Parfois la nuit, je ris tout seul : Périple poétique
Après un passage à Québec, les personnages créés par Michel-Maxime Legault et Marcel Pomerlo posent leurs valises à Montréal pour examiner les lieux et tenter de trouver réponses à leurs questionnements.
Présenté à l’automne à Premier Acte, à Québec, le spectacle Parfois la nuit, je ris tout seul varie en fonction du lieu: le duo y découvrait la scène, dépouillée, et en explorait ses recoins; au Quat’Sous, un parcours déambulatoire attend le spectateur. Les personnages nous invitent dans ce nouveau petit voyage en leur compagnie. «Ce sont des personnages qui veulent changer de vie, qui veulent connaitre d’autres existences. On s’est dit pourquoi ne pas faire un duo de deux gars qui sont à la fois amis, peut-être frères, père et fils, copain de voyages, amants, peu importe, et qui décident de partir pour essayer de trouver un sens à leur vie, trouver quelque chose dans un grand voyage en Amérique?»
Voyageurs en quête de vérité, de leur vérité, de sens à leur traversée de l’Amérique, c’est un certain malaise existentiel qui guide les personnages vers cette pulsion de voyager, de voir de nouveaux paysages, d’aller chercher réponse ailleurs. Quatre textes principaux de Jean-Paul Dubois, quelques segments provenant de nouvelles et romans ainsi que des extraits de son dernier roman, La Succession, paru en 2016, auront servi aux créateurs pour constituer Parfois la nuit, je ris tout seul. Chroniqueur pendant de nombreuses années au Nouvel Observateur, Dubois a réalisé plusieurs articles sur l’Amérique avec sa plume d’écrivain, son point de vue européen et ses observations très lucides sur le continent et ses habitants. Auteur fort apprécié chez l’un comme chez l’autre, c’est Michel-Maxime Legault qui s’est d’abord risqué à utiliser un des textes de l’auteur pour la scène. «Au départ, j’ai fait l’exercice avec des étudiants du cégep où j’ai monté des extraits de Parfois je ris tout seul qui donnaient un objet théâtral quand même unique. Je me suis dit que ce serait bien d’en faire un truc professionnel. J’ai parlé à Marcel car je voulais faire un solo par rapport à ça. C’est lui qui m’a apporté l’idée d’un duo de chanteurs, acteurs et danseurs qui déambulent dans l’espace et cherchent un sens à leur vie à travers des objets théâtraux laissés sur place. Je trouvais ça assez pertinent dans cette parole, surtout le rapport à l’autre qui était très important».
Parfois la nuit utilise comme trame narrative les thèmes et éléments récurrents dans les écrits de l’auteur français. «Il y a son narrateur Paul, l’objet d’amour, la femme, qui est Anna et qu’on personnifie, le lien avec le chien, les parents, la mort des parents, la mort de façon plus générale, le voyage, le road trip, la fuite: tout ça revient dans presque tous ses romans, explique Marcel Pomerlo. Ce n’est pas une histoire psychologique, mais il est très possible de suivre la traversée de ces deux personnages-là, de ce duo qu’on a créé. En fouillant dans l’œuvre de monsieur Dubois, ça nous a permis de faire nos choix mais aussi de saisir la teneur, l’émotion qu’il y a dans ses livres, et ensuite de nous donner une liberté». Chant et danse ne manqueront pas de faire partie du spectacle avec Marcel Pomerlo et Michel-Maxime Legault qui dansent le tango, chantent, s’installent au piano, en plus d’être accompagnés d’une trame musicale qui évoque l’Amérique avec Dolly Parton et Elvis Presley, entre autres, et autres surprises musicales plus près d’ici.
C’est en longeant les couloirs, en explorant le hall et la scène du Quat’Sous que le spectateur est convié à une soirée théâtrale inclassable d’après les écrits de Jean-Paul Dubois, auteur qui «analyse beaucoup à la manière de Charles Bukowski, qu’il aime beaucoup, et de Woody Allen» dont les auteurs espèrent amener les spectateurs à découvrir davantage à la sortie du théâtre. «Le lieu entier devient théâtre. Comme la vie humaine pour Jean-Paul Dubois est du théâtre: c’est à la fois désolant et fascinant. Dubois a un sens de l’observation très précis, une grande lucidité et une extrême sensibilité aux êtres et aux choses. Il évoque à partir de petits moments quelque chose de presque philosophique sur le lien et l’attachement à l’autre. Tout pourrait être utilisé comme lieu théâtral puisque la vie est là».
Au Quat’Sous
Du 24 avril au 4 mai 2017