Société

Publicité sur mesure : Vous n’avez rien vu!

Pubs animées dans les toilettes, pubs-spectacles dans les supermarchés, placement de produits dans les livres: la pub veut votre bien, et elle l’aura. Coûte que coûte.

Si vous êtes allé dans un bar récemment, vous avez peut-être été exposé à la toute dernière initiative dans le domaine publicitaire. Il s’agit de panneaux interactifs munis de senseurs accrochés près des lavabos ou au-dessus des urinoirs. Lorsque vous approchez, une publicité se met en marche. Elle cesse dès que vous vous éloignez. Même plus moyen de faire pipi en paix… Les publicitaires, eux, crient au génie.

En fait, le monde publicitaire est enchanté par les plus récents développements technologiques. Grâce aux techniques mises au point dans le domaine numérique, le placement de produit est devenu un jeu d’enfant.

Dans l’édition de juin du magazine Brill’s Content, le journaliste Eric Effron donne l’exemple de la série Seven Days (diffusée sur la chaîne câblée UPN), dans laquelle on a placé des publicités de Coca-Cola et de Kenneth Cole, une fois l’émission enregistrée. Pas besoin de s’appeler George Orwell pour prévoir que d’ici quelques années, on pourra vous envoyer une émission où toutes les publicités seront ciblées selon votre profil socio-économique. Pendant que les téléspectateurs d’Outremont verront des pubs de BMW, ceux de Pointe-Saint-Charles recevront des pubs de… la STCUM.

Cette approche existe déjà sur le Web. L’entreprise Adaboy, qui ne se gêne pas pour placer des publicités dans les forums et les groupes de discussion, insère également des pubs sur les sites de jeux interactifs. Chaque pub est adaptée au profil du participant: un jeune sera exposé à une pub de boisson gazeuse, alors qu’on enverra une pub d’automobile au joueur dans la trentaine.

Autre exemple de publicité virtuelle: imaginez un amateur de base-ball qui profiterait de la pause publicitaire pour aller fouiller dans le frigo. Les annonceurs ont prévu le coup. Pour rejoindre les téléspectateurs qui ont MANQUÉ la pub, on ajoute des publicités numériques sur la clôture qui entoure le terrain. Cette pub n’est visible qu’à la télévision, les spectateurs assis dans le stade ne peuvnt pas la voir. Ce n’est que le début. Désormais, tout est possible. La seule limite: l’imagination des publicitaires.

Pubs en direct
Pendant que certains publicitaires ne jurent que par les nouvelles technologies, d’autres reviennent aux origines de la performance et proposent des publicités «en chair et en os».

La semaine dernière, dans une grande surface de l’île de Montréal, une troupe de quatre comédiens a donné le coup d’envoi à la tournée Cheers liquide. Ce n’est pas une blague. Tout au long de l’été, dans les supermarchés qui accepteront le concept, on pourra voir des pubs en direct vantant les mérites du détergent Cheers, un produit qui «aime vos vêtements autant que vous».

Le concept se situe un cran au-dessus de la madame qui interpelle les clients pour leur faire goûter un nouveau fromage ou une petite saucisse La belle fermière.
Les quatre comédiens font semblant de faire leurs courses. Quand ils voient qu’il y a assez de clients autour d’eux, ils commencent leur numéro. Impossible de zapper cette publicité. La seule façon de l’éviter est de changer d’allée. Ou d’attendre patiemment que la troupe termine sa petite prestation. Après tout, deux minutes, ce n’est pas long. Le problème, c’est que les comédiens passent environ quatre heures dans un commerce. Si quelqu’un prend plus d’une demi-heure pour faire son épicerie, il risque de croiser la troupe Cheers plusieurs fois. La première fois, c’est drôle; mais quelle sera la réaction d’un client après s’être fait chanter les mérites de la lessive Cheers quatre fois en l’espace de trente minutes? Les comédiens ont-ils suivi un cours d’autodéfense?

La tournée Cheers devrait débuter cet été. Pour l’instant, l’agence en charge des relations de presse pour Proctor & Gamble n’était pas en mesure de nous fournir le nom d’au moins une épicerie ayant accepté le concept. Si vous voulez visionner la publicité, rendez-vous à l’adresse suivante: http://micro.newswire.ca/cheer"

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Publicité en direct, publicité dans les toilettes… Et quoi encore?

Aux États-Unis, un écrivain du nom de Bill Fitzhugh a trouvé une idée géniale pour faire parler de son livre (la preuve que ça fonctionne…): il a prêté sa prose au placement de produit.

Dans son roman Cross Dressing, qui raconte de façon satirique les dessous de l’industrie de la publicité (comme c’est original!), un des personnages boit du scotch.

L’auteur a donc approché la distillerie Seagram, lui proposant de préciser que le scotch serait de marque Glenlivet, un de leurs produits. Ce que Seagram, propriétaire de Universal Pictures, la compagnie qui a acheté les droits cinématographiques de Cross Dressing, a tout de suite accepté. Prenant tout de même soin de vérifier que le buveur de scotch en question n’était pas un violeur d’enfants. Question d’image…

Voilà une façon originale pour les auteurs québécois de vivre de leur plume. Qui peut survivre avec les maigres 10 % de droits d’auteur accordés par nos éditeurs subventionnés? Vite, ouvrons nos pages au placement de produits! «Il se fit griller une tranche de pain Bon Matin, se versa un verre de jus Tropicana avant de plonger dans la lecture du dernier Voir. Il flottait dans la cuisine une bonne odeur de M. Net et dans la porte de son frigo en inox Frigidaire, il pouvait voir le reflet de sa veste Philippe Dubuc…»

Saturday Night
À surveiller dans l’édition de samedi du National Post, la renaissance du jadis prestigieux magazine Saturday Night. La plus vieille publication canadienne – le magazine avait été créé en 1887 – a disparu de la circulation l’an dernier, après plusieurs transformations infructueuses. L’équipe du National Post saura-t-elle en faire un New York Times Magazine canadien? C’est à voir.

An American Tragedy
Un des procès les plus médiatisés du XXe siècle va enfn connaître la consécration: il y aura bel et bien une mini-série télévisée sur l’affaire O.J. Simpson. C’est l’écrivain Norman Mailer qui signera le scénario de cette saga judiciaire qui a bouleversé l’Amérique. On comprend ce qui a pu séduire l’auteur de The Executioner’s Song (prix Pulitzer) dans l’histoire de cette vedette de football ayant connu gloire et fortune avant d’être accusée du meurtre de son ex-femme, une séduisante blonde qui incarnait, pour plusieurs, le symbole du Noir qui a réussi. La mini-série de quatre heures, qui sera diffusée sur CBS l’automne prochain, sera produite par Tom Fontana et Barry Levinson, producteurs des séries Oz et Homicide: Life on the Street.

Coup d’oeil
Poésie, avec Pierre Lebeau
Drôle et attachant dans Fortier, plus grand que nature dans L’Odyssée, Pierre Lebeau est sans aucun doute l’un des meilleurs comédiens de son époque. Vendredi, de 22 h à minuit, la chaîne culturelle de Radio-Canada (100,7 FM) diffusera la captation d’un spectacle de poésie conçu par le comédien et présenté il y a un an au Théâtre d’Aujourd’hui. Au programme: Vanier, Gauvreau, Miron, Daoust, etc.
Le comédien est entouré de Sylvie Drapeau, Julie McClemens, Alexis Martin et Gary Boudreault. À ne pas manquer.