (AVALe) et Philippe Cyr (Les cendres bleues) ont remporté ex æquo le Maître Cochon pour la meilleure mise en scène. AVALe cumulait également deux nominations (Plastique et Chiffon – Julie Emery), tandis que la pièce Les cendres bleues ajoute un deuxième prix à sa récolte, le Cochon intouchable décerné à Marie-Ève Pageau pour ses éclairages, ainsi que deux nominations (Or et Vedette – Jonathan Morier).
Soulignons aussi que ce gala est une rare occasion de mettre en valeur le travail des concepteurs de costumes, d’éclairages, ainsi que celui des scénographes et des concepteurs sonores. Les membres du jury ont honoré bellement le travail de leurs pairs concepteurs – faisant là un travail que la critique omet trop souvent parce qu’elle se concentre sur le travail des acteurs et des metteurs en scène. Au sujet, par exemple, du travail du perruquier Carol Gagné pour la pièce Dominion, le jury a dit: «Rares sont les perruquiers qui travaillent avec les compagnies Carte Prem1ères. Tu as accompli un travail impressionnant, coiffant chaque personnage de sa juste chevelure. Le ton, la nécessité, le savoir-faire capillaire épousaient dignement l’univers de Dominion.»
Le grand perdant de la soirée? Le Bureau de l’APA et son spectacle Les oiseaux mécaniques, qui méritait assurément le Néo Cochon (prix remis aux artistes ayant montré le plus d’audace et d’innovation dans leur création). C’est plutôt Félix Boisvert qui a été l’heureux lauréat pour sa pièce Concerto au sol (que je n’ai pas vue mais dont les échos ont effectivement été hautement favorables).
La liste complète des lauréats :
LE COCHON D’OR
Spectacle dont la force et l’originalité en ont fait un moment théâtral unique
Petit bonhomme en papier carbone, Théâtre de la pire espèce
Étaient également en nomination L’assassinat du président (Théâtre du futur) et Les cendres bleues (L’homme allumette)
LE MAÎTRE COCHON
Meilleure mise en scène
Catherine Bourgeois, AVALe, et Philippe Cyr, Les cendres bleues,
Était également en nomination Anne-Sophie Rouleau (Album de finissants),
LE COCHON DRAMATIQUE
Meilleur texte original écrit dans l’année
Francis Monty, Petit bonhomme en papier carbone
Étaient également en nomination Robin Aubert (Le chant de Meu) et Olivier Morin et Guillaume Tremblay (L’assassinat du président)
LE COCHON VEDETTE
Comédien s’étant distingué par la force de sa performance
Gabriel Szabo, PIG,
Étaient également en nomination Hubert Lemire (Lignedebus) et Jonathan Morier (Les cendres bleues)
LA COCHONNETTE VEDETTE
Comédienne s’étant distinguée par la force de sa performance
Marie Charlebois et Violette Chauvreau, PIG
Étaient également en nomination E nrica Boucher (La ménagerie de verre), et Raphaëlle Lalande (Descendance)
LES COCHONNAILES
Mention spéciale accordée à une réalisation inclassable
Album de finissants, Pirata théâtre et Matériaux composites, pour le maillage entre les acteurs, les élèves et la mise en scène
LE NOBLE COCHON
Pertinence sociale et sens de l’engagement qui méritent d’être soulignés
Audrey Talbot, pour son courage
LE COCHON LUMINEUX
Personnalité théâtrale ayant le plus inspiré la communauté
dans la dernière année
Les six institutions qui ont renouvelé leur direction artistique ainsi que les six artistes qui en prennent la barre.
Sylvain Bélanger, Théâtre d’aujou rd’hui
Anne-Marie Olivier, Trident
Jasmine Catudal, Usine c
Geoffrey Gaquère, Espace Libre
Martin Faucher, Festival Transamériques
Claude Poissant, Théâtre Denise-Pelletier
LE COCHON DU PEUPLE
Production ayant obtenu le plus de votes des abonnés Carte Prem1ères
Lignedebus (Théâtre i.n.k.) et PIG, (Abat-jour Théâtre)