iTMOi / Akram Khan : Stravinsky métissé
Scène

iTMOi / Akram Khan : Stravinsky métissé

Réécrivant Le sacre du printemps pour en faire une œuvre délibérément métissée et festive, le Britannique Akram Khan, habitué des scènes montréalaises, est en ville pour trois soirs avec le spectacle iTMOi.

Pour un chorégraphe, Stravinsky est à la fois un passage obligé et un géant intimidant, que certains hésitent à aborder de peur de ne pas être à sa hauteur. Akram Khan s’y risque parce qu’on l’y a invité, dans la foulée des célébrations du centième anniversaire de l’œuvre canonique. Mais pas question de chorégraphier à partir de la partition originale. Il a tout déconstruit pour en refaire du neuf: une œuvre inspirée du Sacre, mais absolument unique et portant très fort la signature Akram Khan. 

«J’ai demandé aux musiciens de créer complètement autre chose, explique-t-il dans la vidéo de making of du spectacle. On en a gardé la rythmique, la ponctuation, en quelque sorte la percussion originelle qui a inspiré ensuite avec les danseurs un certain travail des pieds, des sauts, une sorte de pulsation. Stravinsky, à travers sa musique, élabore une pensée, un mouvement. On a tenté, tout en inventant une nouvelle musique, de restituer ce mouvement originel, ce souffle. À partir de là, tout était permis: on a métissé Stravinsky en le faisant rencontrer des musiques folkloriques russes, des rythmes gipsys, des touches de flamenco.» 

Ça donne une grande pièce de groupe, dont le mouvement général est souvent impulsé par le piétinement, le saut, le frétillement: des ondes de choc qui parcourent entièrement le corps. Abordant la notion du sacrifice au féminin, la pièce est aussi esthétiquement léchée, avec des costumes soignés, hyper texturés, au confluent des époques.

«Le sacrifice de la femme le féminin sacrifié , qui est au centre du Sacre, est le moteur de notre création qui, vraiment, s’inspire autrement très lointainement de Stravinsky. Je suis passionné par l’aspect ritualisant de ce sacrifice, et la pièce flirte aussi avec l’idée du mariage, qui est une autre forme d’atteinte du sacré, une autre forme ritualisante associée fortement au féminin. C’est aussi, je pense, un spectacle sur la foi.» 

Sa danse a toujours été le reflet de sa personnalité de Londonien ouvert sur le monde, né dans une famille originaire du Bangladesh. Ici comme ailleurs dans son œuvre, il travaille le thème de l’identité. «Le sacre du printemps est une œuvre complexe et contradictoire, raconte (toujours dans le making of) la dramaturge Ruth Little. Akram se nourrit des contradictions de cette œuvre et des multiples facettes de ses personnages pour en faire une réflexion sur les masques sociaux que nous portons, sur les multiples versions de nous-mêmes que nous entretenons désormais dans nos interactions sociales. L’idée du masque est fondamentale dans iTMOi

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Le 28 octobre au Grand Théâtre de Québec

Les 30, 31 octobre et 1er novembre au Théâtre Maisonneuve, dans le cadre de la saison Danse Danse