La Société de transport de la communauté urbaine de Québec rendait public le rapport annuel de la protectrice de la clientèle, mardi midi.
Selon les premières constatations de madame Claudette Harvey, il faut "envisager l’avenir de la Société avec un optimisme prudent". Suivent quelques observations effectivement aussi prudentes qu’optimistes sur l’état de la flotte et les relations de travail. Sujets sensibles parmi tant d’autres…
Car "la STCUQ est en période de reconstruction", paraît-il.
Langue de bois…
Voyons donc, pour tout le monde, la STCUQ, c’est avant tout le festival du gros conflit de travail sale.
Organisme longtemps administré par des délégués des partis au pouvoir à la Ville de Québec, la Société, vue de l’extérieur, comme son alter ego de Montréal, est un impressionnant foutoir auquel personne ne comprend plus rien depuis longtemps. Avez-vous jamais entendu parler d’orientations, de choix, de perspectives… Rationalisation, bruit, conservation de l’énergie, écologie? Savent pas c’est quoi. Ou en tout cas, ne le crient pas très fort.
Ce que l’on sait par contre, c’est que cette poudrière qui pète aux deux ans n’a pas fini d’exploser puisque tous les ingrédients propices à d’autres bonnes détonations restent réunis.
D’un côté, un syndicat qui joue dur, au sein duquel on retrouve quelques têtes brûlées qui n’hésitent pas à utiliser les grands moyens pour faire passer leurs revendications, et sur lesquelles planent trop souvent des soupçons d’intimidation, d’incendie, de menaces de mort – bien sûr jamais confirmés – lors des conflits. De l’autre côté, des vestons parachutés qui campent sur leurs positions comme les armées de Napoléon. Boummm!
Madame Harvey se félicite de trois ans de relations de travail qui devraient être au beau fixe. Qui veut mettre une piastre et cinquante là-dessus?
La farce. Qu’est-ce qu’on a ri l’an passé lors de l’affaire des autobus qui, lors d’inspections faites by the book, tombaient subitement en panne, devenaient subitement déficients, subitement désuets, et allaient tous nous entraîner sans freins sur la pente glissante de la mort dans un cercueil de tôle. À moins bien sûr que ces employés de soutien, qui en d’autres temps en passaient de petites vites, ne trouvent le frein à main au hasard de leurs médiations. Qu’est-ce qu’on a ri quand des mécaniciens – indépendants – ont comme de fait (toujours by the book) confirmé ces pépins…
Qu’est-ce qu’on a ri quand on a vu la STCUQ, toujours en retard d’un bus, importer des casseroles de tôle dont d’autres villes d’Amérique ne voulaient plus. Quand des cancers datés des années 60 ont dangereusement repris du service… Qu’est-ce qu’on en a vu des utilisateurs se geler le cul et entendu des clients grelottant, furieux. Et même à ce moment-là, difficile de comprendre qui voulait quoi quand… Mais puisqu’on ne compte plus ces grèves qui appartiennent au passé, passons à autre chose et oublions aussi la suppression de plus d’une centaine de départs depuis 1999.
Les chauffeurs…
Ah! les chauffeurs, au même titre que les policiers, sont des créatures dont les moeurs tout comme les sièges rembourrés ont heureusement évolué au fil des années. Quatre décennies d’efforts au chapitre de la politesse, du civisme, du savoir-vivre sur plusieurs générations ont peu à peu transformé cette bande d’ex-gros airs bêtes en individus passablement courtois. Tout le monde l’admet, nos chauffeurs en petite laine bleue ont même appris à garder leur calme lorsque le soixantième cave qui se trompe de cible les engueule à chaque hausse des tarifs. Bravo.
Des chiffres? Huit cent soixante-dix-neuf plaintes concernant la courtoisie du personnel chauffeur entre septembre 1999 et août 2000. Ajoutez deux fois plus d’utilisateurs fâchés qui ont passé outre le service des plaintes, soustrayez de cela un tiers de plaintes non fondées, bon nombre de retardataires qui se sont vu refuser l’accès au bus à un feu rouge pour des raisons de sécurité, ainsi que les petites vioques déçues de ne pas se faire baiser la main, dans le pire des cas ça ne fera toujours que deux plaintes par jour. Dans ces circonstances atténuantes que l’on pourrait appeler "le stress du passager", il s’agit visiblement d’un bilan positif. Prenez le bus à Paris un peu pour voir…
Encore une hausse tarifaire annoncée? Pas de bas de laine à la commission. Manque perpétuel de fonds pour tout, sauf les salaires. Si fait que toute dépense est systématiquement absorbée par les usagers. Et c’est cette fragilité face aux impondérables qui force les transports en commun de Québec à faire du surplace. Comme un peu partout d’ailleurs dans cette Amérique de gros chars où les flottes de véhicules qui tombent en ruine doivent écraser la pédale pour être à l’heure. Mais n’avez-vous pas remarqué que, ponctuellement, on nous encourage à prendre le bus pour ne serait-ce que faire un peu diminuer le taux de monoxyde à asthme dans l’air… Voilà qui évoque bien le célèbre cri. Avancez en arrière.