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Libre-échange ou libre expression?
Tommy Chouinard
Alors que Québec accueillait les chefs d’État de 34 pays des Amériques dans une atmosphère de promotion de la démocratie (la clause adoptée en faisant foi), les contradictions sont nombreuses: tandis que les États tentent de promouvoir les vertus du libre-échange, on ne peut en dire autant au sujet de la libre expression… Et le 3 mai, Journée mondiale de la liberté de la presse, permet de soulever cette réalité.
Avec la fin du Sommet des Amériques, il est intéressant de constater qu’en Amérique, la liberté d’expression est bien fragile, selon le Rapport sur la liberté de la presse dans les Amériques, réalisé par Reporters sans frontières et la Fédération professionnelle des journalistes du Québec.
D’après cette étude, près de 90 % des assassinats de journalistes restent impunis. Depuis 1991, 90 professionnels de l’information ont été tués dans 11 des 34 États ayant participé au Sommet, mais seulement 10 de ces affaires ont abouti à un procès… Avec 33 journalistes tués, soit plus du tiers des cas recensés, la Colombie est le pays le plus dangereux du continent américain pour les professionnels de l’information, et le pays où règne littéralement l’impunité. Dans une moindre mesure, c’est également le cas au Brésil, au Mexique et au Pérou. Dans chacun de ces États, plus d’une dizaine de journalistes ont été tués au cours de la décennie.
Dans 20 États représentés au Sommet, la loi prévoit encore des peines de prison pour des délits de presse. D’après le rapporteur spécial pour la liberté d’expression de l’Organisation des États américains, Santiago Canton, dans 16 pays ayant participé au Sommet, le code pénal protège "l’honneur" des fonctionnaires ou des élus. Rapporter des affaires de corruption ou d’abus de biens sociaux par des agents de l’État peut se transformer en un "outrage" sanctionné par de lourdes peines de prison. Au Panama, par exemple, un journaliste peut être incarcéré sur-le-champ, sans procès, pour avoir manqué de respect envers les fonctions d’un représentant de l’État.
Et vive la liberté des échanges! Pour le reste…