Adam Kinner: Fragilité à l'unisson
Scène

Adam Kinner: Fragilité à l’unisson

Il est saxophoniste et vous l’avez peut-être vu sur scène avec Suuns, Leif Vollebek ou les Barr Brothers. Mais Adam Kinner est aussi danseur contemporain et crée ces jours-ci avec sa complice Noémie Solomon le spectacle C’est par la fragilité que la révolution œuvre. Vulnérabilité, quête de l’autre, sexe, féminisme, torsion du genre : il y a tout ça dans ce solo qui n’en est pas vraiment un.

Il sera seul sur scène, mais cette pièce est en vérité un duo, nous explique Adam Kinner au bout du fil. «Noémie et moi l’avons construit ensemble et l’un des questionnements porte justement sur l’idée de manifester la présence de l’autre en soi. C’est un solo qui contient un corps mais deux présences, deux esprits, et même davantage. Je me place dans un état de corps qui m’invite à chercher les présences des autres et, je dirais même, les fantômes qui nous entourent. Quelque chose comme une hyper-vulnérabilité qui incite à une totale ouverture.»

Celui qui a décidé de poser un pied dans l’univers de la danse parce qu’il en aime «les nuances» et parce que c’est «une forme d’art très complète» raconte aussi qu’il se soucie particulièrement de la relation avec le public. «J’aime la qualité des spectateurs, le degré d’écoute, j’aime sentir que la pensée est en action parmi les spectateurs. C’est pour ça que mes spectacles, je pense, sont particulièrement orientés vers cette relation avec le public. Je ne suis pas du genre à demander aux spectateurs de participer mais j’aime soigner la relation.»

escalier

Il s’offrira donc entièrement à vous, public, laissant son corps baisser la garde et faire tomber l’armure. Évoluant dans un escalier qui tord son corps et le place en position de vertige, il crée un espace de dévoilement de l’intériorité et un lieu d’immersion. «Dans la fragilité du corps, dit-il, il y a aussi la notion d’imperméabilité. Je tente de me rendre disponible à la présence des autres, dans leur individualité comme dans le souffle collectif. Je tente de me rendre sensible au politique, au grondement de la cité. C’est une fragilité qui est finalement très joyeuse, très puissante.»

Réfléchissant à l’«intimité» mais pas à la «solitude», Kinner et Solomon cherchent une forme d’«intimité collective», quelque chose comme une «fragilité dans l’unisson».

Au milieu de cette quête, les pensées des auteures Kathy Acker et Paul Beatriz Preciado se tissent un chemin. La première est une féministe «pro-sexe», bien connue des milieux progressistes new yorkais pour ses romans déstructurés qui s’approprient plusieurs textes et qui emmêlent pornographie, prostitution et violence dans une tonalité décomplexée. «Elle dépasse certaines limites, dit Kinner, et c’est très libérateur.»

Preciado, elle, est une auteure queer qui prône l’abolition des différences entre les sexes et qui se déclare «garçon-fille». «Elle parle du corps, explique Kinner, mais graduellement sa réflexion se déplace, passant d’une intimité très physique jusqu’à des enjeux philosophiques, pornographiques, pharmaceutiques. C’est passionnant.»

Du 5 au 8 mai au Monument-National

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