Société

Droit de cité : En route pour Kapuskasing

Il s’en passe des choses à l’hôtel de ville. Il y a de l’action. Du mouvement. De l’animation. Des péripéties. Pour peu, je m’exciterais, je dirais même que c’est dynamique, là-bas.

Mais demeurons calme. Disons seulement qu’il y a du remuement. Ce qui, dans le contexte d’un hôtel de ville, est déjà pas mal. Contentons-nous de peu, et nous aurons ce que nous voudrons, a déjà dit un sage.

D’abord, triste nouvelle puisque nous apprenions la semaine dernière le départ probable du conseiller municipal et membre du comité exécutif Saulie Sajdel.

Monsieur Sajdel, dont l’un des hauts faits d’armes aura été de se porter à la défense de la cote de crédit des frères Reichman – auteurs de nombreux classiques de la banqueroute, comme celle d’Olympia & York (vingt milliards de dollars) – et de leur godziléen Technodôme dans le Vieux-Montréal, nous quitterait pour la brousse, en l’occurrence Ottawa. Pour vous situer, Ottawa est localisée sur la route de Kapuskasing. C’est tout dire.

Et qui plus est, monsieur Sajdel vise rien de moins que le Panthéon des conditions minimales de travail qu’est le Parlement canadien. Soixante-dix mille dollars de salaire; vingt-cinq mille dollars de frais de survivance; fonds de pension à vie après huit ans d’ancienneté; tunnel chauffé et gymnase gratuit, masseuses incluses.

On aura vite compris que l’intérêt de Sajdel pour le poste vacant de député fédéral de Mont-Royal n’est pas une question d’argent, mais de sens civique. Député fédéral, ça n’a pas beaucoup de chèques-appeal, vous en conviendrez.

Si monsieur Sajdel est choisi à l’investiture libérale, il aura à se frotter à de rudes adversaires dans cette circonscription tenue par les libéraux depuis les dernières croisades iroquoiennes sur Hochelaga, en 1421. Autant dire que ce n’est pas du tout cuit.

Tous ces risques, moins d’un an après avoir été élu par les votants de son district municipal… Mais pourquoi risquer si gros quand on a si peu? Si la bravoure pour le bien public doit porter un nom, je propose celui de monsieur Sajdel.

Nous déplorons tous le départ de ce considérable cabot de l’hôtel de ville, mais il faut en revenir, et se poser les vraies questions, comme: on devrait pas leur faire signer des contrats, à ces gens-là? Une fois tous les quatre ans, nous nous dépensons sans compter (et nous dépensons sans compter) pour mettre en place des gens. Nous leur offrons notre confiance aveugle, pour avoir la paix pendant quatre ans. Or, six mois plus tard, ils nous désertent pour un plus offrant, sans avoir commencé la job ici.

C’est quoi, ces manières? De la putasserie? De l’arrivisme? On devrait exiger le remboursement du salaire de monsieur Sajdel, de même que des frais encourus pour son élection en novembre dernier.

Parce que vous et moi, quand on crisse la job là sans l’avoir terminée, on n’est pas payés. On risque même d’être poursuivis pour bris de contrat.

Mr. Fix-it
Autre preuve qu’il y a de l’action derrière le Champ-de-Mars, c’est la nomination de Guy Coulombe au poste de directeur général de la Ville de Montréal.

Les Anglais de The Gazette appellent Guy Coulombe Mr. Fix-it. Quand Hydro-Québec est administrée comme une société d’État soviétique du temps de Gorbatchev, c’est lui qu’on appelle. Quand la Sûreté du Québec est dirigée comme un club de hockey de Montréal, on s’en remet encore à Guy Coulombe. Bref, quand le moteur claque des valves, c’est chez Guy Coulombe qu’on va, un administrateur chevronné, une main de fer dans un gant d’acier trempé, serti de studs. L’ami Jean Perron, ex-entraîneur du Canadien et grand orateur de la Sainte Flanelle, dit même de lui qu’il n’y va pas avec le dos de la main morte pour faire le ménage dans une maison désordonnée.

Mr. Fix-it est le nettoyeur attitré du gouvernement québécois. C’est son poste. Alors, comme les choses ne vont pas très bien dans le protectorat de Montréal, l’opposition voit dans sa nomination la preuve ipso facto que Montréal est sous tutelle. Ce que Pierre Bourque, on le comprendra, a nié.

Comme a déjà dit l’autre: «If it ain’t broke, dont fix it.» Alors, pourquoi Mr. Fix-it est-il à Montréal, dans ce cas?

Louise attaque (2)
Louise Harel est enfin sortie de sa tanière, lors d’un très rare point de presse, vendredi. Et elle n’a pas vu son ombre! Alors elle est retournée dans son trou pour les quatre prochains mois, minimum.

Ainsi, nous avons obtenu réponses à nos questions. Je vous disais la semaine dernière que le temps que mettait Louise Harel à accoucher publiquement de sa nouvelle politique municipale, pendant que les fuites se multipliaient dans les médias, laissait présager trois astuces ministérielles pour mieux nous enfirouaper.
Eh bien, je me suis trompé, ce n’était rien de tout ça. Le fameux Livre blanc de la fiscalité municipale n’était qu’un exercice de macramé que la ministre effectuait dans ses temps libres. «Non, non, c’était juste un document de travail destiné à la déchiqueteuse», a dit Louise, avec une voix de mezzo-soprano. Autrement dit, pas très convaincante.

On n’y avait pas pensé, à celle-là. À mettre au registre des meilleures excuses.