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Debout! : Sylvie Guilbault
Vous trouvez que le monde ne tourne pas rond? Participez à son redressement! Toutes les deux semaines, afin de vous inspirer, nous vous présentons un activiste qui remue ciel et terre pour changer les choses et améliorer la vie.
Tommy Chouinard
Sylvie Guilbault, 39 ans, directrice du groupe Les Amis de la Montagne
Sa cause: la protection du mont Royal
Sur le flanc du mont Royal, la vieille maison Smith fait office de phare. Après avoir été abandonnée il y a des années, un regroupement de citoyens, Les Amis de la Montagne, est devenu son gardien en mars 1999. Créé en 1986, ce groupe de pression se voue à la protection du patrimoine et de l’environnement. L’objet de sa lutte constitue LE symbole naturel et historique de Montréal: le mont Royal.
Sylvie Guilbault, directrice des Amis de la Montagne, fait partie de l’organisme depuis huit ans. "Notre mission est de défendre le caractère naturel du mont Royal, de promouvoir ses caractéristiques historiques et culturelles, de faire en sorte que les Montréalais puissent jouir pleinement de la montagne, affirme-t-elle. Et croyez-moi, ce n’est pas si simple à accomplir."
Et pour cause. Car le mont Royal est la proie de promoteurs de tout acabit, bien souvent appuyés par une administration municipale qui carbure au développement économique à tout crin. "Ils ne regardent que les avantages économiques à court terme, et non la destruction du paysage à long terme, souligne-t-elle. Ils veulent carrément construire un mur de béton autour du parc. Si nous n’étions pas là, ce serait déjà fait." Au fil des années, ce ne sont certes pas les projets "grandioses" qui ont manqué: funiculaire, tour de communication, méga-cabane à sucre, station de ski, etc. Pour Les Amis, à chaque année suffit sa peine. "Une année, c’était la démolition du Montreal Hunt Club et, l’année dernière, c’était le projet du Groupe Lépine et la construction, avortée, de condos de luxe, énumère Sylvie Guilbault. Nous avons tout de même réussi à prévenir bien des dégâts."
Cet automne, le projet de la firme Canderel, pour la construction d’une tour de dix étages, a constitué le dernier dossier contre lequel Les Amis de la montagne se sont battus. "Ce projet dérogeait aux règlements municipaux et la Ville a failli le laisser passer, indique-t-elle. Nous avons fait une pétition de 10 500 noms et réalisé des pressions sur la ministre de la Culture, Agnès Maltais. Elle a finalement décidé d’émettre un avis de classement historique de l’îlot visé, le Trafalgar-Gleneagles. C’est un gain pour nous."
Détrompez-vous, Sylvie Guilbault et son équipe se défendent bien d’être systématiquement contre tout projet de construction. "Nous ne sommes pas contre les promoteurs. Nous sommes tous contents quand il y a des grues à Montréal. Mais nous disons que ce ne doit pas être fait n’importe comment, n’importe où et à n’importe quel prix. Il faut que le gouvernement émette des règles claires et strictes."
Récemment, Sylvie Guilbault a tout de même eu de quoi se réjouir (!). Le 10 novembre dernier, le Conseil international des monuments et sites (ICOMOS) présentait le premier rapport mondial sur le patrimoine en danger. Grâce (sic) aux efforts des Amis de la Montagne, le mont Royal figure maintenant au chapitre… des lieux les plus menacés dans le monde!
Sa vision du militantisme
Les Amis de la Montagne ne sont ni des manifestants qui envahissent les rues, ni des grands-parleurs-petits-faiseurs qui veulent refaire le monde dans un café du coin. "Nous sommes entre les deux, estime Sylvie Guilbault. Autant nous posons des gestes concrets, comme des campagnes pour planter des arbres sur la montagne, autant nous devons faire de la représentation politique et nous lancer dans le lobbying afin de faire pression sur les autorités." D’ailleurs, la directrice revendique la création de véritables lieux d’expression de la population, supérieurs, en tout cas, aux simulacres de consultations publiques souvent offerts aux citoyens.
Malgré tout, Les Amis de la Montagne jouissent d’un appui inconditionnel des citoyens. "Le mont Royal, c’est leur histoire, leur vie, souligne-t-elle. Notre force est la mobilisation sociale. Et l’implication des citoyens est là quand on en a besoin. La maison Smith est d’ailleurs un endroit de rassemblement. Nous y tenons des ateliers et des forums pour débattre les questions concernant la montagne. Aussi, nous y discutons des projets de restauration du mont Royal, des projets qui demandent des sous. Nous avons donc besoin des gens pour les campagnes de financement."
Actuellement, la défense du patrimoine n’a que peu de poids pour les autorités à côté des fameux impératifs du développement économique. "C’est vrai que c’est difficile, conclut Sylvie Guilbault. N’empêche, nous voulons que le mont Royal soit reconnu à l’échelle internationale, que le gouvernement admette sa valeur nationale et qu’il le protège avec des lois. Sur cette question, Les Amis de la Montagne seront toujours vigilants pour rappeler à l’ordre les autorités politiques."
Les Amis de la Montagne: 843-8240