

Fondatrices du Club Compassion : Debout!
Vous trouvez que le monde ne tourne pas rond? Participez à son redressement! Toutes les deux semaines, afin de vous inspirer, nous vous présentons un activiste qui remue ciel et terre pour changer les choses et améliorer la vie.
Tommy Chouinard
Photo : Benoit Aquin
Leur cause: le cannabis thérapeutique
Depuis le 1er octobre 1999, les deux fondatrices du Club Compassion de Montréal, Caroline Doyer et Louise-Caroline Bergeron, se vouent à offrir les meilleurs services aux patients dans leur propre hôpital alternatif. Leur mandat est bien connu: distribuer du cannabis à des malades sous prescription, pour usage médical seulement. D’ailleurs, les deux initiatrices de l’organisme de la rue Rachel se défendent bien de n’avoir créé qu’un simple endroit de vente de pot. "Il s’agit davantage d’un centre de traitement de malades où ils peuvent avoir de l’information sur le cannabis, bénéficier d’un suivi et d’une écoute attentive", affirme Louise-Caroline Bergeron.
Le Club Compassion compte soixante-dix patients, qui souffrent autant du sida, d’épilepsie et de dystonie musculaire que de migraines, d’arthrite, de cancer et de dépression. "Le cannabis soulage bien des souffrances, comme l’indiquent plusieurs recherches scientifiques sérieuses, souligne Caroline Doyer. Il ne faut pas oublier non plus que notre lutte se joint à celle des malades qui se battent tous les jours contre la maladie."
Du 9 au 13 novembre, le Club Compassion célèbre en grande pompe son premier anniversaire dans le cadre de cinq jours d’activités appelés Célébration Cannabis et Compassion (voir page 4). "Nous voulons souligner le premier anniversaire du Club et amasser des fonds, explique Caroline Doyer. C’est aussi pour sensibiliser les gens à la cause des bénévoles du Club qui subiront bientôt leur procès."
L’histoire de ce procès a débuté le 10 février dernier lorsque deux bénévoles du Club Compassion ont été arrêtés et accusés de possession et de trafic de stupéfiants. Comme quoi une lutte militante peut mener jusqu’en cour… Les deux bénévoles risquent cinq ans moins un jour de prison au terme d’un procès qui se déroulera du 13 au 17 novembre. "Nous allons témoigner pour prouver le travail juste et honnête de ces bénévoles, indique Caroline Doyer. Il faut démontrer aux juges que leur présence consistait à venir en aide à des gens dans le besoin, et non à faire du trafic."
Louise-Caroline Bergeron et Caroline Doyer ne ménagent pas non plus les efforts pour faire changer les pratiques du monde médical. "Nous examinons ce qui se fait comme recherche dans le monde sur le cannabis thérapeutique, affirme-t-elle. Le but est de démontrer l’usage bénéfique de cette substance. Actuellement, le Collège des médecins désapprouve la prescription de cannabis à des fins thérapeutiques sous peine de réprimander ses membres. Il faut essayer d’expliquer aux médecins de ne pas avoir peur, et de convaincre le Collège qu’il est dans l’erreur."
La lutte des deux fondatrices du Club Compassion se fait aussi sur l’échiquier politique. "Pour changer les lois, il faut apprendre aux politiciens ce qui se passe sur le terrain, la réalité quotidienne des malades, indique-t-elle. Nous voulons amasser des appuis, comme on l’a fait auprès du Bloc québécois."
Leur vision du militantisme
"Militer, c’est l’art d’avoir des idées, mais aussi de savoir comment les appliquer, affirme d’emblée Louise-Caroline Bergeron. Nous sommes vraiment des activistes. Nous n’agissons et ne parlons pas dans le vide. Nous réalisons quelque chose de concret dans l’aide aux malades."
Toutefois, défendre les vertus du cannabis reste une tâche ardue. C’est que le pot demeure un sujet tabou. "Il y a beaucoup de désinformation et de préjugés à l’égard de cette substance, souligne Caroline Doyer. Il est donc difficile de changer les mentalités. Nous vivons dans le monde des pilules des compagnies pharmaceutiques. L’usage des herbes est ainsi mis de côté."
Comble de tout, la lutte de ces deux militantes se fait dans une illégalité contestée. "Les policiers sont toujours autour de nous, affirme Louise-Caroline Bergeron. En fait, nous sommes vus comme une organisation criminelle, donc nous n’avons aucune subvention. Cette situation est difficile, surtout quand nous travaillons là-dessus à temps plein. Il faut continuer à défendre nos idées et, surtout, ne pas lâcher." Caroline Doyer croit d’ailleurs beaucoup au bien-fondé de leur geste de désobéissance civile. "Nous agissons en fonction des gens, au lieu de vivre en fonction des lois, indique-t-elle. Ça fait du bien de donner une voix à ceux qui n’en ont pas."
Âgées de moins de trente ans, les deux militantes avouent que leur jeunesse handicape parfois leur combat. "Nous avons l’énergie, mais la jeunesse nous nuit, affirme Louise-Caroline Bergeron. Être jeune, c’est souvent ne pas être pris au sérieux. Pourtant, nous avons fait des études universitaires et nous sommes appuyées par des recherches sérieuses. De plus, nous avons des choses à dire et une vision du monde. Pourquoi ne pas nous écouter franchement?"
Le Club Compassion
Pour de l’information sur la Célébration Cannabis et Compassion: 521-8764