La semaine dernière, dans un reportage diffusé à Enjeux, Luc Picard, Germain Houde et Raymond Cloutier disaient qu’ils en avaient ras le bol de jouer les pleutres et les mous. Nous avons donc demandé à FABIENNE LAROUCHE de leur écrire une mini-série virile. Voici, en primeur, le synopsis de cette production-choc: La Sueur du Kilimandjaro.
Écho-Vedettes titrait la semaine dernière: «Fabienne Larouche en colère!»
Non, je ne suis pas en colère, même si j’ai trouvé le dernier reportage d’Enjeux sur la place des hommes dans nos téléromans assez tendancieux, merci. Le reportage de Pierre Dupont frappait réellement au cour de mes préoccupations personnelles. L’attaque était vive. Les mots étaient crus. Les plans, choisis. Je me suis sentie visée, certes, mais surtout concernée par la problématique qui s’y développait.
Pourtant, après mûre réflexion, j’ai décidé de mettre de côté ma hargne utérine pour offrir à Luc Picard, Raymond Cloutier et Germain Houde un synopsis à leur mesure. Je leur en fais cadeau. Qu’ils se sentent libres de l’adapter à leur guise.
Ceci est une primeur.
La sueur du Kilimandjaro
Luc Picard est sergent dans les paras de l’armée québécoise. Dans les premières minutes de cette fiction à grand déploiement, Luc est parachuté dans la nuit noire tanzanienne, en compagnie de son collègue, le sous-lieutenant Houde, et du colonel Cloutier.
La mission est secrète et vise à sauver huit millions d’enfants Dumumbu, que le tyran Hamdula Dankaro menace d’exterminer. Le secret impose des effectifs réduits, raison pour laquelle ils ne sont que trois. Leur objectif: kidnapper Dankaro et le ramener devant un tribunal spécial des Nations unies. Juste avant le parachutage, une tension manifeste se lit sur le visage buriné des trois hommes. Dans une série de flash-back, nous les revoyons faire des adieux déchirants à leurs familles. L’un de ces plans, particulièrement émouvant, montre Luc Picard en habit de para, en train de réparer le train électrique de son fils, moment où il lui annonce qu’il doit partir. Fondu du bruit du train électrique sur celui de l’avion.
La suite des événements nous laisse voir la force mentale de ces hommes, leur loyauté, leur abnégation, leur courage. Dès les premiers moments de leur mission, les pépins se multiplient. Le colonel Cloutier voue une antipathie naturelle au sous-lieutenant Houde, mais lorsque le parachute de ce dernier ne s’ouvre pas, Cloutier plane jusqu’à lui pour l’attraper au vol et lui sauver la vie. Près d’eux, Luc Picard retient son émotion pour ne pas brouiller son esprit. Ses mâchoires se crispent et il ravale les larmes qui viendraient déranger sa concentration à un bien mauvais moment.
Ils atterrissent au milieu d’un régiment de soldats ennemis, les mettent en pièces après une lutte acharnée, et s’élancent vers le palais présidentiel. Cloutier, plus âgé, se tord un poignet en escaladant à mains nues la palissade du palais. Ne faisant ni une ni deux, Houde lui tend la main. A bout de force, leurs mains se frôlent, se touchent, s’agrippent. Houde attrape Cloutier au moment où il allait tomber, puis tend la main à Picard déjà sur la muraille. Picard coince son pied contre une dalle, et tire ses deux amis au sommet en se déchirant un biceps.
La suite est enlevante. Nos trois héros s’emparent de Dankaro dans son harem, alors que celui-ci s’apprêtait à violer une fillette de douze ans. Les femmes du harem tentent de séduire nos héros, mais ceux-ci résistent, conscients de la gravité du moment. La mission avant tout.
Les trois soldats s’élancent vers la piste présidentielle de Dankaro, prennent contrôle de son Airbus personnel et s’apprêtent à décoller. Mais, au dernier moment, Picard a des scrupules. Il pense aux enfants vulnérables. Il passe les commandes de l’Airbus à Cloutier. Un moment de grande intensité. Dans les yeux du colonel, on voit qu’il a tout compris et que, même s’il a envie de supplier Picard de ne pas mettre son plan à exécution, il s’en abstient, conscient de la grandeur de son impulsion. Picard saute pendant que le sous-lieutenant Houde fait subir une dégelée à Dankaro dans la soute de l’avion.
L’engin s’éloigne dans l’aube. Plan de Picard seul sur la piste. Petit dans l’immensité. En arrière-plan, le Kilimandjaro. Luc reprend ses esprits, s’élance vers les geôles du palais, contourne les nombreux barrages et libère les millions d’enfants séquestrés dans des conditions abominables.
La suite est un beau moment de cinéma. Où aller avec ces enfants pour les protéger, sinon au sommet du Kilimandjaro, lieu sacré entre tous, que les hommes de Dankaro n’oseront pas profaner? L’ascension est pénible, douloureuse. A quelques mètres du sommet, Luc a plusieurs enfants sur les épaules. Il est épuisé, à bout de forces, mais les enfants sont sauvés. Il s’éteint doucement, vidé par son héroïque ascension.
La main d’un jeune Tanzanien ferme les yeux de Luc pour qui sonne le glas. L’enfant ressemble au fils de Luc comme un frère jumeau, hormis la couleur de sa peau. Les enfants libérés jettent le corps de Picard dans le cratère du volcan, et Luc accède à la stature divine. Le film table habilement sur le symbole par l’association entre le volcan et la force virile.
Fondu enchaîné. Des funérailles d’État. Le premier ministre québécois et le chef d’état-major décorent Cloutier et Houde, puis le fils de Picard, à qui l’on remet la Médaille de bravoure méritée par son père. On comprend que l’enfant a l’étoffe de son géniteur quand il réprime ses larmes pendant que Houde lui roule des yeux tendres en le serrant contre lui.
Le premier ministre prononce un discours sur le dépassement de soi et sur la valeur de ces hommes qui sacrifient leur vie à l’idéal démocratique et au nom des valeurs les plus élevées qui soient. Le bruit du discours se fond sur celui des enfants dévalant le Kilimandjaro en criant le nom de Picard. Ils prennent d’assaut le palais et s’en emparent. On installe un totem à l’image de Picard, nouveau symbole de la puissance phallique galvanisée.
FIN
Je propose Spielberg comme producteur, et James Cameron comme réalisateur. Pour jouer le rôle de Dankara, Mike Tyson, ce qui ajoutera certainement à la valeur de l’exploit du kidnapping en frappant l’imaginaire du spectateur.
Et pour conclure, j’oserai glisser sur une coïncidence. En cette semaine du reportage d’Enjeux, je tombe sur une entrevue de Fabrice Luchini qui déclare que «dans un monde sans femmes, on serait à comparer nos attributs inutiles et à voir qui pisse le plus loin».
Fabrice Luchini, me direz-vous, est un mou.