Zoofest / Mehdi Bousaidan : Le futile et l’essentiel
Mehdi Bousaidan veut vous faire réfléchir. Mais rassurez-vous, il veut aussi vous raconter de bonnes vieilles jokes au Zoofest.
Assisterions-nous depuis quelques années à une petite révolution dans le monde du rire au Québec? Alors qu’une étanche frontière divisait jusqu’à tout récemment les humoristes dits politiques comme Guy Nantel ou Les Zapartistes de leurs compères préférant puiser dans leur nombril leurs pépites comiques, une nouvelle génération de stand-up ambitionne de se mesurer à de grandes questions, sans forcément enfiler le pesant costume de l’engagement-poing-dans-les-airs. Influencés par certains de leurs homologues américains, les Adib Alkhalidey, Guillaume Wagner et autres Mariana Mazza élèvent de plus en plus leur je au-dessus du lol pour le lol. Ajoutons à cette liste Mehdi Bousaidan qui, pour une deuxième année, déballe 60 minutes de nouveau matériel sur la scène du Zoofest.
La chaise de chroniqueur qu’occupe le vingtenaire à l’émission La soirée est (encore) jeune et le rôle-titre qu’il tient dans la sitcom pour ados Med sur les ondes de Vrak dessinent les contours de ses ambitions créatives et professionnelles, qui pointent autant vers le ludisme que le sérieux. «Je préfère m’abreuver à l’actualité, aux enjeux politiques et aux phénomènes sociaux, que de raconter mes vacances», explique-t-il au sujet de son approche de la scène. «J’aime qu’une réflexion naisse chez le spectateur.»
Dans un des numéros qu’il trimballe sur les scènes des bars de la province depuis un moment, Bousaidan associe chacune des alarmes de réveil proposées par un iPhone à un type de personnalité, prétexte à des punch lines essentiellement potaches, mais aussi à des observations acérées sur le monde arabo-musulman.
«C’est un bon exemple, ça! J’essaie de prendre quelque chose du quotidien, que tout le monde peut comprendre, pour passer des messages. Disons que je dilue le message dans quelque chose de plus léger. Je ne veux pas que ce soit trop pipi-caca ni que ça sonne comme un discours du PQ. Et puis les messages passent mieux quand c’est subtil. Gueuler « Le gouvernement nous arnaque! », ce n’est plus de l’humour. Si tu gardes l’attention des gens avec de bonnes vieilles jokes, on dirait qu’ils sont plus disposés à entendre le reste.»
Des articles de merde et des vidéos de chats
«Je trouve que notre génération est beaucoup trop portée sur les conneries», balance Mehdi Bousaidan au sujet des angoisses et préoccupations qui innerveront son nouveau solo intitulé Mehdi Bousaidan Live 2. «Je travaille beaucoup sur la notion de culture. Les gens de mon âge consomment à 90% que du web. On n’arrive plus à faire la différence entre ce qui est intéressant et pas, à dire que c’est mieux de se remplir d’informations, de se renseigner, de regarder des documentaires plutôt que de lire des articles de merde et regarder des vidéos de chats.»
Cette analyse pour le moins sévère ne l’empêchera pas de participer à un spectacle dont la prémisse a toutes les allures de celle d’un article de BuzzFeed, Le Show 2000. Sous le joug d’une poussée de nostalgie précoce, une demi-douzaine de millennials se rappellera la période dorée comprise entre 1997 et 2004. «Dans ce show-là, je parle de musique techno, mais dans le Gala des refusés [aussi présenté pendant Zoofest], j’incarne un Congolais qui adresse ses doléances à l’Occident.» Quelque part entre le futile et l’essentiel, Mehdi Bousaidan plante son drapeau.
Mehdi Bousaidan Live 2, du 11 au 31 juillet au Studio Hydro-Québec du Monument-National.
Mehdi Bousaidan participe à plusieurs autres spectacles pendant Zoofest.
Tous les détails au www.zoofest.com.