Yannick De Martino / Zoofest : L’humoriste qui n’aimait pas l’humour
Il ramène sa dégaine désinvolte et sa drôle de présence pour livrer un humour rythmé et fragmentaire. Mais cette année au Zoofest, dans Mon coloc comédien m’a aidé avec la mise en scène, Yannick De Martino essaie de flirter avec le théâtre pour mieux bouder ses confrères humoristes!
Il a une énergie étrange, une nonchalance manifeste, un humour atypique et déconcertant qui lui attire un public décoincé qui en redemande. Yannick De Martino fait tout ça naturellement, sans trop calculer, restant tout simplement à l’écoute de sa singularité et de sa diction molle. Pas question de changer pour ressembler à quiconque, car de toute façon, il dit ne pas aimer beaucoup l’humour en général. C’est pour ça qu’il va essayer de faire un peu de théâtre cet été (de façon plus ou moins sérieuse, rassurez-vous). Ce sera périlleux, assurément.
«Ce spectacle, dit-il, c’est un pied de nez à l’humour ET au théâtre. J’arrive sur scène en disant que j’en ai marre de l’humour, parce que j’aime mon humour à moi mais pas celui des autres. L’idée de la mise en scène de théâtre, c’était juste de me donner une occasion de parler contre l’humour, contre les clichés véhiculés par les humoristes, mais en même temps, c’est une fausse mise en scène qui va aussi écorcher l’univers du théâtre en étant très exagérée et parodique. Un registre dans lequel, d’ailleurs, je ne suis pas très à l’aise moi-même, parce que la seule chose que je sais faire, c’est du stand-up.»
Mais qu’y a-t-il donc de si dérangeant dans l’humour de ses confrères? Les blagues désuètes sur les relations hommes-femmes? Les grivoiseries faciles? Yannick De Martino répond à la question avec son plus bel aplomb. «J’ai de la difficulté, explique-t-il, avec un humour qui veut trop plaire à tous et qui recherche strictement l’efficacité, et qui par là, manque cruellement d’originalité. Faut partir de soi et entraîner le public avec nous, en restant au plus près de sa singularité, pas le contraire. Trop souvent, on fait de l’humour simple et remâché, pour un public de simplets. Ça ne m’intéresse pas.»
Comme Katherine Levac et Fred Dubé, également à l’affiche de cette édition du Zoofest, De Martino veut résister aux sirènes de l’industrie de l’humour et à son consensualisme manifeste. Sommes-nous devant une génération d’humoristes dissidents? «En tout cas, dit-il, je pense qu’une grande partie de mon public n’est pas le public habituel des humoristes. Je pense que j’attire des gens qui, comme moi, ne se reconnaissent pas généralement dans l’humour typique québécois et ses jokes un peu grivoises. Je pense aussi que ma génération d’humoristes est en train d’installer de nouvelles formes, et ce n’est pas révolutionnaire de notre part, on fait juste refléter la composition de notre génération et sa diversité.»
Points de vue différents, regards obliques, angles de traitement décalés, conceptualisme et déconstruction: l’humour de Yannick De Martino ne ressemble à rien. Et malgré tout ça, on lui reconnaît un goût pour le stand-up classique à l’américaine, dans lequel une blague n’attend pas l’autre. «La différence, c’est que dans mon cas, je sais que les gens ne rient pas toujours à cause de mes blagues, mais qu’ils rient notamment beaucoup de mon oralité, de la manière dont je prononce certains mots…»
Il ratisse néanmoins très large et parlera autant dans ce spectacle du «malheur qui le pousse à monter sur scène» que des raisons de sa «haine du sport», tout en abordant les rapports entre santé et apparence physique et en glissant un mot sur l’humidité et la cigarette. Entre autres.
Du 15 juillet au 1er août aux Katacombes, dans le cadre du Zoofest zoofest.com