Les droits des gais sur la planète : Un monde immonde
Société

Les droits des gais sur la planète : Un monde immonde

Selon Amnistie internationale, le bilan de la situation des gais et des lesbiennes à travers le monde est accablant. Quand la violation des droits des homos se confond avec celle des droits de l’homme. Survol d’une injustice universelle.

Les gais et les lesbiennes ont fait d’immenses progrès, ces dernières années, au Canada, dans la reconnaissance de leurs droits. Toutes les provinces ont déjà amendé leur loi, ou se sont engagées à le faire, comme l’Alberta après le récent jugement de la Cour suprême condamnant l’exclusion, par la province, des homosexuels de la protection des droits de la personne.

Tout n’est pas rose, évidemment. Mais ailleurs, c’est carrément rouge sang: discrimination systématique, détentions arbitraires, agressions, torture, assassinats. Un rapport publié l’an passé par la section britannique d’Amnistie internationale, intitulé Breaking the Silence, dressait le bilan, pays par pays, de la situation des droits des gais et lesbiennes à travers le monde. Accablant. Illégale dans la presque totalité des pays arabes ou sous influence musulmane, l’homosexualité est également criminelle sur presque tout le continent africain, ainsi que dans quelques pays d’Amérique latine, où la situation montre toutefois des signes de progrès. Les peines? De l’amende à l’exécution (répandue), en passant par toutes les ressources de l’intolérance: taule, prison à vie, coups de fouet, amputation des membres…

Au problème de la discrimination législative s’ajoute par ailleurs celui de la discrimination sociale. Dans plusieurs pays, l’homosexualité, bien que tolérée par la loi, est l’objet d’une dure répression de la part de la communauté. En Namibie par exemple, malgré certaines protections légales contenues dans le Code du travail, le président Nujoma déclarait récemment que «les homosexuels doivent être condamnés et rejetés de la société», ouvrant la porte à tous les excès. Quand l’ordre ne vient pas d’en haut, c’est trop souvent «les forces de l’ordre» qui s’en occupent. En Colombie, où l’homosexualité est permise, des escadrons de la mort, constitués en partie de policiers, assurent le «nettoyage social»…

«Notre rôle premier est d’exercer de la pression sur les gouvernements étrangers afin qu’ils éliminent la discrimination légale, explique John Tackaberry, porte-parole de la section canadienne d’Amnistie internationale, à Ottawa. Ensuite, de s’assurer que les mesures soient justement appliquées. L’écart entre les deux niveaux de réalité, la loi et la société, a tendance à diminuer, mais difficilement. Or, plus grand est cet écart, plus compliqué cela devient d’identifier les cas de discrimination.»

Tackaberry explique que les cas de violation des droits sont rapportés à AI par l’entremise d’agents de recherche internationaux, responsables de territoires désignés, et dont les sources sont inégalement informées ou conscientisées. Compte tenu de la culture de la peur – quand ce n’est pas de la honte – qui entoure l’homosexualité dans ces contrées, les victimes de répression n’ont pas toujours tendance à porter plainte.

«Depuis que nous faisons campagne spécifiquement sur cette question, nos contacts à l’étranger sont plus conscients du problème, poursuit Tackaberry. Une bonne part de notre travail en est un d’éducation et d’information. Pour porter plainte ou pour dénoncer une situation, il faut que les gens connaissent leurs droits.»

Prisonniers d’opinion
L’implication d’Aministie internationale dans la défense des droits des gais et lesbiennes ne date pas d’hier. En 1979, déjà, l’organisation fondée en 1961 décrétait que les personnes emprisonnées pour avoir défendu ou promu les droits des gais seraient considérées comme des prisonniers d’opinion. Il s’agissait, en somme, de défendre les défenseurs.

En 1991, AI décidait d’étendre sa protection – réservée jusque-là aux prisonniers d’opinion et aux victimes de la discrimination sexuelle, raciale, ethnique, religieuse et culturelle – directement aux homosexuels et aux travestis persécutés.

Tout récemment, la Section canadienne francophone d’AI, voulant souligner le cinquantième anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l’homme, a mis sur pied son Réseau de soutien des droits des gais et lesbiennes. Déjà les bénévoles ont pris en charge trois cas particuliers. Ceux des Brésiliens Pedro Montenegro et Marcelo Nascimento, menacés de mort pour avoir protesté contre les assassinats d’homosexuels; et celui de Tsitsi Tiripano, membre de la Gay and Lesbian Association of Zimbabwe, qui a fait l’objet de dénigrement et de menaces pour avoir tenu un stand à la foire du livre de Harare. La situation du Zimbabwe est d’ailleurs l’une des plus inquiétantes, compte tenu de l’homophobie déclarée du président Mugabe.

Dans tous les cas, qu’ils s’agisse de violences extrêmes ou de tracasseries bureaucratiques, la violation des droits des gais et lesbiennes se confond carrément avec celle des droits de l’homme. «La communauté gaie et lesbienne est peut-être plus fragile et plus vulnérable que d’autres en certains endroits. Mais nous prenons de plus en plus conscience, depuis quelques années, de l’universalité et de l’interdépendance des droits humains», affirme Tackaberry, qui explique que la seule protection valable réside dans la connaissance de ces droits, tels qu’énumérés dans la Déclaration, et dans une vigilance de tous les jours.

Le jeudi 30 juillet, dès 16 h 30, au parc Émilie-Gamelin (square Berri), Divers-Cité tiendra une journée d’information sur la question des droits des homosexuels à travers le monde, intitulée Réalités d’ici et d’ailleurs. On s’informe au 285-4011.