Vous vous demandez ce que fabriquent vos petites filles de 9 ans lorsqu’elles s’enferment dans le sous-sol ces derniers temps? Elles jouent à la poupée? Surfent sur le web? Du tout. Elle joue au sado-masochisme!
Depuis quelques semaines déjà, la chanson « S&M » ("sado-masochisme"), 4e extrait de l’album Loud lancé par l’Américaine Rihanna à la fin 2010, continue d’être en grande demande sur les ondes des radios FM. Une chanson hyper accrocheuse qui porte pourtant sur un thème inhabituel pour une pop star dont le public cible doit encore demander à ses parents d’aller les reconduire en voiture à la roulothèque.
Extrait des paroles de la chanson :
Feels so good being bad
There's no way I'm turning back
Now the pain is my pleasure cause nothing could measure
Cause I may be bad, but I'm perfectly good at it
Sex in the air, I don't care, I love the smell of it
Sticks and stones may break my bones
But chains and whips excite me
Autrement dit, lancez-moi des pierres et des bâtons. Ils peuvent bien me briser les os. Les chaînes et les fouets, eux, m’excitent!
L’hiver dernier, le lancement du clip de « S&M » a fait couler beaucoup d’encre. Montrant une Rihanna organisant une conférence de presse pour des journalistes ligotés et promenant un esclave en laisse avant de le faire uriner sur une borne-fontaine, la vidéo a finalement été bannie dans 11 pays, remontée pour diffusion sur MTV et accompagnée d’un avertissement « 18 ans et plus » sur YouTube.
Je n’ai rien contre un peu de crunchy version pop. De toute façon, Rihanna n’a rien inventé. Madonna a passé les années ’80 à titiller avec « Like a Virgin », « Papa don’t preach » ou « Human Nature ». Tout est plutôt dans la façon de présenter la dite chanson. Jusqu’à maintenant, je n’ai entendu aucun de nos animateurs radio québécois décortiquer un temps soit peu les propos de la chanson. Souvent présentée à l’heure du souper (heure de grande écoute où une station comme NRJ diffuse à la grandeur du Québec), la pièce de Rihanna est généralement dédiée à « Sophie qui est avec ses chums de filles » ou à « Marianne qui a eu une grosse journée à l’école primaire aujourd’hui et qui veut une bonne toune de party ». Autrement dit, un jeune public qui, bien souvent, ne comprend pas encore l’anglais et se contente de danser en baragouinant le texte de la chanson. Jamais entendu un seul animateur expliquer que la chanson déménage même si elle parle d’un sujet tabou et très, très adulte. Plutôt insensé de présenter une chanson pour jeunes adolescentes qui parle de sexe et de coups de la même façon qu’on présente une chanson de Nicolas Ciccone à Rythme FM ou une reprise de Sylvain Cossette à Rock Détente. Je rêve au jour où on présenterait le plus simplement du monde, un samedi après-midi, le nouveau tube de Marie-Mai qui parle d'amour anal ou une chanson de Simple Plan qui tourne autour de l'éjaculation faciale. "Et pour tous les jeunes en journée pédagogique qui en profitent pour sortir leurs vélos pour la première fois ce printemps, on vous envoie une chanson pour faire lever le party : "Rentres-moi les boules chinoises" de Lady Gaga!"
Mais bon. Ce doit être l’aube de la trentaine qui parle. Dans mon temps, les choses se seraient passées autrement…