La chatte sur un toit brûlant / La Bordée : Les dialogues du vagin
Pour sa première mise en scène à La Bordée, Maxime Robin s’attaque à un classique de Tennessee Williams, un texte qui s’était vu récompensé du Prix Pulitzer de la meilleure œuvre dramatique en 1955.
On connaît déjà Maxime Robin, le grand blond désopilant naturellement porté vers les blagues grivoises livrées avec une diction et une posture quasi moliéresque. C’est aussi lui qui présente Les contes à passer le temps depuis quatre ans pendant l’avent, lui qui a coécrit Le NoShow qui a propulsé Alexandre Fecteau au rang d’étoile montante du théâtre québécois à l’extérieur des frontières de la ville. Aux côtés de sa complice Noémie O’Farrell, il nous a aussi fait cadeau de Viande (2012), Photosensibles (2014) et Iphigénie en auto (2012) entre les murs de Premier Acte.
Cette fois, il s’attaque à une pièce de répertoire et s’estime franchement gâté de pouvoir mettre en scène du théâtre états-unien. Une rareté, à Québec, si on fait abstraction d’Osage County qui a été présenté en mars 2014. «Pourtant, c’est un des théâtres les plus accessibles parce que c’est psychologique. Les gens s’identifient aux personnages, ils comprennent ce qu’ils vivent et ils le vivent avec eux. Et ça… ça fait du bien!»
Dans son adaptation de La chatte (un surnom qui vient avec son lot de jeux de mots dont on vous épargne!), Robin fait appel aux talents de Sophie Thibeault qui a notamment brillé dans La date en 2012. Un personnage qui lui a été confié au terme d’une exigeante séance d’auditions proposée par «son boss» Jacques Leblanc. «À Québec, c’est dur parce que c’est toute du monde que tu connais. Moi, j’ai trouvé ça super dur. […] Les Maggie, j’aurais pu faire six shows avec les six filles que j’ai eues. Elles étaient toutes extraordinaires, mais il y en a une qui a fait la différence.»
C’est toutefois autour du Brick, ce type qui refoule probablement son homosexualité, que la pièce s’articule. Jean-René Moisan reprend les traits de ce type énigmatique qui entretenait une relation «contre nature» et ambiguë avec un autre homme. «Tennessee Williams écrivait dans les années 1950, à une époque où c’était pas comme aujourd’hui. […] À la fin de sa vie, il se faisait reprocher de ne pas avoir été assez out there dans le temps. Il écrivait comme un peu à double sens. On sait pas si c’était un choix ou si c’était par obligation.»
Mais Maxime Robin est un artiste bien de son temps. Il ose pas mal plus que dans l’original ou dans le film avec Elizabeth Taylor. En plus de l’accent du Lac-Saint-Jean qui remplace celui du Mississippi, Moisan y goûte au rayon des costumes. «Y en a pas. Il porte un pyjama. On lui voit la graine. […] Mais c’est important! Faut générer du désir chez le spectateur, ça parle de ça, la pièce, t’sais. Tout le théâtre de Tennessee Williams c’est un désir refoulé. Tout le temps.»
Un ancêtre de Tom à la ferme?
Tennessee Williams aurait-il assis les bases pour le thriller rural de Michel Marc Bouchard? La question est légitime, selon le metteur en scène. «Y a quelque chose de ressemblant, mais c’est pas tellement pareil parce que dans Tom à la ferme, le gars était gai. C’était clair. Alors que là, c’est plus de savoir si ce personnage-là est gai ou pas. Et, si oui, s’il est capable de vivre avec.»
Qu’à cela ne tienne: c’est tout de même Marie-Renée Bourget Harvey qui a été affectée à la conception des décors, elle qui avait travaillé sur l’adaptation de ce texte à l’automne 2011, toujours à La Bordée. Une œuvre récemment portée à l’écran par Xavier Dolan.
Du 14 avril au 9 mai 2015
La Bordée