Le dîner de cons: Échappé belle
Le pire a été évité. Faisant le pari de jouer Le diner de cons, mythique pièce de Francis Weber, dans un parler québécois qui risquait de la dénaturer, la troupe réunie par Normand Chouinard au Théâtre Hector-Charland sauve les meubles grâce au rôle du con interprété avec beaucoup de panache par Marcel Leboeuf.
Popularisé par le film réalisé en 1998, Le diner de cons est indissociable du défunt acteur Jacques Villeret, qui a fait du personnage de Francois Pignon un rôle culte, aux répliques mythiques. Le premier danger pour quiconque désire désormais monter cette pièce est évidemment d’être hanté par le fantôme de Villeret sans savoir s’en dissocier, comme le seront les spectateurs qui mettront plusieurs minutes à s’habituer au nouveau visage.
La production de La meute et du Théâtre Hector-Charland évite ce premier écueil avec panache en recourant aux services de Marcel Leboeuf, un acteur largement sous-estimé, dont le timing comique et les innombrables facéties sont uniques en leur genre. Leboeuf non seulement ajoute une dimension physique au personnage en le tirant subtilement vers le burlesque, mais il sait donner à chacune de ses répliques leur juste rayonnement, en maîtrisant savamment le rythme et les inflexions pour maximiser leur effet.
Après la production du Théâtre Voix d’Accès qui a déridé le public de Québec et du Saguenay ces dernières années en restant très fidèle au texte et en respectant son essence très franco-française, cette nouvelle mise en scène du classique comique fait le pari d’une certaine québécitude. L’intérieur bourgeois dans lequel Pierre Brochant invite Pignon pour un apéro pré-diner de cons n’est pas situé à Paris mais bien à Montréal, et la langue qu’on y entend s’articule selon des inflexions bien québécoises.
Il y avait de quoi craindre le pire. Car ce texte est franchouillard jusqu’à la moelle et son succès repose en grande partie sur une répartie typiquement parisienne, de même que sur une cruauté des interactions, ou sur une tendance aux dialogues incisifs, qui n’ont pas vraiment leur égal dans la tradition comique québécoise. De fait, après une séquence vidéo en ouverture de spectacle (d’ailleurs plutôt inutile et boiteuse), les premières répliques de Pierre Brochant sont prononcées un peu mollement par un André Robitaille dont la diction, mi-normative mi-québécoise-outremontaise, peine à transmettre le mordant du texte, dont on ne peut savourer la texture comique à sa pleine valeur.
Mais dès l’entrée en scène de Marcel Leboeuf, secondé par une Myriam Leblanc juste assez caricaturale dans le rôle de la nymphomane Marlène Sasseur et par un Antoine Durand très en forme dans le rôle de l’ami Just Leblanc, le ton est rétabli et le rythme comique est assuré (d’autant que les entrées et sorties de ces trois-là rapprochent la pièce du vaudeville, ce qui est évidemment moins le cas dans le film-culte). Robitaille y retrouve aussitôt sa verve et se montre dès lors apte à un jeu physique plus preste – il faut dire, d’ailleurs, que ce rôle de faire-valoir comique est un peu ingrat. L’adaptation, qui ne se risque pas à trop manipuler le texte mais y fait de minces ajustements, est pertinente dans son ensemble et l’oreille s’y adapte rapidement. Échappé belle.
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Le dîner de cons est à l’affiche du Théâtre Hector-Charland, à l’Assomption, jusqu’au 23 août, avant d’entamer une tournée québécoise
On est pas sortie de notre lamentable état de colonisé encore en vigueur en 2014 lorsqu’un commentaire provenant de nos propres intellectuels Québécois concernant l’évaluation d’une pièce typiquement française reconstituant à la perfection d’une manière dérisoire l’ignominie des prétentieux de cette nation conquérante essaie de comparer notre culture de Québécois avec des personnages Québécois qui veulent faire admettre aux spectateurs Québécois qu’il se reconnaissent dans cette culture étrangère. Même en modifiant de font en comble et les personnages et la langue parlée, le fond de l’oeuvre écrite sous forme de pièce de théâtre demeure typiquement français de par la structure de l’écriture et n’a aucun rapport avec la culture Québécoise. Pourquoi agir ainsi si ne n’est pour prétendre que nous sommes des français même si nous ne le sommes pas? Cette prétention est typique des intellectuel Québécois soumis aux autres cultures plus arrogantes que la nôtre parce qu’elle exerce sur toutes les autres cultures leur vision décadente de l’humanité. Ce qui aurait agit en faveur de notre culture Québécoise ça aurait été de réinventer l’idée en prenant en dérision un con français installé à Montréal depuis peu. Ça aurait été rigolo et typiquement Québécois.
Donc
Michel
Mieux vaut rire des français?
Avez vous vu la production?
Très d’accord avec les propos de Michel, je reviens tout juste de la pièce jouée à Sherbrooke. J’ai du sortir avant la fin tellement, c’était pour moi décevant et ennuyeux. Dans la salle, oui ca a ri, mais en forcant (j’imagine ceux qui n’avaient pas vu l’original peut-etre).
Autrement, ca sonnait l’hybride incertain entre deux cultures complètement différentes, ca sonnait faux solide!!!! Disons que j’aurais du prévoir le coup, mais j’espérais tellement, ayant vu d’autres adaptations(amateures) qui m’ont amusée.
Enfin, je dois souligner que Marcel Leboeuf donne un max avec son texte. Il est solide dans son personage.
Toutefois et en terminant, je ne sais pas qui va se reconnaitre, ni un Francais, ni un Québécois ou autre , dans ce vaudeville bizarre, pas bien peaufiné.