Jean-Guy Legault / Javotte : L’amour au temps des broches
Le collectif Les Casseroles a approché Jean-Guy Legault afin que le metteur en scène adapte Javotte pour la scène, le corrosif mais sensible roman jeunesse de Simon Boulerice. Une adaptation qui visitera le conte de fées fantasmé d’une ado vengeresse et vulnérable.
La Javotte de cet antépisode contemporain du célèbre conte de Cendrillon est méchante, égocentrique, mal dans sa peau. L’adolescente au physique disgracieux fait tout pour se rapprocher de Luc Harvey (Marc-Antoine Larche), avec qui elle a l’ambition d’aller au bal de finissants. Que cela signifie d’user de moyens peu nobles pour y arriver ne la gêne pas. Mais aux racines de cette méchanceté opiniâtre, il y a l’accident de voiture qui a coûté la vie à son père. Javotte, en perte de repères, se confie à son journal intime et méprise ses semblables. Pour Jean-Guy Legault, les personnages adolescents des pièces de Boulerice possèdent souvent une lucidité et une franche capacité à réfléchir, mais se retrouvent quelque peu en marge de la masse.
«Ce sont souvent des personnages qui sont maladroits dans leur façon d’aborder les problèmes qui les atteignent. Ils ont une espèce d’approche autodestructrice qui est comme ça presque involontairement. Ils plongent naïvement dans une situation et, ultimement, c’est eux-mêmes qu’ils mettent en péril. Je trouve qu’il y a un peu de ça dans l’adolescence.»
Pour adapter le roman, le metteur en scène a conservé les personnages-clés de l’entourage restreint de l’ado, jouée par Gabrielle Côté. La plus belle fille de l’école, Carolanne (Lyne Lefort), fait obstacle à Javotte par son physique avantageux et son potentiel à intéresser Luc. Javotte, jalouse, se venge en séduisant Stéphane, le père de cette dernière (également joué par Marc-Antoine Larche). Il y a aussi Camille Harvey (Caroline Gendron), utilisée par Javotte pour se rapprocher de Luc et Anastasie, sœur cadette et souffre-douleur de Javotte (Valérie Dumas).
Le public aura droit au journal intime de Javotte et aux points de vue des personnages, qui seront aussi narrateurs. «Un monologue ne peut pas donner plusieurs divergences d’opinions. Il donne le récit et la perspective du personnage qui le raconte. Si c’était seulement un monologue, je ne pourrais pas montrer la contradiction de Javotte: je pourrais juste la montrer dans ce qui est dit sans en montrer le contrepoids.»
Jean-Guy Legault a donc cherché la bonne signature de spectacle pour différencier le réel du fantasme. «C’est un peu un spin-off de Cendrillon: on suit un autre des personnages et on suit sa déconstruction vers la méchanceté. Je l’ai établi dans un univers de conte qui n’est cependant pas joué comme un conte. Tout l’univers autour donne l’impression que c’est tiré d’un conte de fées. Elle vit dans son imagination, dans cet univers-là. Son univers est un conte, mais sa vie n’en est pas un. Ce clash-là entre ce qui est réel et ce qui est inventé, pour moi, devait être présent et c’était la façon de le montrer.»
Au Théâtre Denise-Pelletier du 25 mars au 11 avril