Rita Lafontaine nous a quittés
Elle était de la première mouture des Belles-Soeurs en 1968 et sa brillante carrière d’actrice est restée associée à l’oeuvre de Michel Tremblay toute sa vie durant, notamment dans le rôle de Nana dans Encore une fois si vous permettez et Le paradis à la fin de vos jours, qu’elle jouait encore il n’y a pas si longtemps. Rita Lafontaine s’est éteinte à 76 ans à l’Hotel-Dieu de Montréal.
L’actrice née en 1939 à Trois-Rivières aurait succombé hier à des « complications de sa condition intestinale », selon la Presse Canadienne, qui a annoncé le décès ce matin.
Elle était presque indissociable de l’univers de Michel Tremblay, depuis la création légendaire des Belles-Soeurs en 1968 au Théâtre du Rideau Vert. En elle se cristallisait ainsi l’image de nombreux personnages iconiques du théâtre québécois. Comme le précise le Dictionnaire des artistes du théâtre québécois qui y voyait un « fait exceptionnel dans un parcours d’actrice », elle a été deux fois Manon, dans À toi pour toujours ta Marie-Lou (1971) et dans Damnée Manon, sacrée Sandra (1977). Mais elle a aussi incarné Albertine à deux reprises, d’abord l’Albertine de 40 ans dans Albertine en cinq temps à la création de la pièce en 1984, puis dans La maison suspendue (1990). Elle fut finalement Nana, personnage inspiré de la mère de Tremblay, dans les spectacles solo Encore une fois si vous permettez (créée en 1998 dans une mise en scène d’André Brassard) et Le paradis à la fin de vos jours (2008), un monologue carrément créé pour l’actrice, à l’image de nombreux rôles que le célèbre auteur dramatique a imaginé en pensant à son amie Rita Lafontaine.
Rappelons d’ailleurs que Duceppe s’apprête à mettre à l’affiche Encore une fois si vous permettez, du 6 avril au 14 mai, avec Guylaine Tremblay dans le rôle qu’a créé Rita Lafontaine.
Comédienne généreuse, capable de maîtriser de hautes émotions dans les rôles de femmes fortes dans l’adversité, elle a aussi joué le répertoire américain (notamment Tennessee Williams, Neil Simon et Arthur Miller). Elle a peu fréquenté le répertoire européen mais on compte dans sa théâtrographie un rôle dans La cerisaie, de Tchekhov, en 1983 dans une adaptation de Tremblay. Elle avait l’énergie et le culot propice aux rôles de femmes du peuple, dans une tonalité comi-tragique et dans un naturel désarmant. « Une actrice vraie », qui a « inventé le naturel et la vérité au théâtre », a dit le metteur en scène Yves Desgagnés à Radio-Canada.
Les téléspectateurs la connaissent pour les téléromans Cormoran, diffusé de 1990 à 1993, puis Le Retour, de 1996 à 2001, et Le monde de Charlotte, de 2000 à 2004. Au cinéma, elle a été d’une trentaine de films depuis Françoise Durocher waitress (1972), notamment L’homme de rêve, de Robert Ménard (1990), puis La grande séduction, de Ken Scott et Jean-François Pouliot (2000).
Elle était également pédagogue. Sous son initiative, le programme de certificat en Interprétation théâtrale a été créé en 2010 à l’Université du Québec à Trois-Rivières.