J’attends, ils attendent, nous attendons tous. Après qui, après quoi? Après Louise Harel, voyons, celle par qui le désastre arrive depuis un bout de temps.
La ministre des Affaires municipales devrait déposer son Livre blanc sur la fiscalité municipale d’un jour à l’autre. Ça fait un mois qu’on l’attend. Après un Livre vert, un Livre beige et tout le reste de la palette des couleurs. Après le rapport Bédard et le rapport Pichette… Si ça continue, on va manquer de patronymes québécois pour nommer les rapports sur «comment gouverner la région de Montréal».
Bref, on attend après Louise Harel. Si nous étions sarcastiques, nous dirions que Louise «Floyd» Harel nous fait subir le supplice de l’urgence d’hôpital. Nous sommes là, avec les symptômes d’une surgouvernite aiguë, souffrant dans l’attente d’une médecine qui n’arrive plus.
(La surgouvernite aiguë apparaît chez les populations où il y a pratiquement autant de chefs que d’Indiens. Cette promiscuité bousille le système immunitaire politique, qui n’arrête plus alors de se contredire. La maladie frappe avec plus d’intensité la région de Montréal, avec ses petites villes, ses grosses villes, ses MRC, ses conseils régionaux de ceci, ses agences métropolitaines de cela, ses sociétés de tout et de rien, chacun avec son propre ordre du jour.)
Nous attendons encore. Oh! Il y a bien eu des fuites du Livre blanc ici et là dans les quotidiens, nous donnant une petite idée de la direction que prendra la ministre Harel (c’est-à-dire: la création d’une nouvelle institution chapeautant les municipalités qui, elles, demeureraient à peu près tout aussi nombreuses qu’aujourd’hui, pour s’occuper de pas mal moins d’affaires. Un mal de tête avec ça?).
Mais avant de discuter de la teneur des fuites, il faut se méfier. Il s’agit peut-être là de tactiques de guerre, pour mieux lancer l’offensive plus tard. Voici ce que pourrait être la stratégie:
Première hypothèse: le ballon d’essai. Le ballon d’essai, envoyé grâce aux fuites dans les médias, est aux politiciens ce que le focus group est aux publicitaires: il leur permet de voir si le produit passerait la rampe avant de le lancer sur le marché. Dans le cas contraire, on l’adapte ou bien on le jette au profit d’un nouveau produit.
Deuxième hypothèse: l’appâtage. La ministre laisse couler l’information pour voir d’où viendront les coups de l’ennemi. Elle pourra viser plus juste quand viendra le temps de déclencher la grande offensive.
Troisième hypothèse: la déflation des attentes par la comparaison. La ministre laisse couler de fausses intentions abominables, sachant qu’elles créeront l’émoi. Puis elle présente sa vraie politique municipale, qui passe comme une solution géniale comparativement à la chose innommable qu’on croyait se faire imposer. C’est, si vous préférez, une sorte d’Exlax pour opinion publique.
Vive Bourque!
Mettons que les fuites soient vraies.
La ministre imposerait un quatrième ordre de gouvernement le Conseil métropolitain, situé entre la municipalité et l’État provincial. Les mauvaises langues disent même que le Conseil métropolitain serait le nouveau champ de bataille idéal pour les partis politiques provinciaux, en quête d’autres lieux pour en découdre sur la question nationale. Une nouvelle aventure pour le Bloc québécois?
Si c’est ce qu’on nous prépare, ce sera la catastrophe. Pour nous guérir de la surgouvernite, la ministre proposerait la création d’un gouvernement de plus! Le chaos total…
Finalement, seul Pierre Bourque tient un discours à peu près cohérent.
Non, non, je ne suis pas sur un trip d’ecstasy, et je n’ai pas encore l’âge de faire une surdose de millepertuis: Pierre Bourque tient bel et bien le discours le plus cohérent sur le sujet. Ce n’est peut-être pas la meilleure solution («Une île, une ville»), mais au moins, ça a le mérite de se tenir debout tout seul.
Bourque, le politicien le plus ordonné en ce moment? Le Québec est plus proche de la Russie qu’on ne le croit. Ne manquerait plus que le chef du gouvernement soit un ivrogne.
Et si ç’avait été Louise?
La réforme municipale, l’agrandissement du Palais des congrès, Emploi-Québec. Trois merdiers, un seul maître d’oeuvre: Louise Harel.
L’an dernier, nous étions prêts à nous laisser guider dans la félicité par n’importe quel berger, pourvu qu’il nous enlève des griffes du gros méchant loup qu’était Bourque. La rumeur voulait même que Louise Harel se porte candidate à la mairie.
On l’a échappé belle. Pour peu, la bergère nous aurait précipités en bas de la falaise avec elle. Le méchoui, je vous dis!