Médias : Concentrons-nous s.v.p
Société

Médias : Concentrons-nous s.v.p

Concentrons-nous, s.v.p.!

Si nous vivions aux États-Unis, il y aurait déjà un livre en préparation sur les dessous de l’entente entre Vidéotron et Québécor. L’auteur, sans doute un journaliste (Jean-François Lisée, êtes-vous libre?), y raconterait comment les gens de la Caisse de dépôt et placement s’y sont pris pour tasser Rogers Media dans un coin (au coût de 243 millions de dollars). Il y aurait plusieurs pages sur les tractations politiques à Québec (rencontres avec Bernard Landry, échanges téléphoniques entre les représentants du gouvernement et Pierre-Karl Péladeau, etc.). On retrouverait sans doute un chapitre délirant sur les implications politiques d’une telle transaction (la théorie de certains éditorialistes canadiens-anglais: en finançant Québécor, le gouvernement québécois s’est "acheté" la salle de nouvelles de TVA en vue du prochain référendum) et on se délecterait de détails croustillants sur la façon dont on a convaincu (forcé?) papa et maman Chagnon de laisser aller TVA. On comprendrait enfin pourquoi aucun Chagnon n’a voulu se montrer le bout du nez aux côtés de Pierre-Karl Péladeau lorsqu’il a annoncé la conclusion de l’entente.

Il y aurait des larmes, de grosses colères, des cris; bref, de quoi faire une belle grosse série dramatique (produite par TVA International?), qui distrairait tout le monde dans les chaumières. Comme les deux milliards de dollars fournis par la Caisse de dépôt nous appartiennent un peu, ce serait un juste retour sur notre investissement, non?

Pierre-Karl Péladeau a affirmé vouloir demeurer propriétaire des deux stations de télévision privées au Québec, TQS et TVA. Il a déclaré, cynique, que c’était aux journalistes de s’assurer que la liberté de presse et l’indépendance des salles de nouvelles soient respectées. Ben tiens.

Plusieurs commentateurs l’ont souligné ces des derniers jours: une situation semblable serait impensable aux Etats-Unis, où le FCC (l’équivalent de notre CRTC) ne permet pas qu’une entreprise possède un poste de télévision et un journal dans le même marché. Françoise Bertrand permettra-t-elle une telle situation? On le saura au cours des prochains mois.

Pendant ce temps, invité à parler devant le Conseil des directeurs médias du Québec le 14 septembre dernier, Daniel Lamarre, président du Groupe TVA, s’est réjoui de l’arrivée de Pierre-Karl Péladeau dans sa vie. Lamarre a profité de l’occasion pour faire le point sur les activités de TVA. Il a parlé des promotions croisées entre le magazine 7 Jours et l’émission Jet 7; il a parlé de la vente de produits dérivés de la série Willie grâce à l’émission TVA Direct; il a rappelé que TVA était aussi producteur de spectacles (via sa filiale TVA International, anciennement Motion) et donc propriétaire des droits de Notre-Dame de Paris, de Patrick Bruel au Québec et de ceux de l’humoriste Stéphane Rousseau (ce qui explique sans doute son omniprésence au gala télévisé de la rentrée de TVA). Enfin, monsieur Lamarre a donné en exemple le partenariat entre McDonald et Walt Disney pour décrire les innombrables possibilités de promotion, placement de produits et produits dérivés qui s’offraient aux publicitaires et annonceurs québécois qui ont de l’imagination. Sky is the limit!

Une note en passant: dans cette féroce chasse aux contenus, il semble que les éditeurs de livres soient les grands oubliés. Je n’ai entendu personne déclarer que l’achat de Boréal, de Leméac ou de n’importe quelle autre maison d’édition québécoise ou canadienne représenterait un ajout intéressant à leur banque de contenus. Je ne parle pas d’éditions de livres d’affaires ou de livres pratiques, mais bien de fiction, de livres historiques ou de littérature jeunesse. Pourtant, si on suit la logique actuelle, un livre, c’est une histoire qui pourrait potentiellement devenir un film, une série télé, une vidéocassette, un t-shirt, des fiches, un CD-ROM, un site Internet, un magazine hors série, etc., etc. Les écrivains seront-ils les seuls à ne pas bénéficier de la manne?

La rentrée décalée des Américains
Si vous êtes de ceux qui pestent contre les éliminatoires du hockey qui n’en finissent plus, consolez-vous en vous comparant aux Américains. Chez nos voisins du sud, la rentrée télé est repoussée à la mi-octobre à cause des Jeux olympiques, des finales du base-ball et de la campagne présidentielle. Il faudra donc être très alerte pour ne pas manquer le début des nouvelles émissions qui s’échelonnera d’octobre à la mi-novembre. En voici quelques-unes parmi les plus prometteuses.

CBS
Au royaume des reality shows (Survivor, Big Brother), on revient à une forme plus classique de télévision, avec un commencement, un milieu, une fin et, surtout, des textes.

The District (début samedi 7 octobre, 22 h) racontera l’histoire d’un commissaire de police de Washington qui s’attaque à la corruption. C’est l’envers de la médaille de West Wing, et c’est basé sur la vie de Jack Maple, ex-commissaire de police de la ville de New York. Pour ceux qui aiment les histoires de flic et de pouvoir.

That’s Life (début 7 octobre, 20 h) mettra en vedette une fille dans la trentaine issue d’un milieu ouvrier du New Jersey qui décide de retourner aux études pour s’en sortir. Parmi les acteurs, Ellen Burstyn (la maman dans The Exorcist) dans le rôle de la mère et Paul Sorvino dans celui du père. Au générique, le nom de Diane Ruggerio comme productrice exécutive. Serveuse dans un diner minable, Ruggerio a confié à un client qu’elle voulait écrire sa vie. Le client l’a prise au mot et l’a encouragée. Ce qu’il a lu lui a plu, et comme il était lui-même dans le milieu de la télé (nous sommes aux États-Unis…), il l’a fait lire à ses amis producteurs. Vous connaissez la suite…

ABC
Gideon’s Crossing
(le premier épisode sera présenté le 10 octobre, sans interruption publicitaire) est un drame médical qui marque le retour au petit écran de l’acteur Andre Braugher (Frank Pembleton dans Homicide: Life on the Street). Également en vedette: l’acteur Ruben Blades. Prometteur.

NBC
La série la plus attendue de la saison est sans contredit Ed (le dimanche à 20 h, la date de la première n’est pas arrêtée), l’histoire d’un avocat new-yorkais abandonné par sa femme. Il décide de retourner dans son village natal où il renouera avec sa flamme du secondaire et deviendra propriétaire d’une salle de quilles. En entrevue, les auteurs ont affirmé n’avoir qu’un seul objectif: faire rire David Letterman, producteur de la série. À surveiller.

Y a-t-il une vie après Seinfeld? Michael Richards le souhaite. L’hilarant Kramer revient à l’antenne avec une sitcom qui porte son nom (The Michael Richards Show, début 12 octobre) et un personnage (Vic Nardozza) qui s’apparente vaguement à l’inspecteur Clouseau. Sera-t-il aussi drôle sans Elaine, George et Jerry? C’est à voir.

Fox
Enfin, Fox, qui aux États-Unis s’est fait gruger une partie de son auditoire par WB, une chaîne câblée à la programmation très ado, présente la dernière mouture de David E. Kelley, Boston Public (début le lundi 23 octobre), une série qui se déroule dans une école secondaire. Y passera-t-on autant de temps dans les toilettes que dans Ally McBeal?

Enfin, James "I’m the King of the World" Cameron propose Dark Angel (première: 3 octobre, 21 h), une série futuriste ayant comme personnage principal Max, un pétard vêtu de latex supposé être un prototype humain génétiquement modifié. Pour amateurs seulement.