Contes urbains 2014 : La métropole au féminin
Scène

Contes urbains 2014 : La métropole au féminin

Pour le vingtième anniversaire des Contes urbains à La Licorne, Brigitte Poupart assume le rôle de metteure en conte, rôle qui n’avait jamais été confié à une femme auparavant, et participe pour la première fois à cette désormais traditionnelle soirée à l’approche de Noël.

Des contes loufoques et festifs se lient à de sombres récits introspectifs où différents combats marquent le parcours de huit femmes ordinaires. Les conteuses Léa Simard, Martine Francke et Sandrine Bisson racontent avec force et émotion les difficultés qui peuvent ponctuer la vie d’une femme à tout moment, tandis que Dominique Quesnel illumine la scène sur l’histoire à la conclusion surprenante d’un homme qui offre des cadeaux offerts à ses proches qui se brisent inévitablement. Bien que la plupart des textes aient été écrits par des hommes (Yvan Bienvenue, Stéphane Lafleur, Marcel Pomerlo, Stéphane Jacques et Justin Laramée), la parole est laissée à des comédiennes de différentes générations et aux écrits de Christine Germain, Chantal Cadieux et Michelle Blanc.

Brigitte Poupart a imaginé une mise en scène minimaliste où le corps prend également parole, permettant de capter facilement l’énergie propre à chaque personnage des conteuses, chacune d’entre elles se faisant bercer d’une trame sonore discrète aux accents résolument cinématographiques. Il y a toutefois dans ce spectacle en continu des transitions faibles d’un conte à l’autre, aboutissant au rythme irrégulier de l’ensemble. La maladie, la solitude et le deuil sont certes des thèmes qui reviennent et aident à former un spectacle cohérent, mais cette idée de souligner à tout prix ce lien entre les contes ne semble pourtant pas nécessaire pour en saisir la filiation, déjà compréhensible par la musique de Jackie Gallant.

Le joyeux Noël de Sophie, de Stéphane Jacques, ouvre la soirée avec Diane Lavallée en Lavalloise ayant quitté depuis peu son tendre Plateau, exaspérée par ses jeunes voisins qui s’avèrent être de jeunes professionnels doublés de fêtards aguerris. Les images et références clichées au quartier ne manquent pas, mais font sourire par la candeur avec laquelle la comédienne raconte le quotidien de cette femme rangée qui perd totalement le contrôle.

Brigitte Poupart ne croit pas être snob par ses goûts raffinés, son penchant pour les beaux objets et son aide précieuse à améliorer le paysage d’Hochelaga-Maisonneuve, ou du moins c’est ce qu’elle en dit dans Snob? de Stéphane Lafleur. Un texte savoureux qui joue habilement sur les apparences et les clichés propres aux différents quartiers montréalais.

Michelle Blanc vient casser le sérieux des contes précédents avec sa propre histoire, racontée de façon lumineuse avec humour et tendresse, livrée en tout franchise, comme à une connaissance de longue date. Sa vision de la fête de Noël et sur les petites joies qui l’animent la mène à se livrer sur sa longue histoire avec son amoureuse, son vécu en tant que femme, sur ses frustrations antérieures et ses réflexions sur le bonheur.

Cocaline clôt parfaitement cette soirée multigénérationnelle au féminin où France Arbour, au paroxysme de l’ennui dans sa «maison de vieux», reçoit la visite du jeune et fougueux Tino, qui ravivera son désir et la mémoire de ses souvenirs charnels d’une époque révolue. Une histoire qui prend une tournure inusitée, ponctuée d’anecdotes grivoises et hilarantes, merveilleusement racontées par la comédienne. Un conte d’Yvan Bienvenue, dans la plus pure tradition, où on s’esclaffe sur ce texte surprenant et bien ficelé.

Les Contes urbains sont présentés à La Licorne jusqu’au 20 décembre, tandis qu’Urban tales aura lieu du 10 au 13 décembre au Théâtre Centaur.

Mise à jour 16 décembre : Contes Urbains comptera une supplémentaire le 20 décembre à 20h, en plus du spectacle prévu à 16h le jour même.