Droit de cité : Vive le privé?
Société

Droit de cité : Vive le privé?

Message à tous nos sympathiques marxistes: la gauche n’a pas le monopole de la démocratie.

Il arrive parfois, quand l’État prend congé de la démocratie et qu’il l’offre en sous-traitance au secteur privé, que des gens d’affaires se montrent plus démocrates que certains élus!

C’est ce qui s’est produit à Montréal récemment. Sans me faire le chantre d’une démocratie à dix vitesses, j’avoue que je suis presque content de voir le privé prendre la relève des politiciens.

En effet, pour une fois, des projets de développements autour du mont Royal seront l’objet de consultations publiques! Et ce, pas grâce à l’initiative de la Ville. C’est le promoteur qui met sur pied un mécanisme d’écoute active. Vous avez bien lu.

Bref, le renard reconnaît le droit de parole des poules; tandis que le fermier ouvre la porte du poulailler pour laisser entrer les coyotes. Comprenne qui pourra.

Le Centre universitaire de santé de McGill (CUSM), qui regroupe les hôpitaux de l’Université McGill, a annoncé qu’il y aurait une consultation publique sur la réutilisation des immeubles qu’il désertera en 2006 pour son méga-hôpital qui sera construit dans NDG.

Il y a en tout cinq immeubles, qui comptent autant d’étages que la Place Ville-Marie: l’Hôpital Royal Victoria, l’Hôpital de Montréal pour enfants, l’Institut et l’Hôpital neurologiques de Montréal, l’Hôpital général de Montréal et l’Institut thoracique de Montréal, tous situés à flanc du mont Royal.

En bon propriétaire foncier, le CUSM pourrait choisir lui-même la façon de recycler ses vieux édifices, dont certains sont monumentaux. Ils lui appartiennent en propre. Ce serait à l’administration publique de s’assurer de protéger le bien commun pendant l’opération.

Mais non, le renard tient à avoir l’opinion des poules!

Afin de nous assurer que la consultation sera indépendante, on formera un comité composé de personnes extérieures au CUSM. Il y a le grand patron de Domtar; Nancy Dunton, chef des programmes universitaires et professionnels au Centre Canadien d’Architecture; Francis Fox, un ex-ministre de Trudeau; et Brian Levitt, l’ancien boss d’Imasco.

Bon, ce n’est pas tout à fait la composition modèle d’un comité populaire et collectiviste; mais reconnaissons qu’il y a là le début de l’ombre du bout de la queue de quelque chose de rassurant.

Cela tranche avec le caractère équivoque, pour ne pas dire carrément louche, des consultations publiques de la Ville de Montréal. Le cas du projet de Canderel, de construire une tour de dix étages sur Côte-des-Neiges, en est l’exemple.

Ceux qui ont assisté à la séance de consultation de la Commission du développement urbain il y a deux semaines en savent quelque chose.

Les responsables de trois services de la Ville (l’urbanisme, le patrimoine et les parcs) avaient recommandé de jeter le projet Canderel à la poubelle. Et pourtant… Après deux heures trente de torture – genre Les Bronzés en classe de cheminement -, le responsable du développement économique au comité exécutif, Saulie Sajdel, assis confortablement aux côtés des promoteurs, est venu nous rappeler que le projet était parfait et que le comité exécutif l’accepterait!

Mais, alors, qu’est-ce qu’on est venu faire ici?

J’ai sacré mon camp à neuf heures et demie, il y en avait encore pour deux heures. J’abandonne l’idée de suivre la CDU. On ne pipera plus Candide.

(Heureusement, Les Amis de la montagne ont réussi à faire renverser la vapeur. Voir Debout! en page 10.)

Les premières audiences se dérouleront les 21 et 22 novembre, de 19 h à 22 h, au Samuel Bronfman House, de l’Université Concordia, 1590, avenue du Docteur-Penfield.

La chance vous sourit

Bande de chanceux. Au moment où vous lisez ces lignes, vous connaissez déjà le contenu de la réforme municipale pour la grande région de Montréal, déposée mercredi par la ministre Louise Harel.

Une bonne fortune comme celle-là, il n’en passe pas deux dans une vie. Profitez-en bien. Tandis que moi, une fois de plus, je suis prisonnier de continuum de l’espace-temps provoqué par l’heure de tombée. C’est-à-dire que par la magie de l’information, je dois me télétransporter de mardi à jeudi, en ignorant ce qui s’est passé mercredi. Alors, pendant que vous me lisez, dites-vous que, pour moi, il est toujours mardi.

Stephen Hawkins affirme que les voyages dans le temps sont impossibles. Moi je dis que si: il suffit de tenir une chronique sur les affaires municipales.

Depuis mercredi matin, vous avez donc la chance de voir en différé sur RDI le sol se déchirer, l’île de Montréal emportée par les flots du Saint-Laurent en aval, les lames de feu s’abattre sur la banlieue, la Terre sortir de son orbite; et même d’assister au retour du Messie pour combattre le Grand Satan sur Saint-Laurent. Ze Final Combat.

Ça doit être excitant. Veinards…

Langue de poche

En terminant, un sujet hors d’ordre: Guy Bertrand, le nouvel ami de Jean Chrétien et de l’État de droit, propose une nouvelle police de la langue, qui patrouillerait dans nos écoles afin de juger de la qualité du français que l’on y parle, avec pouvoir de châtier.

Si monsieur Bertrand juge que les heunes parlent mal le français, ditez-lui qu’on vient d’appréhender le premier suspect: Jean Chrétien.

Pendant le débat télévisé en français (ce qu’on croyait être du français, mais qui était en fait du swahili), Chrétien a dit "les unions" pour "les syndicats" et "les auditeurs" pour "les vérificateurs". De plus, il disait toujours "si j’aurais" au lieu de "si j’avais". C’est bien poche. Maître Bertrand va-t-il sévir?