Les entretiens de Mme B. : Et moi, et moi, et moi!
Société

Les entretiens de Mme B. : Et moi, et moi, et moi!

Si Denise Bombardier travaillait un peu moins fort à bâtir son propre mythe, elle laisserait peut-être au public l’oxygène nécessaire pour l’apprécier. En effet, quand elle ne parle pas d’elle-même (ce qui est rarissime), Mme B. peut parfois tenir des propos intéressants. Ainsi, dans un récent entretien avec le journaliste Pierre Maisonneuve, qui vient d’être publié aux éditions Novalis, Denise Bombardier parle, entre autres, de son passage à l’émission Le Point, à Radio-Canada. L’univers qu’elle décrit, macho et agressif, n’est pas sans rappeler le portrait brossé par une autre journaliste de Radio-Canada, Francine Bastien, dans son livre L’année des scorpions.

«J’ai vécu une année d’enfer, raconte Bombardier à Pierre Maisonneuve. […] J’ignorais cependant une chose: je serais traitée de façon grossière et brutale. […] Moi, quand on me traite de "ma câlice", il est évident que je me retire. Je suis incapable d’aller plus loin. […] On n’a pas idée du climat de grossièreté et de vulgarité, à la fois verbale et morale, dans lequel j’ai travaillé. […] Pour la première – et la dernière – fois de ma vie, pour tenir le coup, je buvais du beaujolais avant d’aller faire l’émission! Pour être capable de m’asseoir et d’animer, j’en avais besoin.»

Cela dit, Mme B. dit aussi de grosses niaiseries dans ce livre: «Aujourd’hui, les plus jeunes veulent faire de la télévision pour des raisons différentes de celles qui nous animaient à l’époque. Nous, nous ne voulions pas être là d’abord pour devenir des vedettes. Nous voulions être là parce que la télévision était un formidable instrument d’éducation.»
Méprisant? A peine…

Le mépris de Mme B. a atteint son paroxysme la semaine dernière à l’émission quotidienne Flash!, diffusée sur les ondes de TQS. Dans une entrevue de la reporter Marie-Louise Arsenault, on voit Denise Bombardier, debout dans son entrée de garage, l’air pressée, les clés d’auto à la main, répondant aux questions de son interlocutrice avec l’air de quelqu’un qui a un pâté chinois sur la corde à linge. Pourtant, Mme B. avait bel et bien promis à l’équipe de Flash! une entrevue d’une heure, à l’intérieur de la maison. Or, un rendez-vous de dernière minute aurait «forcé» Mme B. à quitter précipitamment sa demeure, transformant la rencontre prévue en entrevue à la sauvette, dehors, et ce, par un froid de canard.

Tout au long de l’entrevue, l’objectif de Marie-Louise Arsenault est clair: mettre Mme B. en face de ses contradictions. Les propos de Bombardier, sur le vedettariat à tout prix et l’information spectaculaire, étaient donc entrecoupés d’images la montrant en train de chanter chez Sonia Benezra ou encore, écrasant une tarte à la crème sur le visage d’un de ses invités, lui-même entarteur professionnel.

Le procédé est discutable: Marie-Louise Arsenault aurait très bien pu poser directement la question plutôt que d’utiliser le montage pour illustrer son propos; elle l’a d’ailleurs reconnu par la suite. De là à crier à la manipulation comme le fait Denise Bombardier, il y a une marge. Surtout que Mme B. a déjà induit ses téléspectateurs en erreur (en janvier 1993), en leur laissant croire qu’un de ses invités, un certain M. Étienne, était maculé de sang, alors qu’il s’agissait en fait de fraises et de tomates écrasées…

En fait, pour qu’il y ait eu manipulation, il aurait fallu que le ton de l’entrevue finale jure complètement avec le ton des questions de la reporter. Or, tout l’entretien entre les deux journalistes se déroule sur le ton de la confrontation. Un ton qui ne plaît d’ailleurs visiblement pas à Mme B., qui dégouline de condescendance tout au long de l’entrevue.

L’affaire a une suite. Le lendemain midi, dans une émission diffusée en direct sur TQS, on demande aux invités de se prononcer sur la question suivante: «A-t-on la télévision qu’on mérite?» Parmi les invités, Denise Bombardier, qui revient sur l’entrevue accordée à Flash!. Elle affirme que la journaliste n’a pas lu le livre avant de la rencontrer, et parle de ces jeunes «mal encadrés, qui ne sont pas allés à l’école longtemps, et qui se disent: "La Bombardier, on va lui appliquer sa méthode."».

Coup de théâtre: avertie par une collègue, Marie-Louise Arsenault débarque sur les lieux de l’émission (nous sommes en direct), et vient se défendre publiquement des accusations de Mme B., brandissant sa copie de livre annotée et répétant qu’elle voulait seulement confronter Mme B. à ses contradictions; ce à quoi celle-ci n’était visiblement pas préparée.

Morale de cette histoire? Oui, sans doute Marie-Louise Arsenault a-t-elle voulu «brasser la cage» de Denise Bombardier. En portant de tels jugements de valeur sur ses confrères plus jeunes, Mme B. devait s’y attendre. Cela dit, jamais au grand jamais Mme Bombardier n’aurait accueilli un journaliste d’une émission dite «sérieuse» de façon aussi cavalière. Ce qui confirme ce qu’on ressent déjà à la lecture de son livre: le mépris à l’endroit des plus jeunes, ainsi qu’un ego qui supporte mal qu’on ne se prosterne pas devant lui.

Pierre Falardeau
Parlant d’êtres bourrés de contradictions… Pierre Falardeau, qu’on a vu à plusieurs reprises faire le clown chez Julie Snyder, a commis une ouvre radiophonique sur la «gidounerie culturelle», qui sera présentée sur les ondes de la chaîne culturelle de Radio-Canada le dimanche 15 novembre, à 19 h 30 (100,7 FM).

Pierre Falardeau sera également interviewé par Benoît Dutrizac sur les personnages de losers qui hantent tous ses films, à l’émission Les Francs-tireurs, le mercredi 18 novembre, 21 h. Télé-Québec.

Télé-Science
Du 12 au 22 novembre, Montréal accueille le festival Télé-Science ainsi que le second Marché international du documentaire scientifique et éducatif de Montréal. A la télé, ça se traduit par un choix d’émissions à saveur scientifique comme par exemple une entrevue avec le professeur Luc Montagnier, découvreur du virus du sida, qui sera de passage chez Pierre Maisonneuve (jeudi 12 novembre, 21 h 30, RDI); ou encore Le Mystère de la baleine bleue, «le plus grand animal de tous les temps» (le dimanche 15 novembre, 18 h. Canal D). A surveiller.