José Navas / Rites : « Je veux danser jusqu'à 80 ans! »
Scène

José Navas / Rites : « Je veux danser jusqu’à 80 ans! »

Rites, le titre de la nouvelle pièce de José Navas, s’accorde avec « passages ». C’est une entrée dans la cinquantaine, un éloge au temps qui passe, à la lenteur. Une intrigante pièce en quatre actes qui allie butō, le Sacre du printemps et la musique Nina Simone. 

Le directeur général et artistique de la Compagnie Flak est l’un des rares chorégraphes établis qui dansent encore comme pour défendre ses idées avec son propre corps. L’artiste d’origine vénézuélienne, mais installé à Montréal depuis la moitié de sa vie, est accro à cet espèce de rituel de partage qu’est le spectacle. Impensable pour lui de jeter la serviette. « J’aime beaucoup l’expérience et le défi d’être sur scène comme soliste et j’adore chorégraphier. J’adore travailler avec des danseurs. C’est deux mondes difficiles à marier, mais il y a une beauté dans tout ça une fois qu’on trouve l’équilibre parce que les deux se complètent. Il y a des choses que je ne suis physiquement pas capable de faire, mais quand je travaille avec des interprètes, je peux traduire tous ces mouvements dans un corps plus jeune. »

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Vieillir, voilà un sujet que Navas aborde sans tabou ni fausse pudeur. C’est de ça qu’il a envie de parler avec Rites et aussi en entrevue. Un sujet concret, une réalité avec laquelle il doit apprendre à composer au quotidien. « C’est comme si, soudainement, ton ordinateur commençait à fonctionner à moitié, mais qu’il faut faire le même travail qu’avant. Je trouve ça important de dire qu’il y a une difficulté physique, qu’il y a de la douleur, qu’il y a des limites qui n’étaient pas là avant. […] Je veux montrer que c’est possible de chorégraphier pour un corps âgé sans essayer d’être jeune, sans forcer mon corps de danseur à être très musclé. Je pense qu’il y a une beauté dans cette façon de bouger à 50 ans et je suis sûr que c’est pareil à 60 ans et après. Moi, je me suis donné comme mission personnelle de chorégraphier ce corps qui change. » Louise Lecavalier et Margie Gillis le font déjà, certes, mais c’est la première fois à sa connaissance et la nôtre qu’un homme s’attaque à ce thème-là en danse. « Je pense que je suis le seul fou qui se lance encore avec un spectacle solo! J’aimerais continuer de façon régulière et sérieuse, j’espère que ce sera possible même si je deviens déficient au niveau de mon cerveau, atteint d’Alzheimer. Je m’imagine à 80 ans et je me dis que ce sera très intéressant. »

Concrètement, en matière de gestuelle, ça se traduit par beaucoup de mouvements de bras ou de mains et une interprétation accrue. « Avant, je dansais très vite, mais maintenant je prends mon temps. »

Contradictoirement, José Navas s’offre aussi une relecture du classique centenaire Le Sacre du printemps. Presque un passage obligé pour les chorégraphes contemporains ambitieux et de haut niveau. Pina Bausch a d’ailleurs le sien, idem pour Marie Chouinard. Si Navas a osé se lancer, c’est parce que le festival belge Chacun son sacre l’avait gracieusement invité en lui promettant la collaboration du Brussels Philharmonic. C’était en 2013 et il reprend cette création-là dans Rites. « J’ai toujours adoré le solo final de la version originale de Nijinski, celui d’une femme qui est condamnée à danser jusqu’à sa mort. C’est saccadé, c’est un peu malade et elle est toute seule au centre alors que le reste des danseurs sont autour d’elle. Il y a une grande force là-dedans. […] J’ai chorégraphié, si on veut, le rôle de l’élue pour moi en 35 minutes. »

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José Navas promet une fois de plus d’allier ballet et danse contemporaine, pointes et travail au sol. Sa marque de commerce. « Le ballet pour un danseur contemporain, c’est comme un musicien qui est capable de lire les partitions. C’est la base. »

 

11, 12, 13, 14, 18, 19, 20, 21, 25, 26, 27 et 28 novembre 2015
Cinquième Salle, Place des Arts
(Une invitation de Danse Danse)

À Québec: Les 30 novembre et 1er décembre 2016 au Théâtre La Bordée
(Une présentation de La Rotonde)