Danse de garçons : Corps-à-corps viril
Scène

Danse de garçons : Corps-à-corps viril

 Sept mâles alpha: un danseur et six comédiens. Atypique, le spectacle orchestré par Karine Ledoyen a fait un tabac lors de l’avant-dernier Carrefour international de théâtre de Québec. Retour sur une chorégraphie sportive et introspective. 

Au moment d’écrire ces lignes, la reprise de Danse de garçons se prépare dans la salle bleue du Périscope, au sous-sol, et dans le cabotinage le plus complet. Autodérision et taquineries entre chums se retrouvent dans les répét’ qui sont aussi le théâtre d’énormités qui ne se retranscrivent pas. Un clash avec la tendresse presque charnelle qui unit les danseurs dans les vidéos publiées sur YouTube.


Un an et demi est passé depuis que Marie Gignac leur a donné sa bénédiction, c’est-à-dire le droit de se produire à la Salle Multi au printemps 2013 dans le cadre du festival dont elle assure la direction artistique. Le public a répondu à l’appel, les critiques se sont empressées de saluer l’audace de ces gars-là qui ne dansent pas d’habitude. «On est comme des enfants au début du langage, qui connaissent juste dix mots. L’intérêt, c’est pas de savoir quels mots on va faire. Ce qui est beau, je crois, c’est qu’on le fait malgré nos limites. Avec une certaine naïveté», analyse Jean-Michel Girouard.

Blessures, bleus, éraflures. Si les mouvements semblent couler de source chez les «vrais» interprètes en danse contemporaine, c’est précisément le contraire pour ParéPelletierRatioLaprise, et Girouard. Charles-Étienne Beaulne recense ses bobos: «J’ai eu des problèmes de poignets, une ecchymose énorme et surélevée sur le coude. Y’a quelque chose de guerrier dans ce spectacle. Si on a un bandage, on va le garder pendant le show.»

 

Coulé dans le rock

Au départ, les gars ne s’en cachent pas, la pièce était pas mal plus trash. Dans la première version présentée à Marie Gignac, ils dansaient sur la musique de Godspeed You! Black Emperor, se lançaient de la peinture et évoluaient sous des lumières rouges.

Ils sont même allés jusqu’à faire des expérimentations en étant complètement nus, un jour, comme ça, dans les locaux d’Ex Machina. «On n’avait plus de pudeur, après», explique Jocelyn Paré. Charles-Étienne en rajoute: «Mais ça nous a confirmé qu’on ne voulait pas faire ça, mais qu’on était prêts à aller loin. […] Le produit final a ces odeurs et ces saveurs-là. De la version rock, on a gardé les cris, le caucus qui rappelle celui du football ou du rugby.»

Résolument athlétique, le spectacle Danse de garçons tient de la performance sportive, du jeu d’équipe. La chorégraphe Karine Ledoyen a, d’ailleurs, le rôle ingrat de la coach exigeante. «On va jusqu’à l’épuisement. On ne le joue pas, on le vit. Il faut se servir de l’énergie de secours pour continuer.» Le seul danseur du groupe, Fabien Piché, a donc dû s’adapter, comme le raconte Jocelyn Paré. «Il disait qu’il devait apprendre à danser comme un non-danseur. Il a dû régresser, laisser la finesse de côté.»

Du 4 au 9 novembre au Théâtre Périscope (en coprésentation avec La Rotonde)

Du 18 au 20 février à l’Agora de la danse (Montréal)