Périphérique: féminin pluriel
Avec Périphérique, le Groupe d’Intervention Vidéo (GIV) dote Internet d’un important site de référence sur l’art Web. Pour l’heure, plus d’une cinquantaine d’oeuvres créées par des femmes du monde entier sont accessibles par le site, le tout proposant une incursion unique dans l’univers de la création numérique.
Créé à l’occasion du 25e anniversaire du GIV, le projet Périphérique (www.givideo.org/fr/crea/peripherique.html propose de plus un laboratoire de création pour le Web, une sorte de résidence d’artistes pour des femmes qui décident d’explorer l’art Web. Pour son lancement, trois oeuvres nous sont présentées, soit celles de Nikki Forrest, d’Andra McCartney et de Nancy Tobin.
"On me disait souvent qu’il n’y avait pas grand-chose sur le Web, que c’était ennuyeux, que c’était un médium immature. Alors je me suis dit: "Ça se peut pas!" Je suis donc allée vérifier", lance la commissaire indépendante et initiatrice du projet, Nicole Gingras. Et le résultat de ses recherches sur l’art Web a de quoi clouer le bec aux détracteurs du Web.
"J’ai trouvé des choses hyper-intéressantes, des oeuvres de femmes qui s’investisent pleinement dans leur travail. J’en suis même arrivée à la conclusion que le Web n’était pas qu’un médium en train de se développer, mais un support ayant déjà une tradition et un vocabulaire influencé par un travail en littérature, en vidéo et par les pratiques croisées entre les arts et les sciences."
Si ce type d’inventaire de l’art Web existe déjà sous d’autres cieux (on n’a qu’à penser au Centre international d’art contemporain –www.ciac.ca – et au Walker Art Center – www.walkerart.org– celui orchestré par Nicole Gingras propose non seulement une exploration habilement choisie, mais aussi une navigation intuitive et lente qui plonge le visiteur dans un état d’écoute très particulier. Fascinée par la notion d’exposition sur le Web, Nicole Gingras nous propose d’ailleurs d’aller voir du côté du site du Museum of Modern Arts (MOMA) de New York. "On parle rarement de la notion d’exposition de l’art Web, dit-elle. Mais il y a des projets très convaincants, comme celui de Barbara London du MOMA qui exploite le côté journal de voyage. C’est comme si elle partageait ses recherches et ses découvertes presque en direct."
En plus de signaler quelques projets de femmes commissaires, Périphérique, contrairement à d’autres projets d’exposition suivant un parcours thématique, tente un inventaire des différents types d’écriture sur le Web. On y trouve des oeuvres extrêmement simples et low-tech, d’autres très complexes; des premières oeuvres et des travaux de femmes pionnières qui ont fait leurs premières armes avec l’art Web. "Périphérique m’a permis de découvrir la dimension narrative du Web et comment on peut travailler le texte ou le récit, que ce soit par le texte ou par les images, déclare Nicole Gingras. C’est évident, les femmes semblent s’amuser avec ça! L’idée de Périphérique, c’est celle d’une sorte de bibliothèque, d’un centre d’archives, dans lequel tu peux te perdre, t’épuiser, mais où tu vas peut-être trouver un livre (une oeuvre) que tu ne cherchais pas. Et ça, c’est fantastique."
Laboratoire d’art Web
Périphérique, c’est aussi une sorte de résidence d’artistes pour des femmes qui veulent découvrir l’art Web. Le GIV propose aux artistes choisies une formation et un accompagnement technique pour le développement des projets. "Le GIV leur permet ainsi de développer de nouveaux outils, d’apprivoiser un nouveau médium et de démystifier le Web", énumère Nicole Gingras. Le GIV, qui organise ce type d’activités pour la vidéo depuis 25 ans, a donc aussi fait le choix de s’investir résolument dans l’exploration du Web comme médium artistique et de communication.
"C’est la première subvention du GIV reliée aux nouveaux médias, explique-t-elle. Il semble donc y avoir une bonne réceptivité de la part des subventionneurs publics pour doter les centres d’artistes d’outils de diffusion. Ce sont toujours des budgets assez restreints; mais, au moins, c’est de l’argent neuf, puisqu’ils ne coupent pas ailleurs (dans les arts visuels, par exemple) pour permettre ces nouvelles subventions."
Un peu déboussolant (le manque d’indications claires fait en sorte qu’on perd le nord plus souvent qu’autrement), le site du GIV ( www.givideo.org) propose, en plus de Périphérique, une nouvelle section intitulée Filer/Making tracks. On y trouve des portraits multimédias de vidéastes. À partir d’anecdotes racontées par chacune d’entre elles, ces figures sont autant de pistes qui nous permettent d’explorer les oeuvres des vidéastes du GIV. La première série propose présente Lorna Boschman, Obom Cheryl Sim et Cathy Sisler.