Mi-juillet, au temps des festivals, les infirmières marquent une trève, les ambulanciers réfléchissent, les enseignants attendent le gouvernement au détour. Septembre sera chaud. Tout le monde, d’ailleurs, dans cette ville, ne parle que de météo.
«Il fait beau, il fait chaud, il fait froid, il pleut, tornade et canicule.» Voilà une ritournelle à ajouter au répertoire des concerts «beaux et ordinaires» de Michel Rivard et de Claude Dubois. Quelle paix en terrasse. La fusion des municipalités, on s’en fiche; l’abolition du plafond salarial des médecins, on l’oublie; la piastre américaine, on l’ignore; le dernier Renée Martel, on l’achète.
Endormi dans l’indolence des cigales, on lave son char, on barbote dans la piscine, on nettoie son entrée de garage…
Eh ben, non monsieur.
Depuis le 6 juillet, tous les beaux-frères de la ville portent un terrible deuil. Il est désormais interdit de laver son entrée de garage avec un boyau d’arrosage. Ce n’est pas tout. Le même règlement municipal prohibe l’utilisation de l’eau afin de produire de l’énergie. Moi qui voulais installer une roue à aubes dans ma cour.
Industries et citoyens confondus, le Québécois consomme 800 litres d’eau par jour, l’Ontarien 522, l’Allemand, fort économe, 150. Quand on sait qu’une grande partie de la consommation d’eau est attribuable à la chasse des chiottes, d’où viennent ces différences? De la légendaire constipation teutonne? Et les Ontariens, alors?
Il en coûte un milliard de dollars par année au Québec pour le traitement et la distribution des eaux. Cinq mille deux cents dollars par jour à Québec même.
En ces temps de festivals, ressortons le vieux slogan: «Économisez l’eau, buvez du vin.»
Un proche d’un de nos journalistes maison rapporte de voyage un paquet de Serijat (cigarettes) acheté chez les Serbes. Ce sont ces Dunhill bidon, ces fameuses Ronhill dont les Serbes ont douloureusement manqué durant la guerre.
Ces 20 cigarettes blêmes, emballées dans un chic paquet blanc et or (Nikotin 0,7 mg, Katran 8 mg), vous tendent le bout filtre et le petit cancer tranquilles comme n’importe quelle Camel, Winston, Players ou Export A. Loin des tubes à moitié pleins d’un mélange de paille et de sable qu’on fumait là-bas dans les années 80, la cigarette est d’une douceur étonnante. Heureusement, car dans ces pays du nouveau Tiers-Monde, où l’on se crache le poumon immodérément, comme une vieille actrice fanée des années 50, le cancer n’est qu’un signe du zodiaque.
Jadis, le degré d’évolution d’une société se mesurait inversement au taux de ses naissances. Il se mesure maintenant au nombre de ceux qui ne fument plus.
Saviez-vous que le tabac américain qui ne rencontre pas les normes gouvernementales canadiennes et américaines en matière de nicotine et de toxines est revendu en Amérique du Sud et en Europe de l’Est? Dix, vingt fois supérieur à la norme, son taux de nicotine offre l’avantage de créer des dépendances fulgurantes chez des milliers d’adolescents.
Consolons-nous. En Serbie, quelques mouvements de foule nous laissent croire que les choses changent. Ben tiens, oui, les Serbes conspuent leurs dirigeants. La nouvelle serait bonne s’ils n’étaient pas en colère simplement parce que Milosevic a abandonné le Kosovo. Faute de lui en vouloir d’avoir déclenché une guerre, ils vont le virer parce qu’il s’est rendu. On imagine à peine le connard – pire que l’autre – qu’ils vont bientôt mettre à sa place… pour ravoir des Ronhill faites avec du bon tabac de Virginie.