![Jeunes candidats aux municipales : Réservé aux adultes](https://voir.ca/voir-content/uploads/medias/2011/12/10780_1;1920x768.jpg)
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Jeunes candidats aux municipales : Réservé aux adultes
Sur un peu plus de 200 candidats présentés par les partis de Bourque et de Tremblay aux élections municipales, seulement quatre d’entre eux ont 30 ans et moins! Et les chefs estiment défendre la "jeunesse"… Les jeunes seraient-ils si désintéressés de la politique municipale?
Émilie Dubreuil
Mardi 23 octobre, 11 h 45. L’auditorium Jean-Lesage de l’Université de Montréal est plein à craquer pour un autre des nombreux débats qui ont ponctué la campagne électorale. Cette fois, Pierre Bourque et Gérald Tremblay sont attendus de pied ferme par les étudiants. Nous sommes près de l’échéance électorale du 4 novembre, et l’on sent bien dans le discours des deux candidats à la mairie le désir de plaire aux jeunes. Aussi, Bourque et Tremblay se targuent-ils, pendant le débat, d’avoir de nombreux jeunes dans leurs équipes respectives. Du côté de Vision Montréal comme de l’Union des citoyens, on qualifie de "jeunes" les moins de 35 ans. Ce qui, évidemment, élève légèrement la représentation de jeunes parmi les deux équipes.
Les jeunes en politique municipale forment une espèce rare. Par "jeunes", entendons les moins de 30 ans. Dans le lot de candidats des partis de Bourque et Tremblay qui se présenteront à l’élection du 4 novembre prochain, on ne compte que quatre représentants qui répondent à ce critère d’âge. Quatre sur 204, c’est-à-dire à peine 2 % des gens qui veulent nous représenter à la mairie de la nouvelle ville, alors que les jeunes de moins de 30 ans constituent près de 20 % de l’électorat montréalais.
Selon Lyne Hamel, 28 ans, candidate pour Vision Montréal dans Louis-Cyr: "Ça prend un certain cran pour se présenter en politique. Souvent, les jeunes n’ont pas ce courage, ils n’osent pas." Manque d’audace ou manque d’intérêt? Nicolas Tétrault, candidat de Vision Montréal dans le secteur est du Plateau-Mont-Royal, parle plutôt d’une sorte de laxisme des jeunes vis-à-vis de l’engagement politique. "Dans ma génération, il y a un certain je-m’en-foutisme, car les jeunes sont désabusés."
Désabusé, Nicolas Tétrault, le bébé de l’équipe Bourque, est loin de l’être. Après deux défaites électorales, il croit que, cette fois-ci, il sera élu et se donne corps et âme à sa campagne électorale. "Je suis né au bord de l’eau dans une grande maison, j’ai été gâté par la vie. Alors, au lieu de me plaindre, je m’implique. Si je suis élu, je vais donner tout ce que j’ai. Même à ceux qui n’auront pas voté pour moi."
Nicolas Tétrault est un militant actif au sein du Parti québécois et du Bloc québécois. Bachelier en sciences politiques, son intérêt pour la chose politique ne date pas d’hier. À 19 ans, il devint le plus jeune candidat à une élection provinciale. Il se présentait alors sous la bannière péquiste dans le comté de Robert-Baldwin. Aux dernières élections fédérales, c’est lui qui a représenté le Bloc québécois dans Brossard-La Prairie. Après le provincial et le fédéral, Nicolas Tétrault s’engage maintenant sur la scène municipale. Pour justifier ce nouvel intérêt, il met de l’avant la notion de proximité. "En politique, c’est important d’être près des préoccupations du monde." Sa plate-forme électorale est-elle différente, du fait de son jeune âge? "Je n’ai pas choisi ma date de naissance et je veux surtout représenter les gens du Plateau; tant mieux si les jeunes se reconnaissent en moi."
Plus concret
Lyne Hamel mène sa deuxième campagne dans Louis-Cyr. En 1998, elle avait perdu le district par 223 voix. À son avis, le palier municipal est le plus intéressant car il est le plus concret. "On peut, au municipal, régler les choses tout de suite", estime-t-elle. La politique, Hamel est tombée dedans quand elle était petite. "Mon grand-père était organisateur politique; mon père l’est toujours. J’ai grandi là-dedans." Ainsi, Lyne Hamel se souvient du jour de sa remise de diplômes: son père était absent à cause du congrès d’un parti politique, et elle le regretta. Quand on lui demande de quel parti il s’agit, elle esquive la question… Membre du conseil d’administration de Vision Montréal depuis 1998 et du Club optimiste de Saint-Henri, Lyne Hamel déplore le fait que les jeunes ne s’impliquent pas en politique. Alors elle veut montrer l’exemple. "Les jeunes réclament des choses, mais il faudrait qu’ils soient plus présents."
Malgré ses 24 ans, Hugo Morissette n’est pas le dernier venu sur la scène municipale. Militant au sein du défunt parti de Jacques Duchesneau, il joint le parti de Gérald Tremblay dès sa fondation. Non seulement est-il candidat dans le district Marie-Victorin, dans Rosemont, mais il est aussi président de la Commission des jeunes de l’Union des citoyens et des citoyennes de l’île de Montréal.
Le candidat junior de l’équipe de Gérald Tremblay inspire la sympathie avec ses petites lunettes et son sourire d’optimiste imperturbable. Hugo Morissette a une bouille de jeune intellectuel et voudrait bien, un jour, devenir éditorialiste. D’ailleurs, il a publié près de 25 textes d’opinion dans La Presse et Le Devoir au cours des trois dernières années. Comme Nicolas Tétrault, il détient un baccalauréat en sciences politiques; mais, contrairement à son collègue, les enjeux provinciaux ou fédéraux ne l’intéressent guère. "Ça ne me touche plus depuis déjà plusieurs années!"
Candidats "poteaux"
Hugo Morissette n’aime pas qu’on le qualifie de politicien et n’envisage pas de faire carrière en politique. "Je sollicite un mandat. C’est comme avoir un contrat de quatre ans." Le jeune diplômé de l’École d’administration publique travaille aujourd’hui à la direction du placement étudiant. Il comprend bien les problèmes que vivent les jeunes et se considère un peu comme leur porte-parole. Or, Hugo Morissette se présente dans un secteur habité, majoritairement, par des personnes âgées, et il place leurs préoccupations en tête de liste de son programme électoral, bien qu’il préconise, avec l’aile jeunesse de son parti, certaines mesures visant à améliorer le sort des jeunes à Montréal. Il cite, entre autres choses, l’engagement de son chef visant à faire bénéficier les étudiants, de tous âges, d’un tarif réduit pour l’utilisation du transport en commun à Montréal; et dénonce surtout que, depuis l’arrivée au pouvoir de l’équipe Bourque, l’effectif des moins de 30 ans ait baissé de 15 % au sein de la fonction publique municipale. Archétype du jeune impliqué depuis toujours, Hugo s’explique mal le manque de jeunes intéressés par la politique municipale.
Martin Dumont, son collègue de 27 ans, a sa petite théorie là-dessus. "C’est le même principe que la saucisse Hygrade, estime-t-il. À ce que je sache, il n’y en a jamais eu, au conseil municipal, de jeunes conseillers. S’il y en avait plus, il y aurait davantage de jeunes candidats."
Martin Dumont a étudié les sciences politiques, à l’instar de ses confrères. Il s’est même spécialisé en administration municipale. Candidat en 1998 dans Longue-Pointe avec l’équipe de Jacques Duchesneau, il a servi, de son propre aveu, de candidat "poteau". À son avis, c’est trop souvent le rôle qu’on attribue aux jeunes candidats. Encouragé par ses concitoyens, il renouvelle l’expérience cette année dans le même district. Cette fois-ci, il ne se considère plus comme le jeune de service qu’on envoie à l’abattoir.
Reste à savoir s’ils survivront à l’élection. Et si les jeunes voudront bien voter…