![Droit de cité : Y avait trop de soleil](https://voir.ca/voir-content/uploads/medias/2012/01/9102_1;1920x768.jpg)
![Droit de cité : Y avait trop de soleil](https://voir.ca/voir-content/uploads/medias/2012/01/9102_1;1920x768.jpg)
Droit de cité : Y avait trop de soleil
Éric Grenier
Toutes les raisons ont été invoquées pour expliquer la faible participation au rallye antifusion de vendredi dernier: trop beau, trop chaud, trop tard, trop loin, trop vendredi…
Il n’y avait en effet que 1000 manifestants, au plus, et ça inclut les Montréalais curieux qui se sont déplacés le long des trottoirs pour assister à la marche, comme si c’était un défilé des clubs Lion de la province. Et ça inclut aussi les employés municipaux des petites villes de l’Ouest dont c’était l’affectation du jour!
Il y avait aussi Jean Charest, avec sa petite troupe d’une demie de demi-douzaine de députés libéraux, venus vampiriser les banlieusards, s’abreuver de leur mécontentement pour faire le plein de capital politique… Mais avec seulement 1000 manifestants (une présence médiatique réduite au minimum pour ce genre d’événement), peut-être qu’il eût été plus avisé pour le chef libéral de "cabaler" quelque part dans le Québec profond, où ses appuis valent bien ceux du PQ dans le West Island. Là-bas, on ne fusionne pas les villes: on les ferme et on les barricade. Leurs ressources sont pillées avec la bénédiction de l’État, un État qui maintient les populations locales à sa merci, à petites gouttes de subventions d’emplois "BS" qui font trois petits mois puis s’en vont pour toujours.
Savez-vous à quoi rêvent les gens de ces régions? À avoir un peu d’attention, 10 % de l’attention que reçoivent les banlieusards du représentant de l’opposition officielle à l’Assemblée nationale.
Anyway, Jean Charest était là pour promettre aux citoyens opposés aux fusions un retour en arrière s’il est porté au pouvoir. Une promesse électorale, avec tous les risques qu’impliquent les promesses électorales…
Peter Trent, le sympathique maire de Westmount, que bien des Montréalais voyaient dans leur soupe en remplacement de Pierre Bourque, un politicien chevronné qui a vu neiger, pleuvoir et grêler, croit dur comme fer à la promesse de Jean Charest, malgré son irréalisme et tout le lot de problèmes qu’elle représente. À ce niveau, on ne parle plus de confiance, mais carrément de foi! C’est à se demander si Jean Charest n’espère pas , finalement, que les banlieusards disent Oui aux fusions par voie de référendum! Comme si tout ce que ces gens désiraient, dans le fond, c’était d’être consultés…
Yes sir, madame!
La manifestation était essentiellement une affaire d’anglos. Pourtant, la banlieue montréalaise n’est pas exclusivement anglophone. Comme si, chez les francophones, on s’était fait une raison devant l’inéluctable. Comme si les francos s’étaient écrasés plus rapidement devant le rouleau compresseur du PQ.
Il faut comprendre que le sentiment d’appartenance au fief municipal est pas mal plus aiguisé chez les anglos. Ils sont plus "communautaires" que les francophones.
Et il y a cet effet de poil à gratter qu’un gouvernement péquiste exerce sur les anglophones. Qu’importe la politique, le projet de loi ou l’énoncé d’intention: tout ce qui émane d’un gouvernement péquiste leur apparaît suspect. Ainsi, quand les libéraux, sous la direction du ministre des Affaires municipales de l’époque, Claude Ryan, a déversé des centaines de millions de dollars du déficit dans les budgets municipaux, on s’y est certes opposé. On a manifesté son mécontentement dans des conférences de presse. Mais sans plus.
Or, quand le gouvernement de Lucien Bouchard a imité ce geste en 1997, les maires du West Island sont sortis dans la rue, ont traîné le gouvernement en cour et l’ont accusé de vouloir punir les anglophones pour avoir voté Non au référendum de 95. Ils ont même marché sur Verdun…
Dans le débat actuel sur les fusions, l’allergie des anglos au gouvernement péquiste joue comme une seconde motivation. C’est pourquoi à Québec, à Sherbrooke, sur la Rive-Sud, en Outaouais: tout est calme sur le front de l’action populaire. Pas que les habitants de ces régions soient contents de s’être fait fusionner, non. Mais on est moins allergique au PQ…
Je gagerais deux dollars Canadian Tire que si ç’avait été les libéraux qui avaient procédé aux fusions, la grogne serait plus discrète. Mais il est inutile de risquer sa fortune là-dessus, parce que de toute façon, jamais les libéraux n’auraient réalisé les fusions. Ils en ont eu la chance pendant les deux mandats de Bourassa II; ils y rêvaient, même, mais la crainte de l’opprobre de l’électorat les en a empêchés. Alors, ils se sont rabattus sur des commissions et des rapports qui ont contribué à alimenter la très riche documentation sur les fusions municipales.
Pin-pon
Pas sûr que les résidants du Plateau, ceux habitant le long de l’avenue du Parc-La Fontaine et de la rue Cherrier, aient particulièrement apprécié le défilé des banlieusards. Armés de camions de pompiers, de véhicules lourds, de 18-roues et de leurs klaxons assourdissants, les manifestants ont fait tout un tintamarre en plein quartier résidentiel.
Ça ressemblait à du mépris. Un tout petit peu.