Trip à 4 et satisfaction générale : Ma première fois
Juste Pour Rire / Just for Laughs 2014

Trip à 4 et satisfaction générale : Ma première fois

Présenté dans le cadre du Festival Juste pour rire, Ma première fois révèle le sens comique particulièrement développé de quatre interprètes impeccables. 

Trente ans plus tôt, ce spectacle crû aurait fait scandale: du baiser langoureux de deux hommes au lesbianisme anecdotique de deux jeunes filles, en passant par des cunnilingus et des positions sexuelles simulées plutôt qu’insinuées, en allant au langage cru qui parle souvent de plaisir, parfois de douleur, très souvent de déceptions issues d’une première relation sexuelle maladroite, l’absence générale de tabou chez quatre comédiens en forme dans une salle décomplexée fait en sorte qu’on peut éviter un malaise ou un scandale moralisateur. Plutôt, on a droit à une messe hilarante de confessions sexuelles qui raconte avec brio les faux pas universels de nos premières rencontres. Hier, c’aurait fait scandale. Aujourd’hui, c’est une partie de plaisir.

Ma première fois, présenté dans le cadre du Festival Juste Pour Rire, c’est surtout quatre jeunes comédiens talentueux qui sont capables de captiver une foule hétéroclite du début à la fin d’un spectacle mis en scène par un Jasmin Roy efficace, imaginatif et divertissant, adaptant joyeusement la pièce du même nom de Ken Davenport, qui avait emprunté quelques-uns des 40 000 témoignages sur son site web myfirsttime.com pour en tirer une pièce de théâtre humaine et désopilante.

C’était la première fois que je voyais Roxanne Bourdages sur scène. J’ignore si c’est le hasard qui lui a donné des répliques plus savoureuses, mais chose certaine, c’était la grande séductrice de la soirée. Bien que personne n’ait vraiment quoique ce soit à se reprocher dans leurs performances respectives, Bourdages possède cette qualité innée qui fait que ce sur quoi elle décide de mettre l’emphase est ponctuée par un rire, gras, sincère et indéfectible, de la part d’un public immédiatement conquis.

Le public a d’ailleurs droit à un apercu assez impressionnant des talents respectifs des comédiens sur scène. En interprétant chacun des dizaines et des dizaines d’histoires racontées sur le site, certaines probablement adaptées à une sauce québécoise qui rend le spectacle d’autant plus intime, les quatre humoristes nous présentent différents personnages: la femme n’ayant jamais joui (Bourdages), le zozoteur vierge (Jonathan Roberge), l’idiot bien amanché (Martin Vachon, particulièrement en forme, autant dans son corps sculpté que dans sa présence scénique), mais surtout, la saguenéenne interprétée par Marie-Soleil Dion, une jeune fille qui décide de faire l’amour dans les toilettes exiguës et dangereuses d’un avion.

Ses quelques répliques sont livrées avec une telle justesse que ses plus mondaines paroles se traduisent immédiatement en hilarité générale. Telle est la force, en général, de nos quatre interprètes: en quelques secondes, ils établissent un ton immédiatement familier, et rapidement amusant.

Nous avons droit à quelques moments plus graves : inévitablement, un viol, raconté par Martin Vachon, et un autre, simultanément, par Jonathan Roberge. Une première expérience de protection maladroite racontée par Roxanne Bourdages. Quelques moments plus lourds viennent assombrir un portrait pour le rendre plus fidèle à la réalité de notre sexualité collective. Car bien que l’acte soit souvent ponctué de désir, il est parfois marqué de violence, et le tout est savamment ponctué par une mise en scène efficace et minimaliste et par des comédiens capables de changer de vitesse en un temps record.

Pendant la pièce, des écrans verticaux sont parfois utilisés pour habiller la scène, informer le spectateur ou le faire rire. À la fin du spectacle, les écrans invitent les spectateurs esseulés à tenter de trouver une âme sœur dans la foule, question de ne pas terminer la soirée seul. Mais c’est trop tard. Tout le monde était déjà séduit. Et les quatre grands séducteurs ne faisaient pas partie du public.

Ma première fois est présenté au Monument National le 11, 12 et 15 juillet (2014)

 

EN REPRISE:

Du 2 au 25 juillet 2015 à la Maison des arts de Laval
Du 27 au 29 août au Vieux Clocher de Magog