La foirée montréalaise : essais et erreurs
Scène

La foirée montréalaise : essais et erreurs

Pas facile de réinventer la formule des Contes urbains, veille de 20 ans, qui faisait jadis l’événement à La Licorne à l’aube de Noël. Le Théâtre Urbi et Orbi a le mérite de tenter quelque chose, La Foirée montréalaise, une soirée de contes et de variétés autour d’un arrondissement montréalais, mais la formule cherche son ton et son rythme.

Le concept? Une « soirée canadienne nouveau genre ». Chaque année, un nouvel arrondissement montréalais est à l’honneur et les talents qui en sont issus, ou qui y ont vécu, viennent prendre la parole, raconter une histoire, jouer une scène, chanter une chanson, et hop la vie. Mais dans ce genre de formule touche-à-tout, on risque le meilleur comme le pire et l’absence de cohésion entre les différents numéros et les différents interprètes peut faire baisser l’énergie à tout moment. Et le pire n’est pas toujours évité dans cette soirée mise en scène par Martin Desgagnés. Malgré les bonnes intentions, on finit par se perdre un peu dans cette Foirée montréalaise dans laquelle les histoires s’éloignent parfois franchement du sujet et parmi des performances inégales et des textes fluctuant en qualité comme en intérêt.

Alain Lamontagne / Crédit: Urbi et Orbi
Alain Lamontagne / Crédit: Urbi et Orbi

Pas de doute: il fait bon de voir sur cette scène des artistes moins connus du réseau théâtral, comme l’harmoniciste et conteur Alain Lamontagne, venu donner un vrai éclairage traditionnel québécois à cette soirée qui, ainsi, ne rechigne pas à un certain folklore. La beauté de la chose est que ce spectacle, s’inspirant du caractère très multiethnique de Saint-Laurent, n’hésite pas à faire valser ce traditionalisme québécois avec la voix du slameur d’origine haïtienne Franck Sylvestre ou à le faire résonner quelques minutes avant un récit d’enfance trash dans une école multiculturelle, où les personnages colorés font s’accorder (ou pas) leurs diverses origines.

Néanmoins, Lamontagne aura fait à sa tête et raconté une histoire que l’on suppose issue de son répertoire habituel et qui a finalement peu à voir avec Montréal et avec le quartier qui l’a vu naître. Sont d’ailleurs souvent négligées, au fil de ce spectacle, les textures urbaines qu’il promettait de déployer.

Dans le rôle d’un maître de cérémonie sorti d’une autre époque avec son look sophistiqué, Pascal Contamine tente de recoller les morceaux et d’ interagir avec la foule. Il fait du bon boulot : sympathique, chaleureux, rigolo quand il le faut. C’est à lui que revient finalement la tâche de parler de l’arrondissement – les autres le font peu. On apprécie son effort.

Joachim Tanguay / Crédit: Urbi et Orbi
Joachim Tanguay / Crédit: Urbi et Orbi

Se démarqueront, vers la fin du spectacle, les numéros des comédiens Joachim Tanguay et Mounia Zahzam, sur des textes de Simon Boudreault et Nathalie Doumar. Effluves de cégep et personnage rural pittoresque dans l’un, classe multiethnique et intimidation ordinaire dans l’autre. Dans les deux cas, on est soufflés par les performances d’acteur davantage que par les récits, certes rythmés et portés par une belle nostalgie.

Il y a donc quelques éléments féconds à cette foirée mais un sentiment généralisé de spectacle en recherche de lui-même, de son ton et de sa cohérence, peut-être aussi d’une direction plus affirmée. On reviendra voir l’an prochain si le chemin est mieux balisé.

Jusqu’au 19 décembre au Théâtre La Licorne