Xenos : Dernière danse
Scène

Xenos : Dernière danse

Akram Khan revient pour sa sixième visite à Danse Danse dans un ultime solo sur scène. L’artiste reconnu mondialement nous transporte encore une fois dans son univers singulier où scénographie, musique et savant mélange chorégraphique créent sous nos yeux une histoire poignante, en hommage aux soldats oubliés.

Dès les premiers instants, le spectacle nous livre la vie intime des origines indiennes du chorégraphe grâce aux chants traditionnels et à sa danse kathak. Les grelots (Ghungroo) et les mouvements du corps de l’artiste se meuvent sur une musique envoûtante et remplie d’Histoire.

Peu à peu dans la tourmente, le soliste perd ses repères. Et la corde apparaît. Symbole de prison et de solidité, cet élément de décor revient à plusieurs reprises et ne faillit pas à la force de l’homme. Il est temps pour lui de se battre, de se débattre et de ne pas faiblir. Dans une réalité imposée, dans cet enroulement à la guerre loin de son pays et de sa culture, peut-on vraiment rester libre de ses choix et maître de sa propre vie? Dans cette bataille perdue d’avance, il voit ses repères s’en aller et le laisser seul à son sort.

Le danseur nous livre toute son éloquence corporelle grâce à sa gestuelle hybride unique. Elle se veut animale lors de l’apprentissage de la guerre, loin des siens. Elle se veut rude et puissante pour continuer à lutter et à survivre. Et elle se vêtit de délicatesse et de subtilités pour montrer toutes les nuances de l’homme et toute sa sensibilité innée. Dans son fameux mélange de danse contemporaine et de kathak, l’artiste conte, avec ses mains précises et délicates, ses tours impressionnants et son corps expressif, une histoire.

Pour cette création, Akram Khan a choisi de s’entourer de musiciens d’exception. Pour magnifier ce désespoir guerrier cruel, les sonorités s’ajoutent et se taisent dans une alternance remarquable. Les moments suspendus renforcent les moments très sonores où la musique devient alors extrêmement poignante.

Comme à son habitude, Khan développe une scénographie surprenante. Pour Xenos, l’artiste change les décors et joue sur les matières, les bruits et les lumières. La scène dessine plusieurs niveaux et les tableaux jouent sur la profondeur et l’horizontalité du plateau. On passe d’un tracé chorégraphique très horizontal et strict à une dimension beaucoup plus sphérique et englobante pour découvrir toute l’immensité de ce récit.

Après l’apprentissage, la réalité et donc cette guerre, des noms sont dictés, les uns après les autres. De nombreux noms. De nombreux noms de morts. Et ce, sans fin. Les mots continuent de tomber, comme la terre sur les tombes et comme la mort sur l’Homme. Dans un ultime effort, l’artiste se retrouve seul. La fumée suit ses mouvements et laisse les traces d’une vie perdue. Accompagné par les violons sur un morceau plus classique et une lumière rouge intense, Khan s’enlise sous les décombres et nous dit adieu dans un ultime frisson.

Jusqu’au 16 février
Théâtre Maisonneuve