Société

La semaine des quatre jeudis : Faits divers

Cette semaine, notre collaborateur Baptiste-Ricard Châtelain livre en page 8 un texte sur le GRIS, organisme bénévole qui éprouve de sérieuses difficultés à obtenir le droit de démystifier l’homosexualité dans les écoles de Québec et de Montréal.

Si cet article crée quelques remous, les administrateurs de notre réseau scolaire rétorqueront probablement à toute accusation d’homophobie en invoquant des questions de structures, de normes, de politiques internes. Cette attitude hypocrite des commissions scolaires et des directeurs d’écoles, qui dissimule la crainte de provoquer quelque polémique que ce soit auprès des parents ou sur quelque ligne ouverte, perdure au moment même où des statistiques alarmantes confirment l’ampleur du problème du suicide et de l’isolement chez les jeunes homosexuels.

Nos éducateurs éclairés ont si peur de laisser croire une fraction de seconde qu’ils encouragent ou tolèrent l’homosexualité, qu’ils préfèrent probablement que leurs élèves continuent à traiter de tapette le premier de la classe et tous les petits coeurs sensibles qui se font taper sur la gueule dans les cours d’écoles.

Évidemment, du même souffle ils vous diront qu’ils sont contre le harcèlement et la violence sous toutes ses formes.

Cette attitude faite de mutisme et de prudence, en Amérique porte un nom ou plutôt se stigmatise en une phrase célèbre déjà dans l’armée et les grandes entreprises: "Don’t ask, don’t tell, don’t pursue, don’t harass."

Ne pas demander, ne pas dire, ne pas chercher, ne pas déranger.

Le 5 juillet 1999, le soldat Barry Winchell fit l’expérience de cette politique lorsque ses collègues d’un régiment d’étudiants du Kentucky l’ont assassiné à coups de bâton de baseball durant son sommeil parce qu’ils le croyaient gai.

Ses parents estiment toujours que ce silence sur l’homosexualité, ce refus d’éduquer, de discuter a provoqué sa mort aussi sûrement que les coups.

La fondation People for the American Way of Life publiait ce mois-ci son rapport annuel sur les activités homophobes aux États-Unis.

Entre les délirantes conférences d’ex-gais repentants, les pharmaciens refusant de délivrer des ordonnances d’AZT et les poursuites pour violence contre les chrétiens intentées à la Ville de San Francisco, le rapport consacre un long chapitre à la discrimination dans le domaine de l’éducation. De quoi constater que nos éducateurs ne sont pas en reste.

– Au Wisconsin, un candidat du parti républicain inscrit à son programme son intention d’interdire l’Association de l’acceptation, un groupe de discussion entre gais et straights dans un highschool de la ville de Vérona.

– Arguant que l’homosexualité est un "mode de vie mortel", la Coalition pour le droit à l’éducation de l’Utah estime qu’un groupuscule de militants gais "pratique une politique subversive d’endoctrinement des jeunes à l’homosexualité" en offrant des séances de conscientisation dans les écoles secondaires de l’État.

– L’Alliance des citoyens de l’Oregon subventionne une pétition visant à bannir toute discussion sur l’homosexualité et à sanctionner ce "comportement" dans les écoles de l’État. En juillet dernier, lorsque le parti républicain local endosse l’initiative, la pétition passe de 10 000 à 70 000 signatures.

– Au Wyoming, l’implantation d’un programme scolaire intitulé Safe Zone (du support de l’information), rendu nécessaire par le harcèlement dont sont victimes les supposés homosexuels des collèges de la région, est contestée par le tiers du corps enseignant. "Ce sont des déviants qui essayaient d’entraîner les étudiants dans une vie de débauche", affirment quelques-uns des profs.

– Après qu’une école de Denver a proposé d’élargir son code d’éthique en matière de harcèlement en y intégrant la discrimination sexuelle, des parents menacent de poursuivre l’école qui "encourage des comportements gravement déviants".

– En Californie, un étudiant qui s’est plaint de l’incapacité de ses professeurs à faire cesser l’intimidation dont il est victime à cause de son orientation sexuelle se fait suspendre injustement 18 fois de ses cours afin de justifier son renvoi. Il aura gain de cause devant les tribunaux.

– Une demi-douzaine de parents d’une école de Californie retirent leurs filles de la classe d’une enseignante lesbienne en expliquant que l’homosexualité "va à l’encontre de leurs croyances religieuses".

– Durant l’été, un élu de Californie propose aux conseils scolaires de l’État une législation interdisant l’enseignement aux homosexuels. La proposition est défaite à sept contre deux.

– Après le massacre du Columbine High School College, la presse locale de Littleton, relayée par d’autres médias, insinue que les deux assassins appartiennent à une association gaie.

– À Contra Costa County, des opposants s’en prennent à l’organisation catholique de la ville qui veut subventionner des programmes d’apprentissage de la tolérance envers les étudiants gais. Des graffitis haineux sont systématiquement effacés des murs de l’école deux fois par année.

– En février dernier, à Palm Beach, Floride, devant la levée de bouclier des militants anti-gais et des parents furieux, la commission scolaire rejette un règlement anti-discrimination.

– Le conseil municipal de Laramie, où l’étudiant homosexuel de l’Université du Wyoming Matthew Sheppard fut assassiné, refuse de débattre d’une réglementation bannissant les crimes haineux: "Je ne suis pas plus responsable du comportement des suspects que qui que ce soit d’autre… nous ne sommes pas disposés à discuter de ces questions publiquement", déclare le recteur de l’université.

Don’t ask, don’t tell, don’t pursue, don’t harass.