Cake : du sucré s'il-vous-plaît
Scène

Cake : du sucré s’il-vous-plaît

Une danse parodique et peut-être un peu salissante : c’est ce que propose Audrey Rochette avec son spectacle Cake, qui prend la cuisine comme prétexte pour parler d’un art qui sent de plus en plus la recette et la formule.

Sur scène, un acteur : Patrick R. Lacharité. Autour de lui : 6 danseuses. Il les manipule comme des ingrédients, les utilise comme des outils, en fait son réseau d’influences et de confluences.  Non, ce n’est pas une critique du patriarcat (quoique), mais bien la structure chorégraphique à travers laquelle Audrey Rochette représente un chef-cuisiner en pleine concoction d’un gâteau, avec excès de glaçage s’il-vous-plaît.

Audrey Rochette / Crédit: Charles F. Marquis
Audrey Rochette / Crédit: Charles F. Marquis

« On s’intéresse au concept de la recette, dit Audrey Rochette, mais on s’intéresse surtout à l’individu derrière la recette, c’est-à-dire en quelque sorte à l’artiste et son œuvre. Je m’intéresse au piège des formes spectaculaires sensationnalistes; à un parcours artistique dans lequel est recherché la singularité mais dans lequel, souvent, le contexte spectaculaire et les diktats du commerce pervertissent la démarche.  Les artistes ne savent pas toujours résister à la tentation d’intégrer des choses qui ont une valeur marchande dans leur oeuvre. Disons que ça m’inquiète. Même si je n’y échappe pas. »

Recherche du scandale, provocation gratuite, quête systématisée de la transgression : la scène contemporaine regorge d’exemples. « Quand une certaine radicalisation artistique se normalise ou se systématise simplement pour vendre des billets, je pense que c’est un problème. »

Patrick R. Lacharité et Joannie Douville / Crédit: Charles F. Marquis
Patrick R. Lacharité et Joannie Douville / Crédit: Charles F. Marquis

Spectacle ludique au possible, Cake est une œuvre intelligente mais « accessible ». Usant d’exagération ou d’une performativité salissante, à coups de farine saupoudrée ou de giclées de lait, la pièce explore la « luxure », la « dépendance » ou le « superflu ».

« C’est vraiment de la satire », précise la chorégraphe. « On a notamment regardé des infopubs de cuisine, pour en décortiquer les mécanismes de présentation et en reproduire les postures du corps. J’utilise les mécanismes que je dénonce en les incarnant dans mon langage chorégraphique. C’est donc une pièce qui se consomme facilement- qui a des allures légères»

Crédit: Charles F. Marquis
Crédit: Charles F. Marquis

La démarche, elle, est sérieuse. Cake est la première création d’Audrey Rochette mais cette diplômée de l’École de danse contemporaine, qui est aussi passée par le programme double de danse et de sciences humaines au Cégep de Drummondville, travaille depuis quelques années avec la compagnie La Grande Fente et avec Kondition pluriel. « Ça ne se verra pas dans ce spectacle, mais je suis aussi très influencée par le travail de Meg Stuart et Benoit Lachambre et je pense m’inscrire dans leur ligne de pensée. »

AU THÉÂTRE LA CHAPELLE JUSQU’AU 12 MARS 2016