La nuit du 4 au 5 de Rachel Graton: Mémoire et résilience
La comédienne Rachel Graton, vue dans Les Simone et Au secours de Béatrice, entre autres, troque le jeu pour l’écriture et entame sa résidence de deux ans au Centre du Théâtre d’Aujourd’hui avec une histoire d’agression qui est aussi un test de mémoire et de résilience.
La pièce n’avait pas pris l’affiche qu’on annonçait déjà des supplémentaires. Pas mal pour un premier texte de théâtre! La nuit du 4 au 5 a remporté le prix Gratien-Gélinas 2017 – décerné aux auteurs dramatiques francophones de la relève – en avril et voilà qu’il est déjà de la saison 2017-2018 du CTD’A. «Tout s’est fait en même temps, précise Rachel Graton au bout du fil. J’ai envoyé ma pièce au Centre des auteurs dramatiques (CEAD) il y a environ un an et demi, car je voulais être accompagnée dans le processus. Je n’étais pas encore membre et j’y voyais bien des avantages à l’être. En même temps, je l’avais envoyée au CTD’A. Je l’avais aussi fait lire à Claude Poissant, qui m’avait dirigée dans le passé. Tout s’est emboîté et j’ai eu le prix Gratien-Gélinas quand j’étais déjà programmée au CTD’A. Claude a embarqué en tant que metteur en scène avant même de savoir qu’on avait le prix et j’ai eu la résidence au CTD’A ensuite, en lui parlant d’un autre projet de pièce.»
L’histoire est celle des suites de l’agression d’une femme, dans la nuit du 4 au 5. Un choeur de voix – la jeune femme, les voisins, la mère, les ambulanciers – tente de reconstruire ce qui s’est passé. «Dans la forme, c’est séparé en tableaux. Ce n’est pas conventionnel où l’on suit un personnage du début à la fin. C’est cinq personnes qui apparaissent, disparaissent, qui se passent les rôles», indique l’auteure.
«Ce qui m’a inspiré ce sujet-là, c’est un événement que j’ai vécu qui est similaire – pas tout à fait comme dans la pièce par contre. Après, je me suis mise à me questionner sur les incidences d’un événement comme ça dans la vie de quelqu’un, poursuit-elle. J’ai été fascinée par le travail de la mémoire. Y’a une forme qui est apparue: une mémoire fragmentée. Je trouvais intéressante l’idée de travailler ainsi la forme d’un texte. Ensuite, un jour, j’ai vu un portrait-robot apparaître sur Facebook et j’étais fascinée par l’exercice de devoir reconstituer un visage alors qu’on vient de sortir d’un événement traumatisant où on ne se rappelle même pas de tout. Je me suis demandé: avons-nous besoin de se souvenir de tout pour s’affranchir d’un événement négatif?»
L’écriture de ce texte a-t-il été cathartique pour la jeune auteure et comédienne, puisqu’elle a elle-même vécu ce genre d’événement? «J’ai l’impression que j’avais déjà passé à travers, sinon, je ne crois pas que j’aurais pu le faire. Si je n’avais pas réglé certaines choses, j’aurais peut-être pas eu la capacité de la transposer. J’aurais voulu faire quelque chose de très «journal intime», personnel. Et c’était pas du tout ça que j’avais envie de faire. La création est un bon moteur de résilience en soi, mais j’avais déjà un bout de chemin de fait.»
La nuit du 4 au 5
Du 26 septembre au 20 octobre à la salle Jean-Claude-Germain du Théâtre d’Aujourd’hui