2014 / Top 3 Danse des spectacles internationaux vus à Montréal
Si la scène locale de danse contemporaine est effervescente et rayonnante, les spectateurs ont aussi la joie de fréquenter la scène européenne grâce au travail du FTA et de Danse Danse (notamment). Retour sur les plus belles visites de 2014.
Tragédie
D’Olivier Dubois (France) / Vu en mai au Théâtre Maisonneuve, une diffusion Danse Danse
Interprété par une vingtaine de danseurs en costume d’Adam qui défilent dans une intensité croissante jusqu’à la transe, Tragédie est un spectacle athlétique, tribal, dans lequel la nudité sert surtout à montrer le corps dans son intimité, en exposant le muscle au travail et la vulnérabilité du corps, sous une lumière blafarde. Le spectacle culmine dans une puissante communion des âmes, dans une ivresse incontrôlable qui a des relents mystiques. La chorégraphie d’Olivier Dubois, sur des musiques techno-rock de François Caffenne, évoque la grande marche de l’humanité vers son progrès ou son déclin, mais surtout sa traversée frénétique de l’existence dans une beauté plastique toute naturelle.
À relire : notre entrevue avec Olivier Dubois
Built to last
De Meg Stuart (Etats-Unis, Belgique) / Vu en mai à l’Usine C dans le cadre du FTA
Lauréate du Grand Prix de la danse de Montréal 2014, l’incontournable Meg Stuart, installée à Bruxelles, interroge la musique classique et l’histoire de la danse dans Built to Last. Aussi chorégraphiquement diversifiée que traversée par une délicieuse ironie au sujet d’une humanité désorientée, la pièce se déroule dans une rigolote scénographie reconstituant en carton-pâte le système solaire. Submergés par des planètes d’allure cubiques et rétro-futuristes, les danseurs apparaissent petits et inoffensifs, mais ils s’agitent et se démènent dans une gestuelle souvent mécanisée et désarticulée, ignorant leur insignifiance dans ce vaste univers. Meg Stuart revient ainsi à une danse collective qui cherche un espace de communion des âmes, mais elle en profite pour s’interroger sur l’histoire et le devenir de l’humanité.
À relire : notre entrevue avec Meg Stuart
Vollmond
De Pina Bausch (Allemagne) / Vu en novembre au Théâtre Maisonneuve, une diffusion Danse Danse
C’était une rare visite du Tanztheater Wuppertal de Pina Bausch, qui n’avait pas foulé les planches montréalaises depuis 30 ans. Certes, il fallut faire un difficile constat: l’esthétique singulière de la regrettée chorégraphe n’a pas si bien vieilli. Maintenant que de nombreux créateurs, ici comme en Europe, se sont inspirés de la mythique danse-théâtre de Pina et l’ont fait évoluée vers une plus grande complexité et l’ont inscrite dans des recherches et des propos plus radicaux, les morceaux les plus mimétiques et les plus narratifs de Vollmond paraissent bien inoffensifs, pour ne pas dire désespérément naïfs. Mais ce spectacle aura été un moment inoubliable dans la mémoire de nombreux spectateurs qui ont pu y mesurer la puissance d’évocation de cette danse très éloquente dans son regard sur le couple et sur les rapports entre les sexes. La scène finale, dans l’eau et dans le magnifique décor minéral, est un morceau d’anthologie qu’il faisait bon voir enfin de nos propres yeux.