Une femme
Société

Une femme

C’était rue Saint-Hubert, en juin dernier. Les balcons fleurissaient, le soleil luisait, les arbres affichaient leurs belles parures. Une femme avançait discrètement, sur le trottoir, comme un fantôme. Nos regards se sont croisés. Le sien était presque aussi inhabité que le désert du Niger, qu’elle avait adoré, lors de son voyage là-bas, en 1969; le mien était rempli de ses nombreuses batailles, de ses chansons, de sa tendresse et de ses souvenirs.Cette rencontre avec Pauline Julien, la seule qu’il m’aura été donné de vivre, me hantera toujours. Son amour pour le Québec et pour Gérald Godin a été aussi fort que pour ses sours d’ici ou d’Afrique et que pour ces paroles d’Anne Sylvestre: «Je vous ai portés vivants / Je vous ai portés enfants / Dieu comme vous étiez lourds / Pesant votre poids d’amour».C’était une sorcière pas comme les autres. Un monument de joie, de larmes et de chair qui, comme l’Hadrien de Marguerite Yourcenar, «jusqu’au bout aura été humainement aimé».